Les deux révisions précédentesRévision précédenteProchaine révision | Révision précédente |
ranx:signes_cliniques [2012/11/30 14:00] – sebastien | ranx:signes_cliniques [2018/02/15 13:57] (Version actuelle) – modification externe 127.0.0.1 |
---|
Notice bibliographique :Jeanney, Christine, //Signes cliniques//, Éditions numériques Publie.net (coll. « Zone risque »), 2011, [en ligne], http://www.publie.net/fr/ebook/9782814503540/signes-cliniques. | =====FICHE DE LECTURE===== |
| ==== I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE ==== |
| |
| |
| **Auteur :** Jeanney, Christine |
| |
== Résumé de l’œuvre : == | **Titre :** Signes cliniques |
| |
Une femme est atteinte d'une maladie qui touche "une femme sur sept". Hospitalisée et très faible, elle regarde le monde par la fenêtre, elle tente de comprendre et d'interpréter la portion de réalité à laquelle elle a accès: "Chercher du sens, il faut chercher du sens." Entre un aller-retour à la toilette, la visite d'une infirmière et sa préparation pour des examens médicaux qu'elle doit subir, il ne passe pas grand chose dans cette oeuvre par ailleurs plus proche de la nouvelle que du roman. | **Éditeur :** Publie.net : http://www.publie.net/fr/ebook/9782814503540/signes-cliniques. |
| |
== Narration : autodiégétique == | **Collection :** Zone risque |
| |
Explication : La femme hospitalisée raconte des bribes de son quotidien à la première personne. | **Année :** 2011 |
| |
| **Éditions ultérieures:** Coll. Temps réel (2012) |
| |
== Personnage(s) en rupture : narratrice anonyme == | **Désignation générique :** |
| |
| **Quatrième de couverture :** |
| |
| « Statistiques : une femme sur sept. » C'est tout ce qu'on saura sur ce qui justifie l'hospitalisation de la narratrice.\\ |
| Texte sans pathos : on examine le temps, les objets, les couloirs, les lumières. La reproduction de Dufy au mur, la translation qu’on fait de son corps jusqu’aux toilettes. Un bruit d’école dans le lointain.\\ |
| On interroge la relation sociale, même dans le détail et le grossissement des conversations qui vous rejoignent là, infirmières notamment : les places, croirait-on, sont interchangeables.\\ |
| Il n’est donc moins question de clinique (au sens où Deleuze et Guattari nous y emmenaient) que de signes, et donc de littérature.\\ |
| Sauf en cela qu’elle nous concerne par notre contact le plus direct au monde, et à une expérience dont nul de nous n’est indemne – une femme sur sept, qui d'entre nous ne connaîtrait pas l'une d'elles ? |
| |
== A) Nature de la rupture : actionnelle et interprétative == | ==== II- CONTENU GÉNÉRAL ==== |
| |
Explication : Elle n'a plus du tout accès physiquement au monde et ne peut donc pas y agir. De cet isolement découle une claustration mentale. Elle n'a pratiquement plus accès au monde et ne peut par conséquent l'interpréter qu'à partir de sa petite ouverture, sa fenêtre sur la ville. Elle est consciente que le monde continue, mais elle n'en fait plus partie. | **Résumé de l’œuvre :** |
| |
"Une question de dépossession. Derrière la vitre, la ville se déroule dehors, sans moi. La ville ne résonne pas et ne raconte rien. La ville plate, sa profondeur défaite, un décor peint sur une bâche tendue entre deux rouleaux, quel machiniste a oublié de l’actionner. | Une femme est atteinte d'une maladie qui touche "une femme sur sept". Hospitalisée et très faible, elle regarde le monde par la fenêtre, elle tente de comprendre et d'interpréter la portion de réalité à laquelle elle a accès: "Chercher du sens, il faut chercher du sens." Entre un aller-retour à la toilette, la visite d'une infirmière et sa préparation pour des examens médicaux qu'elle doit subir, il ne passe pas grand chose dans cette oeuvre par ailleurs plus proche de la nouvelle que du roman. |
| |
Je connais cette ville, je devrais la connaître, je tâtonne ses formes à l’aveuglette, mais je ne parle pas sa langue. La ville intraduisible, l’alphabet perdu de ses mots côte à côte, la tour orange et les lettres capitales qui la bordent, et des toits, magma vert au hasard, et des routes brillantes, des points mouvants hermétiques, des couleurs inutiles ou inutilisables, du mobile vaguement mobile et du statique. | **Thème(s) :** Maladie, santé, déplacement |
