Forest, Philippe & Claude Gaugain (dir.), Les Romans du je, Nantes, Pleins Feux, 2001.
Études de cas : Perec, Doubrovski, Sollers, Rouaud, Alferi,
Gaugain, C. « Préface : les romans du Je », p. 10-15.
Forest, P. « Du roman d’avant-garde au roman vécu. À propos de quelques fausses idées concernant le retour du Je dans la littérature française », p. 38-52.
La critique constate, quasi unanimement, qu’une page aurait été tournée au début des années 1980, celle de la fin des avant-gardes. Pour les uns cela signifie un reflux, un crépuscule, une fin de siècle ou une crise, alors que pour les autres, il s’agit d’une maturité provenant des leçons apprises durant la modernité et de la liberté qu’a ramenée la postmodernité. Régression ou résurrection, tel est le débat, mais presque tous s’accordent sur le fait que la fin des avant-gardes a donné lieu au retour au Je. Forest prétend que ce retour au Je se mettait déjà en marche chez les avant-gardes dès le début des années 1970 (ou bien, 1968). L’écriture du Je serait donc justifiable d’une double lecture, postmoderne/moderne, « qui fait d’elle tantôt l’expression sans risque d’une quête identitaire regressive tantôt celle d’une aventure poétique plus problématique où redeviennent actifs les questionnements les plus rigoureux et les plus productifs de l’avant-garde littéraire. » (p. 48)
Gaugain, C. « De quelques lignes de fuite du récit autobiographique dans les années 1990 : de l’autoperformance intime au journal d’un dehors », p. 148-176.
(Christine Angot, Annie Ernaux, Jacques Réda)
« des auteurs comme A. Ernaux et J. Réda préfèrent prendre le détour du dehors pour parler d’eux. Cette voie du dehors permet de contester les formes usées, et qui abusent, du récit de vie ; elle permet aussi de décentrer le sujet, de le rendre en partie à lui-même sans l’isoler du monde. Cette démarche entraîne une rupture avec la rhétorique autobiographique mais elle témoigne sans doute aussi d’un mouvement plus large de remise en cause de la situation du sujet dans le monde. » (p. 149)
« Parfois et c’est une des limities du roman ru je, celui-ci passe complètement de l’autre côté, et sachant que tout est littérature, verse dans la théâtralisation. À partir de cette mauvaise consciense l’autofiction ne peut plus que devenir une ironique parodie d’elle-même et se perdre dans “l’autoperformance” ; devant l’impossibilité de dire un authentique vécu il ne reste plus qu’à jouer avec les masques. » (p. 155)