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ranx:penseurs_inactifs [2016/02/23 11:18] – annelisabeth | ranx:penseurs_inactifs [2018/02/15 13:57] (Version actuelle) – modification externe 127.0.0.1 |
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Dans une ville au bord de la Méditerranée, un ancien comptable dans la quarantaine, asthmatique, divorcé qui peine à payer la pension alimentaire, chômeur qui n'aura bientôt plus droit à l'assurance-chômage et dépressif à temps presque plein, n'a droit qu'à quelques rares instants de bonheur lorsque, le dimanche, il peut passer quelques heures avec sa fille. Face à l'échec de sa vie, il s'ennuie. Il affirme qu'il voulait « exercer en paix mon métier de comptable, avec à mes côtés la femme que j’avais épousée et la fille que j’avais faite, dans l’hébétement salutaire de l’habitude, ceci afin que ma mémoire s’en tienne à un rôle strictement informatif » (p. 158) Puisque son dessein est de retrouver cet état, le lecteur serait en droit de s'attendre à ce qu'il tente de reconquérir sa femme, qu'il fasse des efforts pour se retrouver un emploi, mais puisqu'il est déprimé, il réfléchit à son enfance difficile (il accuse son éducation d'être la cause de ses maux) et ne répond pas au téléphone. Lorsqu'il décroche finalement un emploi, il cesse de s'y présenter et s'enfonce dans sa situation déplaisante. | Dans une ville au bord de la Méditerranée, un ancien comptable dans la quarantaine, asthmatique, divorcé qui peine à payer la pension alimentaire, chômeur qui n'aura bientôt plus droit à l'assurance-chômage et dépressif à temps presque plein, n'a droit qu'à quelques rares instants de bonheur lorsque, le dimanche, il peut passer quelques heures avec sa fille. Face à l'échec de sa vie, il s'ennuie. Il affirme qu'il voulait « exercer en paix mon métier de comptable, avec à mes côtés la femme que j’avais épousée et la fille que j’avais faite, dans l’hébétement salutaire de l’habitude, ceci afin que ma mémoire s’en tienne à un rôle strictement informatif » (p. 158) Puisque son dessein est de retrouver cet état, le lecteur serait en droit de s'attendre à ce qu'il tente de reconquérir sa femme, qu'il fasse des efforts pour se retrouver un emploi, mais puisqu'il est déprimé, il réfléchit à son enfance difficile (il accuse son éducation d'être la cause de ses maux) et ne répond pas au téléphone. Lorsqu'il décroche finalement un emploi, il cesse de s'y présenter et s'enfonce dans sa situation déplaisante. |
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| __**//La nuit des morts-vivants// - François Blais**__ |
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| À Grand-Mère, Pavel et Molie sont payés pour écrire leur quotidien, sans qu'ils ne sachent pourquoi. La vacuité de leurs existences de zombies modernes est traitée sur un ton dérisoire. Même s'ils sont allés à l'école secondaire ensemble, Pavel et Molie n'ont plus le moindre contact depuis cette époque, ce qui est étonnant étant donné leurs nombreux points communs. Cela constitue un des seuls ressorts de l'intrigue. Pavel vit et travaille la nuit, à l'entretien d'un centre commercial alors que Molie est essentiellement noctambule, mais n'a volontairement pas d'emploi. Pavel et Molie ne se rencontrent jamais, mais ils ont plusieurs interactions théoriques. L'absence d'ambition des personnages et leur désir de ne pas s'inscrire dans le monde est la cause de leur inactivité. Ils sont fans de jeux vidéos, parlent des mêmes sujets (la poutine théorique, l'âme soeur impossible, etc.), louent les mêmes films d'horreur, utilisent la même métaphore de Schopenhauer des porcs-épics frileux, lui pour décrire sa vie sentimentale peu satisfaisante, elle pour parler de sa vie sociale, car elle est, justement, asociale, voire sociopathe à l'occasion. Ces réflexions n'entraînent, à aucun moment, une action quelconque pour se reconnecter avec la société. Un contraste est évident entre les compétences intellectuelles des protagonistes et ce qu'ils se contentent de faire. |
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| __**//Le ciel antérieur// - Mark Greene**__ |
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| Le roman est centré autour de trois personnages, mais le seul à être admissible dans cette catégorie est Pierre Orangel, petit éditeur parisien homosexuel et vieillissant qui a publié les deux autres personnages, Marc et Felicia. Les trois personnages ne se reverront pas durant six ans. Pendant ces années, Orangel repense au type étrange qu'était Marc Williams dont il a refusé de publier le troisième roman et il regrette à longueur de soirée n'avoir jamais pris le temps d'écrire lui aussi un livre. |
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| __**//Signes cliniques// - Christine Jeanney**__ |
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| Une femme est atteinte d'une maladie qui touche “une femme sur sept”. Hospitalisée et très faible, elle regarde le monde par la fenêtre, elle tente de comprendre et d'interpréter la portion de réalité à laquelle elle a accès: “Chercher du sens, il faut chercher du sens.” Entre un aller-retour à la toilette, la visite d'une infirmière et sa préparation pour des examens médicaux qu'elle doit subir, il ne passe pas grand chose. Elle n'a plus accès physiquement au monde et ne peut donc pas y agir. De cet isolement découle une claustration mentale. Elle ne peut qu'interpréter les choses à partir de sa petite ouverture, sa fenêtre sur la ville. Elle est consciente que le monde continue, mais elle n'en fait plus partie. |
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| __**//Un lac immense et blanc// - Michèle Lesbre**__ |