| |
Chercher du sens, il faut chercher le sens." | ==== III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION ==== |
| |
| **Explication (intuitive mais argumentée) du choix :** Ici, comme dans //Le travail de l'huître// de Jean Barbe et //Du mercure sous la langue// de Sylvain Trudel, l’handicap est la cause de la rupture. Du moins, rien ne laisse croire que la femme était déjà déconnectée avant son hospitalisation. Ce ne sont donc pas tellement ses actions qui la mettent à l'écart, mais plutôt un élément pour l'essentiel hors de son contrôle. |
| |
== B) Origine de la rupture : actorielle (physique ?) == | **Appréciation globale :** Franchement, j'ai trouvé ça soit trop long pour une nouvelle, soit trop unidimensionnel pour un roman. |
| |
Explication : J'ai indiqué "physique" entre parenthèses parce qu'ici, l'handicap n'est pas une manifestation de la rupture du personnage, mais bien, comme dans //Le travail de l'huître// de Jean Barbe et //Du mercure sous la langue// de Sylvain Trudel, la cause de la rupture. Du moins, rien ne laisse croire que la femme était déjà déconnectée avant son hospitalisation. | ==== IV – TYPE DE RUPTURE ==== |
| |
Certes, la rupture trouve son origine chez le personnage, toutefois il me semble pertinent de préciser que ce ne sont pas ses actions qui le mettent à l'écart, mais plutôt un élément pour l'essentiel hors de son contrôle. | === Validation du cas au point de vue de la rupture === |
| |
| ** actionnelle et surtout interprétative:** |
| |
== C) Manifestations : cognitive == | Elle n'a plus du tout accès physiquement au monde et ne peut donc pas y agir. De cet isolement découle une claustration mentale. Elle n'a pratiquement plus accès au monde et ne peut par conséquent l'interpréter qu'à partir de sa petite ouverture, sa fenêtre sur la ville. Elle est consciente que le monde continue, mais elle n'en fait plus partie. |
| |
Ainsi que je l'ai écrit au point précédent, la posture passive et les handicaps ne peuvent être considérés comme une manifestation de la rupture que vit le personnage principal. Ils sont la cause de cette rupture et rien dans le récit ne permet de croire le contraire. | "Une question de dépossession. Derrière la vitre, la ville se déroule dehors, sans moi. La ville ne résonne pas et ne raconte rien. La ville plate, sa profondeur défaite, un décor peint sur une bâche tendue entre deux rouleaux, quel machiniste a oublié de l’actionner.\\ |
| Je connais cette ville, je devrais la connaître, je tâtonne ses formes à l’aveuglette, mais je ne parle pas sa langue. La ville intraduisible, l’alphabet perdu de ses mots côte à côte, la tour orange et les lettres capitales qui la bordent, et des toits, magma vert au hasard, et des routes brillantes, des points mouvants hermétiques, des couleurs inutiles ou inutilisables, du mobile vaguement mobile et du statique.\\ |
Tout de même, on peut noter que la capacité du personnage à se représenter lui-même ou les autres est parfois déficiente, par exemple le long extrait suivant où la femme se décrit comme un hologramme, en laissant croire qu'elle a la capacité d'éteindre son cerveau pour se détacher de son corps meurtri : | Chercher du sens, il faut chercher le sens." |
| |
"À moins que ce ne soit moi. Des gens entrent, sortent, me prennent le bras, me saluent, déposent des choses, me questionnent, mon hologramme répond Hier, Le mois dernier, Monsieur H, Merci, en s’arrangeant pour que les réponses concordent, pendant que, dans une forêt à l’est mon vrai corps marche avec persévérance, __cela explique le flottement, la distance inconstante située entre menton et cou, et la sensation d’être un crâne piqué au bout d’un manche télescopique.__ | |
| |
