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ranx:le_travail_de_l_huitre_-_ancienne_fiche

Notice bibliographique : BARBE, Jean, Le travail de l'huître, Montréal, Leméac, 2008, 147 p.

Résumé de l’œuvre :

Vers la fin du XIXe siècle, Andreï Léonovitch est un jeune paysan sibérien qui décide de quitter sa contrée natale pour se plonger dans l’effervescence saint-pétersbourgeoise. Il devient rapidement obsédé par l’idée d’assassiner le tsar Alexandre II, ce qui l'amène à participer à une réunion de conspirateurs d'opérette. Lors d'une de ces réunions, toutefois, il se frappe la tête contre une table par accident. Pour une raison mystérieuse, Andreï devient alors invisible et toute trace de son existence disparaît: personne ne sait qu'il est là et personne ne sait qu'il a déjà été là.

Après avoir constaté les détails de sa condition (p. 37 et 59: on ne le voit pas, on ne le sent pas ; s'il touche quelqu'un, il provoque de graves écoulements de sang ; il ne peut tuer un être vivant de ses mains ; etc.), il erre de par le monde, d'une part, afin de comprendre le mal dont il est atteint en visitant les expositions universelles et, d'autre part, pour essayer d'être vu, visitant notamment Alexandre Graham Bell avec l'espoir que la téléphonie lui permettra de signaler sa présence et Wilhelm Röntgen en souhaitant que ses rayons X le feront apparaître sur des clichés de squelettes. Il s'attache également à Raspoutine, car celui-ci semble l'apercevoir fugitivement entre deux orgies, avant de décider de vivre encore plus en marge de l'humanité. Tandis que la guerre fait rage entre Blancs et Rouges en Russie, il se construit une cabane camouflée dans la forêt et ne se rend en ville que pour se procurer des clous. Un jour, à son grand désarroi, une jeune femme, prisonnière de pillards, aboutit chez lui pour se cacher et panser ses plaies. Après quelques mois d'une cohabitation partielle où Andreï est véritablement devenu l'ange gardien de la jeune femme, celle-ci accouche d'un enfant issu d'un des viols qu'elle a subis de la part des pillards. La guerre bouleverse ensuite leur vie en autarcie et les conduit sur les routes cruelles de la Russie. Andreï finit par mourir à force de s'être privé pour aider la jeune femme et son enfant à survivre. À sa mort, son corps réapparaît.

Narration : extradiégétique, hétérodiégétique

Explication : Le narrateur ne fait aucune intrusion dans le récit. Sa narration est focalisée sur Andreï jusqu'à la page 92. Puis, le temps d'un chapitre par-ci par-là, la focalisation se fait sur le personnage de la jeune femme. Enfin, dans le dernier chapitre, il s'agit d'une focalisation externe, il me semble. Andreï est mort, la jeune femme est partie et deux hommes, seuls personnages dont on ne connaît pas les pensées, essaient de faire disparaître la dépouille d'Andreï.

Personnage(s) en rupture : Andreï Léonovitch
A) Nature de la rupture : Actionnelle

Explication : À partir de la fin de l'existence visible d'Andreï, la rupture est consommée. Dès lors, il n'est plus un humain/personnage au même titre que les autres qu'il côtoie. Sa nature est foncièrement différente. Il ne peut qu'agir pour les autres, mais pas interagir ni communiquer avec eux, ce qui l'amène à se demander s'il est toujours un être humain.

B) Origine de la rupture : mondaine et actorielle (physique)

Explication : Déjà, à son arrivée à Saint-Pétersbourg, Andreï était déphasé: pauvre paysan, il aspirait à l'aristocratie qui lui était hors d'accès. Donc, léger décalage avec le monde social. Mais c'est surtout quand il devient mystérieusement invisible qu'Andreï se trouve involontairement en rupture avec le reste des êtres humains, faute de pouvoir communiquer avec eux. Bref, son nouveau statut est tellement inusité que c'est presque comme s'il faisait partie d'une autre monde. Parallèle possible avec La métamorphose de Kafka ?

C) Manifestations : problèmes de communication et handicap

Explication : L'handicap extrême d'Andreï (son invisibilité) entraîne une rupture à la fois affective (ne peut être aimé), sensorielle (ne peut toucher les autres sans les faire saigner) et langagière (ne peut être entendu), bref, plus largement communicationnelle. Ultimement, cette quasi-absence de communication avec l'autre donne à sa rupture une portée existentielle: « Jamais encore il n’avait ressenti avec autant d’urgence le besoin de l’autre pour confirmer sa propre existence. » (31) et « La véritable nature de son mal n’était pas d’être invisible, mais d’être condamné à n’exister que par lui-même, en lui-même, sans jamais l’aumône d’un regard ou d’un geste. » (49).

D) Objets : ...

Explication :

E) Manifestations spatiales : eau et espaces confinés

Lieux représentés et explications: L'eau : après avoir constaté avec effarement sa disparition, mais refusant de l'accepter, il tombe dans le fleuve où “la conscience exacte de son sort lui [est] révélée” (24) quand des poissons passent à travers son corps comme pour le poignarder. Au dernier chapitre, c'est également dans l'eau que les deux ouvriers jetteront son cadavre pour faire disparaître à nouveau celui qui avait passé la majeure partie de sa vie disparu.

La maison dans les bois: Andreï l'a camouflée jusqu'à la rendre pratiquement invisible aux regards. Ce n'était qu'“une grotte de terre étayée de planches, mais […] il en était venu à la considérer comme un havre” (58). Andreï vit là en ermite. Jusqu'à l'arrivée de la jeune femme, il a donc renoncé à être vu: il sait n'exister que pour lui-même.

Citations pertinentes

p. 38: « Les mots ne lui en apprenaient pas plus. Les mots ne lui disaient pas pourquoi. Les mots ne lui disaient pas comment défaire ce qui avait été fait. »

p. 51: « À quoi bon [tuer le tsar] ? Andreï ne cherchait plus à se faire un nom. Il voulait simplement exister.

p. 59: « Il avait fallu à Andreï des années pour comprendre que l’univers conspirait pour le tenir à l’écart. […] Il était confiné à un rôle de spectateur, que le spectacle lui plaise ou non. »

p. 125: « Il veillait sur elle comme un ange gardien dénué de pouvoir et sans ailes, incapable de voler. Il se demandait : faut-il avoir conscience de la présence de l’autre pour ne pas être seul ? […] Il avançait dans un monde qui n’était pas pour lui, un monde qui ne le reconnaissait pas. Mais Andreï ne se reconnaissait pas lui-même. »

Lien

J'insère également un lien vers le compte rendu de Christian Monnin pour Contre-Jour. Il ne fait pas dans la dentelle et suggère même que l'auteur du Travail de l'huître n'est pas un écrivain… http://www.erudit.org/culture/cj1001905/cj1004882/2605ac.pdf

ranx/le_travail_de_l_huitre_-_ancienne_fiche.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

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