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| Une femme va attendre le train de 8h15 qui doit voir descendre l’Italien qu’elle croise chaque mercredi au café. Mais il n’est pas là. Elle marche dans la ville, se remémore sa jeunesse activiste, la naissance de son amitié avec un corbeau au Jardin des Plantes, sa relation avec Antoine, les villes où elle a marché. Voyages en train, en bus, à pied, c’est une marche solitaire dans la blancheur de la neige qui se rpête à l’évocation de fantômes du passé. La narratrice mène très peu d’actions à bien, renonce, doute de sa capacité à agir. Dans les cafés, elle observe et ne participe pas, attendant qu’un regard d’homme se pose sur elle sans rien faire pour le provoquer. Et lorsque c’est le cas, réagit-elle ? oui et non : elle fuit. « J’attendais qu’ils s’aperçoivent de ma présence, j’attendais jusqu’à ce qu’un regard se pose sur moi. Je le soutenais quelques secondes et je m’en allais. » (p.21) |
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| __**//L'herbe des nuits// - Patrick Modiano**__ |
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| Le narrateur, grâce à un carnet noir dans lequel il a l’habitude de noter des noms, des lieux, ou des moments, retrace une période de sa vie pendant laquelle il était le copain de Dannie, une jeune femme aux drôles de fréquentations, qui des problèmes avec l'immigration. Il se rend compte que ses souvenirs sont imprécis et qu'il ne reste de ce temps que les notes hétéroclites de son carnet noir. Dans le temps réel, le narrateur subit et accepte son sort. Donc, ne s’oppose pas aux choses et croit qu’elles sont telles quelles, inchangeables. Agir est superflu. La seule chose que Jean fait vraiment, c’est peut-être de noter plein de mots hétéroclites dans son carnet noir pour avoir une emprise sur le temps et démêler tout cela un jour. On peut noter une répétition de la question : «À quoi bon?» dans le roman. |
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| __**//Sur la dune// - Christian Oster**__ |
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| Paul projette de quitter Paris pour habiter Bordeaux. Entretemps, il doit prendre quelques jours de congé pour aider ses amis, Catherine et Jean, à désensabler leur maison au bord de la mer. Arrivé à Saint-Girons-Plage, il ne trouve pas ses amis. Ils ne sont ni à la maison ni à l'hôtel. À défaut d'avoir une autre activité, Le personnage décide de quand même procéder au "désensablage" de la maison. La volonté du personnage est plutôt étrange. De plus, il vit dans une attente presque perpétuelle : il laisse aux autres le soin de prendre les évènements en main. La principale caractéristique du personnage est son sens de l'analyse exacerbé. Il hésite constamment, surinterprète les moindres gestes de son interlocuteur. Les rapports aux autres passent par le silence : «Le silence, désormais, s'était installé entre nous comme le plus sûr moyen de dialogue.» (p.162) |
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| __**//Les mots des gorges// (Nouvelle (Un renard à mains nues)) - Emmanuelle Pagano**__ |
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| Une jeune femme est seule au bord de la mer. Elle regarde les baigneurs et repense à une rupture récente. La vie se déroule devant elle, mais elle ne pense qu’à sa peine: « [J]e suis sortie de sa vie, de notre vie, de la vie tout court peut-être, je suis entrée dans une enluminure du Moyen Âge, tout est si minutieusement là, tout est si attentivement précisé, je n’ai pas l’impression d’exister.» (p.15) |
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| __**//Palladium// - Boris Razon**__ |
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| Un homme hypocondriaque commence à ressentir de bizarres et douloureux symptômes; personne ne comprend ce qui lui arrive jusqu'à ce qu'un spécialiste le soupçonne d'être réellement atteint d'une maladie rare du système nerveux nommée syndrome de Guillain-Barré. Cette maladie paralyse le corps complètement pendant un certain temps. Tout au long de son hospitalisation, Boris ne peut qu'agir en pensée. Il entremêle rêves, hallucinations et réalité jusqu'à être complètement déconnecté du monde réel. Dans son esprit, il prend part à toutes sortes d'aventures durant lesquelles il meurt plusieurs fois et où apparaissent sporadiquement membres de la famille ou du corps infirmier.Dans ce récit on ne peut aucunement se fier au narrateur, car celui-ci entremêle souvenirs, rêves, hallucinations et réalité. Paralysé, il raconte les événements qui se déroulent dans son esprit et leur donne valeur d'événement réel. Ce monde intérieur qu'il s'est créé et dans lequel il se retrouve prisonnier et complètement seul est également qualifié de “petit camp de concentration” (p. 366). |
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| __**//Musaraignes// - Jacques Serena**__ |
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| Un homme vit d'abord avec une femme. Celle-ci travaille et vit de façon normale, comme tout le monde, pendant que lui passe ses journées à déambuler dans la maison en attendant qu'elle revienne du boulot. Un jour, elle en a marre et lui ordonne de ficher le camp, ce qu'il finit par faire sans vraiment s'obstiner, comme indifférent. Il échoue chez deux sœurs qui, pour une raison inconnue, acceptent de l'héberger dans une chambre vacante. Le personnage principal passe alors le plus clair de ses journées à se reposer dans son lit, à réfléchir et à se plaindre du traitement pourtant impeccable qu'il reçoit des sœurs.Peu à peu, on comprend qu'il passe son temps à penser plutôt qu'à agir. Et qu'à force de penser, il comprend mal les choses, sans compter que lorsqu'il a fini de penser, il est souvent trop tard pour agir ou, le plus souvent, il ne peux ou veux pas agir. |