I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE
Auteur : Pierre de Chevigny
Titre : S comme Sophie
Éditeur : XYZ
Collection : Romanichels
Année : 2011
Éditions ultérieures :
Désignation générique : Roman
Cote : 3
Quatrième de couverture :
« Le narrateur a un fils de trois ans et deux maîtresses. Il pense souvent à une ancienne amoureuse, du nom de Sophie, qui l’a quitté ou… qu’il a tuée à coups de couteau, il ne sait trop. Il a entrepris une thérapie avec une psychologue chez qui il se rend régulièrement. Il se dit fou.
Lire S comme Sophie, c’est entrer dans la tête de quelqu’un qui ne sait plus distinguer la réalité du fantasme, pour qui la ligne de démarcation entre les deux est floue, sans cesse fuyante. C’est vivre cette confusion de l’intérieur et voir le délire surgir dans la réalité.
Pourtant, ce narrateur semble mener une vie «normale». Il écoute de la musique, il va boire et draguer au Cheval blanc ou aux Bobards, il conduit son fils à la garderie, il assiste à un lancement de poésie au Saint-Sulpice, il écrit un roman et en discute avec son ami Richard… Mais il voit aussi un rat traverser son appartement, puis les yeux de centaines de rats tapis sous ses meubles, il voit un doigt coupé dans un verre et des coups de couteau s’enfoncer dans le dos de Sophie. Confus et pourtant lucide, sans illusions sur lui-même et sur ce qui l’entoure, il jette sur le monde un regard cynique, empreint d’humour noir, tranchant comme un scalpel ou comme le couteau avec lequel il a peut-être tué Sophie. Son état affectif est trouble, mais son intelligence est vive.
S comme Sophie est un roman lyrique, troublant, beau comme un blues lancinant chanté d’une voix rauque.»
II- CONTENU GÉNÉRAL
Résumé de l’œuvre :
La quatrième de couverture résume très bien l'oeuvre.
Thème(s) :
La perception du réel?
III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION
Explication (intuitive mais argumentée) du choix :
Il n'y a pas de rupture actionnelle à proprement parler, toutefois, la rupture interprétative est absolument indéniable. (Voir la section : Validation du cas au point de vue de la rupture).
Appréciation globale :
J'ai moyennement apprécié ce roman qui d'ailleurs, n'est pas des plus intéressants pour nous, puisque la question de l'action n'y est pas traitée et par conséquent, on ne peut pas vraiment voir, chez le personnage, une rupture sur le plan actionnel. Cependant, en raison de la forte rupture interprétative que vit le personnage-narrateur, j'ai décidé de ne pas exclure ce roman de notre liste.
IV – TYPE DE RUPTURE
Validation du cas au point de vue de la rupture :
a) actionnelle : remise en question de l’intention (et éventuellement de la motivation); logiques cognitives/rationnelles ou sensibles; présence ou absence d’un nœud d’intrigue et d’une résolution; difficulté/incapacité à s’imaginer transformer le monde (à s’imaginer le monde transformable), etc.
b) interprétative : difficulté/incapacité à donner sens au monde (à une partie du monde) de façon cohérente et/ou conforme à certaines normes interprétatives; énigmaticité et/ou illisibilité du monde; caducité ou excentricité interprétative; etc.
a) rupture actionnelle : Comme déjà mentionné, on ne peut pas vraiment affirmer qu'il y a rupture actionnelle chez le personnage-narrateur, puisque la question de l'action est plutôt évacuée du roman. De ce fait, le personnage se montre bien sûr très peu actif; ses seules actions se résument à écrire, boire dans les bars, coucher avec ses maîtresses ou aller chercher son fils. En ce qui concerne le meurtre, on ne sait pas s'il l'a réellement commis. Bien qu'il agisse peu, agir ne semble toutefois pas poser problème pour lui, du moins, rien n'est dit à ce sujet.
b) rupture interprétative : Le personnage-narrateur a énormément de mal à saisir la réalité. En fait, lorsque le personnage raconte/écrit, le lecteur ne sait jamais s'il imagine volontairement les faits (en sachant que la réalité n'est pas ainsi), s'il rêve ou fantasme, s'il hallucine ou s'il décrit bel et bien la réalité telle qu'elle est. Le lecteur ne peut avoir aucune certitudes; il est mené en bateau. L'énigme principale concerne bien sûr le fait qu'on ne sait pas si le personnage a tué son ex ou s'il imagine seulement qu'il l'a tuée. En plus, il entremêle les différentes périodes de sa vie (avec Sophie et après Sophie) sans vraiment les distinguer. Enfin, puisque le personnage se dit schizophrène, il se laisse aller à ses excentricités. Il semble se complaire dans ses visions fantasmatiques, ne cherchant pas vraiment à s'en défaire pour avoir une juste perception des choses. On ne peut absolument pas faire confiance à ses interprétations.
V – SPÉCIFICITÉS POÉTIQUES
Validation du cas au point de vue narratif/poétique (voix, fiabilité du narrateur, registres fictionnels, temporels, type de configuration narrative, etc.)
Narration autodiégétique extrêmement non fiable. Le Roman est faiblement configuré et très fragmenté, il comprend beaucoup élipses et analepses. En fait, le texte se divise en de nombreux courts paragraphes qui n'ont parfois pas vraiment de lien les uns avec les autres. La narration est donc quelque peu chaotique et plus ou moins linéaire. On se retrouve dans le fil de pensées du personnage-narrateur qui passe d'une idée à une autre ou d'un moment à un autre sans aucune retenue.