fq-equipe:olivier_dufault_bilan_ql_bibliographie_figures_d_ecrivains_reels_ou_imaginaires

BILAN DE RECHERCHE SUR LE DÉPOUILLEMENT DE LA QL (1998-AUJOURD’HUI [2010]) POUR LE PROJET « FIGURES D’ÉCRIVAINS »

1- Résumé de la recherche :

Avec ce nouveau projet, il a été décidé d’élargir le corpus, non plus seulement aux biographies d’écrivain, mais à toutes les œuvres mettant en scène un écrivain, réel ou fictif. Il s’agit, en quelque sorte, d’un corpus de contrôle qui nous permettra de cerner les enjeux et, éventuellement, de comparer les deux types de figures dans les œuvres.

Pour ce faire, on m’a donné comme charge de dépouiller la Qunizaine littéraire sur plus d’une décennie à la recherche de biographies littéraires, de romans biographiques et de romans tout courts, en fait de tous les textes où apparaissait une figure d’écrivain, fictive ou réelle (mais en excluant toutefois les biographies écrites par un biographe qui n’est que biographe − qui n’a pas été par ailleurs un écrivain, un auteur −, quoique en se gardant le droit d’y inclure des biographies plus inventives et libres sur les plans esthétique et éthique, peu importe le parcours du biographe).

2- Les constats, les hypothèses :

Suite à cette recherche, je suis amené à avancer que :

− l’écrivain (réel ou fictif) comme personnage a une place de choix dans la littérature française et traduite en français (la biblio fait 50 pages à environ 6 titres par page, soit 300 titres) ;

− malgré l’hypothèse initiale (il y a plus de figures d’écrivains réels que fictifs), le personnage d’écrivain fictif (en mode « non-autobiographique ») est en santé, accaparant un peu moins de 40% de la bibliographie (mais ici, encore, sont exclues les « biographies-biographies », qui ont nécessairement pour sujet un écrivain réel et qui, donc, prises en compte, feraient indéniablement pencher la balance en faveur d’une représentation beaucoup plus importante de l’écrivain réel) ; Chiffres à revoir à la lumière de la bibliographie d’écrivains fictifs revue et corrigée. Semble plus être de l’ordre du 15%…

− en ce qui concerne ces figures d’écrivains fictifs, on peut trouver plusieurs figures que je range ici en sous-genres : roman du biographe, roman du traducteur, roman du « nègre » (très à la mode), roman de l’éditeur, roman de l’universitaire (quelques romans répertoriés ont pour scène générale un colloque universitaire − souvent des romans ironiques et farfelus), roman du critique, roman d’un enquêteur en quête d’un écrivain (dont un où Maigret enquête sur Simenon), roman sur le monde de l’édition, romans historiques où se mêlent des lettrés fictifs et réels, etc. ;

− l’œuvre de ces écrivains (sur la base de mes recherches qui restent après tout en superficie des œuvres de la bibliographie) n’est que rarement décrite, que l’écrivain soit réel ou fictif (une recherche plus poussée ici est nécessaire afin de valider cette hypothèse) ;

− suivant le dernier constat, c’est surtout dans les biographies littéraires et d’écrivains qu’il faudrait chercher une critique de l’œuvre et un rapport vie-œuvre plus prenant ;

− donc, dans les romans où l’écrivain est fictif, cette figure n’est souvent que « fonctionnelle », voire accessoire, c’est-à-dire qu’il serait réalisateur, metteur en scène ou jardinier et il y aurait peu de différence (bon, il y a une limite, j’imagine, mais il faudrait aller lire) ;

− deux tendances dans les biographies et romans biographiques reviennent plus souvent : la première (de loin la plus populaire) consiste à aborder la vie d’un grand écrivain de manière intime, en marge de la grande histoire littéraire reçue (il y a donc appropriation d’une vie par un regard « oblique » ou marginal, et c’est ici à mon sens quasiment nier l’œuvre ou plutôt la présupposer pour aussitôt l’oublier et ne s’en tenir plus strictement qu’à l’intime de l’homme ou, plus rarement, de la femme) ; la seconde (les titres sont plus rares mais en même temps ils semblent d’avance avoir une plus grande valeur que beaucoup d’autres titres de cette biblio) en est une, négative, de désacralisation (ce que les Goncourt n’ont pas dit, Hugo est un traître à la Nation, Loti c’est n’importe quoi, Rilke venait à Paris pour se défoncer et se débaucher 24/24, etc…) ;

− les auteurs les plus prisés sont : Kafka, Céline, Rimbaud, Goethe, Hugo, Voltaire, Rousseau, Dumas, Loti, Genet, Giono, Sand, Colette, Carroll, les poètes anglais comme Byron, Polidori, etc. ;

− l’intérêt pour les figures d’écrivains est partagé partout dans le monde (au moins en Occident) : beaucoup de traductions dans cette bibliographie d’horizons différents (américains, britanniques*, latino-américains, espagnols, italiens, scandinaves, des Pays-Bas, etc…)

3- Commentaires :

Il est à peu près impossible pour le moment, en ce qui regarde les figures d’écrivains fictifs, de tenter d’en cerner les enjeux génériques (ex : est-ce un roman à clef ? une « fiction d’auteur » ? une autobiographie déguisée ?). Aussitôt qu’il était clair qu’un titre appartenait, par exemple, au roman autobiographique, il n’était pas retenu − on ne retenait bien entendu aucune autofiction n’y autobiographie −, mais malgré tout il doit en rester quelques-uns dans cette biblio, car le roman autobiographique ou l’autobiographie déguisée ne peuvent être catégorisés comme tels qu’après un certain travail d’analyse (paratextuelle, entre autres). L’œuvre : pour l’instant − mais encore, je le redis, il faut aller lire −, l’œuvre semble être la moindre des préoccupations des auteurs (surtout pour les romans où figure un écrivain fictif, mais aussi pour plusieurs romans biographiques). Dans le cas des écrivains réels, elle sera sans doute abordée, mais la bibliographie et une recherche superficielle montrent qu’elle est surtout présupposée pour être aussitôt oubliée (le pouvoir d’attraction d’un Voltaire comme personnage, par exemple, résulte nécessairement de l’histoire littéraire et donc d’une lecture − massive − de l’œuvre, ce qui n’empêche pas cependant les auteurs de romancer une vie et non de critiquer une œuvre). Revenir à la vie, ne s’en tenir qu’à la vie, donc, semble un moyen d’appropriation d’écrivains par d’autres écrivains…

*

Aussi, pour la suite des recherches sur la figure d’écrivain fictif, il y a tellement de romans du nègre qu’il serait difficile de ne pas en tenir compte. C’est nécessairement un discours sur la littérature contemporaine (par la lunette du monde de l’édition) et une manière d’aborder à la fois la vie et l’œuvre (pas de vie et pas d’œuvre).

En quoi ce genre de roman reflète un certain état du champ littéraire/éditorial français (et peut-être aussi québécois mais dans une moindre démesure)? L’écrivain est perdu dans une mer d’écrivains et son œuvre n’est pas de la littérature mais du bruit?

fq-equipe/olivier_dufault_bilan_ql_bibliographie_figures_d_ecrivains_reels_ou_imaginaires.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

Donate Powered by PHP Valid HTML5 Valid CSS Driven by DokuWiki