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ranx:faire_l_amour

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 III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION
  
-Explication (intuitive mais argumentée) du choix : Je crois que la déconnexion du narrateur n’est pas nécessairement dans sa nature, mais elle est occasionnée par le voyage à Tokyo. Il affirme lui-même qu’il n’a rien à faire là-bas, à part rompre, « mais rompre, je commençais à m’en rendre compte, c’était plutôt un état qu’une action, un deuil qu’une agonie. » (p. 129) Isabelle Bernard-Rabadi* parle de Faire l’amour en ces mots : « Dans la longue description des étapes de sa rupture avec Marie, le narrateur de Faire l’amour observe minutieusement l’action délétère de ses sentiments, de ses élans et de ses envies, en même temps qu’il scrute ceux de sa compagne avec une acuité et une lucidité surprenantes […] Soulignant la solitude inhérente à l’humain, le roman tout entier se fonde sur le délitement d’un couple d’amoureux fragiles et désorientés. » (p. 116-117)+Explication (intuitive mais argumentée) du choix : Je crois que la déconnexion du narrateur n’est pas nécessairement dans sa nature, mais elle est occasionnée par le voyage à Tokyo. Il affirme lui-même qu’il n’a rien à faire là-bas, à part rompre, « mais rompre, je commençais à m’en rendre compte, c’était plutôt un état qu’une action, un deuil qu’une agonie. » (p. 129) Isabelle Bernard-Rabadi* parle de Faire l’amour en ces mots : « Dans la longue description des étapes de sa rupture avec Marie, le narrateur de //Faire l’amour// observe minutieusement l’action délétère de ses sentiments, de ses élans et de ses envies, en même temps qu’il scrute ceux de sa compagne avec une acuité et une lucidité surprenantes […] Soulignant la solitude inhérente à l’humain, le roman tout entier se fonde sur le délitement d’un couple d’amoureux fragiles et désorientés. » (p. 116-117)
  
 * BERNARD-RABADI, Isabelle, « La peinture des relations amoureuses dans quelques romans de Phillipe Claudel, Patrick Delville, Jean Echenoz et Jean-Philippe Toussaint », dans Murielle-Lucie Clément et Sabine Van Wesemael, Le malaise existentiel dans les romans français de l’extrême contemporain, Sarrebruck, Éditions universitaires européennes, 2011, p. 113 à 125. * BERNARD-RABADI, Isabelle, « La peinture des relations amoureuses dans quelques romans de Phillipe Claudel, Patrick Delville, Jean Echenoz et Jean-Philippe Toussaint », dans Murielle-Lucie Clément et Sabine Van Wesemael, Le malaise existentiel dans les romans français de l’extrême contemporain, Sarrebruck, Éditions universitaires européennes, 2011, p. 113 à 125.
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 La rupture du narrateur est plus actionnelle qu’interprétative. Bien qu’il soit capable parfois de s’imaginer un monde changé, cette capacité va et vient. Il n’agit pas concrètement. Il a des idées, mais il ne les fait pas : « J’aurais pu boire cette larme à même sa joue, me laisser tomber sur son visage et ses tempes, arracher ses lunettes de tissu […] Mais je n’ai rien fait, je ne l’ai pas embrassée, je ne l’ai pas embrassée une fois cette nuit-là, je n’ai jamais su exprimer mes sentiments. J’ai regardé la larme se dissiper sur sa joue, et j’ai fermé les yeux – en pensant que peut-être, en effet, je ne l’aimais plus. » (p. 31-32). Il devient parfois perdu entre ce qu’il s’imagine et ce qu’il vit, ne sachant plus trop où il se trouve. Il est aussi confus dans sa réflexion, à la fois atterré par la rupture éminente de son couple et ne posant aucun geste pour l’empêcher. « Marie […) approchait ses lèvres très près de ma bouche et me demandait en tremblant pourquoi je ne voulais pas l’embrasser, et, la gardant dans mes bras, je répondais à voix basse en lui caressant les épaules et les cheveux pour l’apaiser que je n’avais jamais dit que je ne voulais pas l’embrasser, que je n’avais jamais dit ça […] Mais je ne l’embrassais pas, je ne me penchais pas vers elle pour l’embrasser, pour la caresser, la calmer et l’empêcher de pleurer […] Mais pourquoi tu ne m’embrasses pas alors? Et je ne répondis pas, je ne savais que répondre, je me souvenais très bien de la réponse que je lui avais faite alors, mais je ne pouvais pas lui dire maintenant que je ne voulais ni l’embrasser ni ne pas l’embrasser après les instants dramatiques que nous venions de vivre […] Et pourtant Dieu sait combien j’avais envie de l’embrasser maintenant… » (p. 88-89)  La rupture du narrateur est plus actionnelle qu’interprétative. Bien qu’il soit capable parfois de s’imaginer un monde changé, cette capacité va et vient. Il n’agit pas concrètement. Il a des idées, mais il ne les fait pas : « J’aurais pu boire cette larme à même sa joue, me laisser tomber sur son visage et ses tempes, arracher ses lunettes de tissu […] Mais je n’ai rien fait, je ne l’ai pas embrassée, je ne l’ai pas embrassée une fois cette nuit-là, je n’ai jamais su exprimer mes sentiments. J’ai regardé la larme se dissiper sur sa joue, et j’ai fermé les yeux – en pensant que peut-être, en effet, je ne l’aimais plus. » (p. 31-32). Il devient parfois perdu entre ce qu’il s’imagine et ce qu’il vit, ne sachant plus trop où il se trouve. Il est aussi confus dans sa réflexion, à la fois atterré par la rupture éminente de son couple et ne posant aucun geste pour l’empêcher. « Marie […) approchait ses lèvres très près de ma bouche et me demandait en tremblant pourquoi je ne voulais pas l’embrasser, et, la gardant dans mes bras, je répondais à voix basse en lui caressant les épaules et les cheveux pour l’apaiser que je n’avais jamais dit que je ne voulais pas l’embrasser, que je n’avais jamais dit ça […] Mais je ne l’embrassais pas, je ne me penchais pas vers elle pour l’embrasser, pour la caresser, la calmer et l’empêcher de pleurer […] Mais pourquoi tu ne m’embrasses pas alors? Et je ne répondis pas, je ne savais que répondre, je me souvenais très bien de la réponse que je lui avais faite alors, mais je ne pouvais pas lui dire maintenant que je ne voulais ni l’embrasser ni ne pas l’embrasser après les instants dramatiques que nous venions de vivre […] Et pourtant Dieu sait combien j’avais envie de l’embrasser maintenant… » (p. 88-89) 
  