À moins que ce ne soit eux. Des hologrammes de silhouettes humaines avancent dans des chaussures confortables, à l’intérieur de leur poche un stylo et sur le revers de celle-ci un badge aux lettres tapées à la machine. [...] Ils se déplacent assortis de paroles reconstituées générées aléatoirement par un ordinateur central. Ça pourrait fonctionner. C’est une question de technique. | |
| |
L’hologramme de moi s’allonge sur l’hologramme de lit. Ils se fondent l’un dans l’autre puis durcissent, puisque nous sommes réels.Je peux choisir. C’est une question de choix. Choisir de regarder par la fenêtre la ville, la fumée qui s’élève ponctuellement ou la télévision toujours en marche, tête inclinée à cause de l’angle du socle fixé au mur. Ou bien fixer mes pieds sous le drap de coton pour lire le sigle C.H.R. __Ou ne rien regarder du tout, laisser mes yeux cesser de voir et attendre.__" | Tout de même, on peut noter que la capacité du personnage à se représenter lui-même ou les autres est parfois déficiente, par exemple le long extrait suivant où la femme se décrit comme un hologramme, en laissant croire qu'elle a la capacité d'éteindre son cerveau pour se détacher de son corps meurtri. Alerte au long extrait : |
| |
| "À moins que ce ne soit moi. Des gens entrent, sortent, me prennent le bras, me saluent, déposent des choses, me questionnent, mon hologramme répond Hier, Le mois dernier, Monsieur H, Merci, en s’arrangeant pour que les réponses concordent, pendant que, dans une forêt à l’est mon vrai corps marche avec persévérance, __cela explique le flottement, la distance inconstante située entre menton et cou, et la sensation d’être un crâne piqué au bout d’un manche télescopique.__\\ |
| À moins que ce ne soit eux. Des hologrammes de silhouettes humaines avancent dans des chaussures confortables, à l’intérieur de leur poche un stylo et sur le revers de celle-ci un badge aux lettres tapées à la machine. [...] Ils se déplacent assortis de paroles reconstituées générées aléatoirement par un ordinateur central. Ça pourrait fonctionner. C’est une question de technique.\\ |
| L’hologramme de moi s’allonge sur l’hologramme de lit. Ils se fondent l’un dans l’autre puis durcissent, puisque nous sommes réels.Je peux choisir. C’est une question de choix. Choisir de regarder par la fenêtre la ville, la fumée qui s’élève ponctuellement ou la télévision toujours en marche, tête inclinée à cause de l’angle du socle fixé au mur. Ou bien fixer mes pieds sous le drap de coton pour lire le sigle C.H.R. __Ou ne rien regarder du tout, laisser mes yeux cesser de voir et attendre.__"\\ |
| |
== D) Objets : Absence d'affect, de pathos == | De plus, malgré la situation pour le moins dramatique ou angoissante que vit la narratrice, jamais elle ne laisse transparaître le moindre sentiment, jamais elle n'émet la moindre plainte. Elle se contente de regarder autour d'elle, de décrire ce qu'elle voit, ce qui lui arrive: son séjour à la toilette, l'infirmière qui vient la voir, etc. |
| |
Malgré la situation pour le moins dramatique ou angoissante que vit la narratrice, jamais elle ne laisse transparaître le moindre sentiment, jamais elle n'émet la moindre plainte. Elle se contente de regarder autour d'elle, de décrire ce qu'elle voit, ce qui lui arrive: son séjour à la toilette, l'infirmière qui vient la voir, etc. | |
| |
| ==== V – SPÉCIFICITÉS POÉTIQUES ==== |
| |
== E) Manifestations spatiales : Petitesse d'une pièce et sensation d'enfermement == | Validation du cas au point de vue narratif/poétique (voix, fiabilité du narrateur, registres fictionnels, temporels, type de configuration narrative, etc.) |
| |
Lieux représentés : la chambre d'hôpital | [[Signes cliniques - Ancienne Fiche]] |
Explication : À l'instar des personnages de //La chambre// de Simon Lambert et de //J'habite dans la télévision// de Chloé Delaume, que je viens tout juste de lire, la femme de //Signes cliniques// est cloîtrée dans une seule pièce pendant l'ensemble du roman/de la nouvelle: "Je suis personne mortelle dans une impersonnelle chambre". De plus, comme dans //La chambre//, son seul accès au monde extérieur réside dans une fenêtre. | |