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I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE

Auteur : Patrice Lessard

Titre : Le sermon aux poissons

Éditeur : Héliotrope

Collection :

Année : 2011

Éditions ultérieures :

Désignation générique : Roman

Cote : 1

Quatrième de couverture :

“Les vacances se terminent et Antoine a décidé de ne pas rentrer dans son pays. Il aimerait que Clara, sa femme, reste avec lui. Il souhaite recommencer sa vie avec elle ici, dans Lisbonne où tout lui paraît à nouveau possible. Mais Clara préfère rentrer à Montréal. Pour Antoine, Lisbonne prendra alors la forme d’un labyrinthe où les visages des femmes se confondent, se mêlent et le ramènent sans cesse à celui de Clara, dont le souvenir l’obsède. Il lui faut désormais apprendre à vivre sans la femme qu’il aime et trouver du travail dans la ville blanche où il n’y en a pas.Le sermon aux poissons raconte la désorientation d’un homme qui a choisi l’ailleurs. Un premier roman énigmatique où brillent la grandeur et la singularité du Portugal.”

II- CONTENU GÉNÉRAL
Résumé de l’œuvre :

Antoine ne veut plus vivre à Montréal. Pour une raison inconnue, la ville l'étouffe, il ne veut plus y retourner. Il désire refaire sa vie à Lisbonne, avec Clara, mais celle-ci ne comprend pas (et elle n'est pas la seule) d'où lui vient cette idée incongrue; contrairement à Antoine, elle ne souhaite pas quitter sa vie pour habiter un pays qui lui est complètement étranger. Antoine aime Clara plus que toute autre femme, mais son désir d'immigrer est plus fort encore. Sa décision est prise. Resté seul à Lisbonne, Antoine est donc complètement confus. Partout, il imagine Clara. Il n'a aucune idée de ce qu'il devrait faire, pour l'instant, il tente seulement de retrouver son téléphone…

Thèmes :

Désorientation, désir.

III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION
Explication (intuitive mais argumentée) du choix :

Pour le personnage de ce roman, plusieurs issues sont possibles; on ne cesse de se demander s'il sortira finalement de son brouillard et repartira retrouver Clara. Mais jusqu'au bout, Antoine choisit la déconnexion. Considérant le niveau de vie misérable qui l'attend au Portugal ainsi que son grand amour pour Clara, sa volonté d'immigration demeure, tant pour le lecteur que pour les autres personnages, plutôt étonnante et incompréhensible. D'ailleurs, même Antoine ne peut s'expliquer son choix. Mais rien ne le fera changer d'avis.

Appréciation globale :

Il y a certaines longueurs dans le roman parfois. Cependant, le personnage est très intéressant et sa désorientation dans Lisbonne est très bien rendue par une forte impression de labyrinthe et de brouillard qui se dégage du roman.

IV – TYPE DE RUPTURE
Validation du cas au point de vue de la rupture :
a) actionnelle : remise en question de l’intention (et éventuellement de la motivation); logiques cognitives/rationnelles ou sensibles; présence ou absence d’un nœud d’intrigue et d’une résolution; difficulté/incapacité à s’imaginer transformer le monde (à s’imaginer le monde transformable), etc.
b) interprétative : difficulté/incapacité à donner sens au monde (à une partie du monde) de façon cohérente et/ou conforme à certaines normes interprétatives; énigmaticité et/ou illisibilité du monde; caducité ou excentricité interprétative; etc.

a) De façon générale, Antoine agit de façon intuitive. Peu importe que les gens comprennent ou non son action, il agit selon ce qu'il ressent, écoute la moindre de ses impressions. Par exemple, il refuse d'écouter les conseils d'un ami pour se trouver un bon emploi, comme interprète notamment, car il a le sentiment qu'il lui faut travailler dans le bâtiment, même s'il n'y connaît rien. Décrocher un travail de ce genre lui tient beaucoup à coeur. Il souhaiterait « reconstruire Lisbonne » et il a l'Impression que s'il avait un te rôle, Clara pourrait revenir (malgré le salaire de misère qu'il gagnerait).

Aussi, Antoine prend ses décisions dans l'instant présent : soit il n'a aucun projet en tête, soit il a un rendez-vous mais s'en fiche complètement et préfère ne pas s'y rendre. Il agit donc la plupart du temps sans préméditation, pour se rendre compte en cours de route qu'il n'a pas fait le bon choix, qu'il ne fait pas la bonne chose. IL ne tient jamais compte des conséquences que ses actes pourront entraîner. D'ailleurs, son action envers les femmes est particulièrement peu réfléchit. Il est généralement confus et souvent sous l'effet de l'alcool.