-Il observe énormément, il déambule, il se laisse porter et regarde les évènements arrivés, sans s’opposer. « Le jour se levait, et je songeais que c’en était fini de notre amour, c’était comme si je regardais notre amour se défaire devant moi, se dissiper avec la nuit, au rythme quasiment immobile du temps qui passe quand on en prend la mesure. » (p. 83) Cette attitude semble être liée au voyage à Tokyo. Il soupçonne en effet Marie d’avoir été parfaitement consciente en l’invitant au voyage des statuts respectifs qui serait les leurs : « elle couverte d’honneurs, de rendez-vous et de travail, entourée d’une cour de collaborateurs, d’hôtes et d’assistants, et moi sans statut, dans son ombre, son accompagnateur en somme, son cortège et son escorte. » (p. 25-26) Dans ce pays, sans Marie, il n’a plus de raison d’être. À partir du moment où il quitte l’hôtel où il séjournait avec Marie pour aller chez Bernard, il marque à plusieurs reprises son absence d’intention : « Les heures étaient vides, lentes et lourdes, le temps semblait s’être arrêté, il ne se passait plus rien dans ma vie » (p. 151) « Je marchais au hasard, sans but. » (p. 155) « Je n’allais nulle part précisément. » (p. 156) « Je n’avais rien à faire là. » (p. 159)… +Il observe énormément, il déambule, il se laisse porter et regarde les évènements arrivés, sans s’opposer. « Le jour se levait, et je songeais que c’en était fini de notre amour, c’était comme si je regardais notre amour se défaire devant moi, se dissiper avec la nuit, au rythme quasiment immobile du temps qui passe quand on en prend la mesure. » (p. 83) Cette attitude semble être liée au voyage à Tokyo. Il soupçonne en effet Marie d’avoir été parfaitement conscienteen l’invitant au voyagedes statuts respectifs qui serait les leurs : « elle couverte d’honneurs, de rendez-vous et de travail, entourée d’une cour de collaborateurs, d’hôtes et d’assistants, et moi sans statut, dans son ombre, son accompagnateur en somme, son cortège et son escorte. » (p. 25-26) Dans ce pays, sans Marie, il n’a plus de raison d’être. À partir du moment où il quitte l’hôtel où il séjournait avec Marie pour aller chez Bernard, il marque à plusieurs reprises son absence d’intention : « Les heures étaient vides, lentes et lourdes, le temps semblait s’être arrêté, il ne se passait plus rien dans ma vie » (p. 151) « Je marchais au hasard, sans but. » (p. 155) « Je n’allais nulle part précisément. » (p. 156) « Je n’avais rien à faire là. » (p. 159)… 
  
-Au tout début du roman, le narrateur affirme qu’il se promène avec un flacon d’acide chlorhydrique dans l’intention de le jeter dans le visage de quelqu’un ou de lui-même. Il affirme que c’est une idée qui l’apaise. À la fin du roman, après avoir imaginé à quelques reprises de s’en servir contre Marie et contre lui-même et après avoir menacé le garde de sécurité du musée, il le vide sur une petite fleur sauvage et sa dernière phrase me semble révélatrice par son sarcasme de l’impuissance et de l’inaction du narrateur : « Il ne restait plus rien, qu’un cratère qui fumait dans la faible lumière du clair de lune, et le sentiment d’avoir été à l’origine de ce désastre infinitésimal. » (p. 179)  +Au tout début du roman, le narrateur affirme qu’il se promène avec un flacon d’acide chlorhydrique dans l’intention de le jeter dans le visage de quelqu’un ou de lui-même. Il affirme que c’est une idée qui l’apaise. À la fin du roman, après avoir imaginé à quelques reprises de s’en servir contre Marie et contre lui-même et après avoir menacé le garde de sécurité du musée, il le vide sur une petite fleur sauvage et sa dernière phrase me semble révélatrice de l’impuissance et de l’inaction du narrateur : « Il ne restait plus rien, qu’un cratère qui fumait dans la faible lumière du clair de lune, et le sentiment d’avoir été à l’origine de ce désastre infinitésimal. » (p. 179)  
  
  
ranx/faire_l_amour.1376344415.txt.gz · Dernière modification : 2018/02/15 13:56 (modification externe)

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