En immigrant à Lisbonne, Antoine n'a aucune intention particulière. Il ne s'agit que d'une fuite, d'un exil, qui n'a aucun fondement rationnel. On lui dit qu'il a “de drôles de priorités” (p.219), mais pour Antoine c'est un besoin, c'est une “question de sérénité”.

Clara : “je ne pourrai pas passer ma vie ici, j'aurais toujours l'impression d'être en périphérie de ce qui est important pour moi.”

Antoine : “Ça me rassure d'être en périphérie, d'être loin […].” (p. 121).

Antoine pense qu'il se sentira mieux en vivant à Lisbonne, parce qu'il y était bien avec Clara lors de leurs vacances. Mais sans elle, le lieu n'est plus le même, ne prend plus la même signification. À Montréal avec Clara il n'était pas bien, à Lisbonne sans Clara, il n'est guère mieux. Il ne voit donc aucune solution possible à son mal-être : “Montréal et Lisbonne, c'est pareil, sauf qu'ici ce ne sera jamais chez moi, ce sera toujours le lieu où nous fûmes heureux avec Clara parce que je ne l'était pas chez moi. Un lieu hors du monde.” (p. 244). Le Lisbonne qu'il aime réellement appartient donc à son passé; il essaie d'actualiser sa perception de la ville en tentant d'imaginer qu'il y débarque pour la toute première fois, mais ça ne fonctionne pas. Clara demeure dans ses pensées. “J'ai parfois l'impression que je ne vis plus que pour regarder passer à côté de moi ma vie au cas où Clara y apparaîtrait […]. La sérénité me sera à jamais inaccessible. À la fin, je suis seul.” (p. 268-269).

Dans un autre ordre d'idées, lorsque Clara quitte Lisbonne, Antoine s'aperçoit qu'il a perdu son téléphone. Il en a absolument besoin, notamment pour rejoindre Serena, et fera ce qu'il peut pour le retrouver : il demande à des amis de l'aider et retourne aux endroits visités la veille. On lui dit que ce n'est qu'un téléphone à 30 euros, que ce n'est pas si grave, mais pour Antoine, son téléphone semble d'une importance capitale. La recherche de son téléphone devient sa quête principale. Or, il ne le retrouvera jamais…

Au final, Antoine se conçoit lui-même comme étant déconnecté du monde : “alors qu'avec Clara Lisbonne m'avait toujours semblé une ville de lumière et de liberté, j'ai plutôt l'impression aujourd'hui que la ville se referme sur moi, que Lisbonne est une cage. […] J'ai longtemps cru que mon exil avait commencé le jour où Clara m'a quitté pour rentrer à Montréal. Je sais aujourd'hui que c'est lorsque j'ai cessé de chercher le télémovel que j'ai fait mon premier pas hors du monde.” (p. 251). Par ailleurs, il prétend faire un deuxième pas hors du monde lorsque Serena le quitte également (il a tout fait pour la pousser à le quitter, sans qu'il n'ait besoin lui-même d'engendrer la rupture…)

b) Enfin, côté interprétatif, Antoine à une perception un peu embrouillée de la réalité, ce qui nous permet de remettre son jugement en question. Il a parfois de drôles d'idées. Par exemple, il a l'impression de détenir une part de responsabilité dans la grossesse de Serena, pour la seule raison qu'il a rêvé qu'il lui faisait l'amour.

V – SPÉCIFICITÉS POÉTIQUES
Validation du cas au point de vue narratif/poétique (voix, fiabilité du narrateur, registres fictionnels, temporels, type de configuration narrative, etc.)

Roman faiblement configuré qui contient un certain nombre d'analepses et qui semble parfois vouloir nous perdre dans le temps. En fait, on alterne constamment entre le récit du jour où Clara a quitté Lisbonne et celui du lendemain où Antoine cherche son téléphone perdu la veille (le lecteur peut parfois être un peu confus et se demander quel jour nous est raconté…). De plus, il y a une ellipse entre le dernier chapitre et ceux qui le précèdent; à la fin, nous nous trouvons un peu plus avancé dans le temps, ce qui permet à Antoine et au narrateur d'avoir un peu plus de distance et de faire un retour réflexif sur ce choix d'immigrer à Lisbonne.

ranx/le_sermon_aux_poissons.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

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