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 **Par Daniel Letendre et Jean-François Thériault** (dépôt: novembre 2015) **Par Daniel Letendre et Jean-François Thériault** (dépôt: novembre 2015)
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 ===== Présentation ===== ===== Présentation =====
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 ===== 1994 : Affaire Pelletier / Larose ===== ===== 1994 : Affaire Pelletier / Larose =====
 [[1994]] [[1994]]
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 +*Note : Cette section s’inspire très fortement d’un article de Jonathan Livernois, « L’ironie contre la sagesse de la petite servante thrace : analyse d’un débat entre Jean Larose et Jacques Pelletier » (Mens, vol. 9, n° 1, 2008, p. 7-34.), entièrement consacré à cette polémique. Je ferai toutefois occasionnellement référence à des écrits satellites, qui ne sont pas toujours cités directement chez Livernois, bien que l’article offre un vaste panorama de l’affaire et une analyse très complète des positions respectives. Pour leur part, Garand, Daigneault Desrosiers et Archambault offrent dans leur ouvrage une analyse rhétorique particulièrement élaborée de la polémique (« Jacques Pelletier et Jean Larose : débattre ou combattre ? », dans Un Québec polémique, op.cit., p. 267-313.) qui a grandement servi à l’élaboration du bref panorama ci-dessous. 
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 +==== a. Description ====
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 +En 1994, Jacques Pelletier, professeur de littérature à l’UQAM, fait paraître un essai aux éditions VLB  intitulé Les habits neufs de la droite culturelle, dans lequel il accuse une poignée d’intellectuels québécois, dont font partie entre autres François Ricard, Jacques Godbout, Denise Bombardier et Jean Larose (tous centrés autour de la collection « Papiers collés » des éditions du Boréal et l’ancienne garde de la revue Liberté), d’avoir renié certains idéaux propres à l’esprit de la Révolution tranquille et d’être devenus, trente ans plus tard, les apôtres d’une culture élitiste, empreinte d’un mépris pour la culture populaire. Pire encore : ces intellectuels prôneraient implicitement, pour Pelletier, une sorte de retour à un « ancien régime » (d’où le sous-titre donné à son essai, « les néo-conservateurs et la nostalgie de la culture d’Ancien Régime »). Bref, Pelletier les accuse d’avoir changé leur fusil d’épaule et d’être passés, sans le dire tout haut, de la gauche vers la droite. 
 +Bien peu des accusés de Pelletier tentent de lui répondre. Il faudra Jean Larose, qui n’en est pas à son premier (ni à son dernier) affrontement dans le champ littéraire québécois, pour y aller d’une charge de front contre Pelletier, ce qui déclenchera une fois pour toutes la polémique. La même année donc, Larose répond à Pelletier dans un chapitre de son essai La souveraineté rampante (« Pelletier, Foglia et les pédagogues », Montréal, Boréal, 1994, p. 39-88.), avec la volonté de « remettre [Pelletier] à sa place, au sens civique du terme », en défendant ce qu’il appelle la « souveraineté littéraire ». Il s’interroge d’abord sur la pertinence d’établir une dichotomie entre gauche et droite et, surtout, de considérer ces deux termes comme deux catégories immuables, et de s’en servir comme autant d’étiquettes. François Ricard, également au banc des accusés de Pelletier, même s’il ne prend pas activement part à la polémique, abonde dans le même sens que Larose quant aux catégorisations à la va-vite (« Le grand humour », L’inconvénient, nº 5, 2001, p. 15-27). Puis, Larose accuse Pelletier de ne pas l’avoir bien lu, ou encore de ne pas l’avoir lu du tout lorsqu’il l’accuse de faire la promotion du retour au cours classique, étiquette qui suivra Larose une bonne partie de sa carrière. Larose écrit :
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 +Aussi Pelletier n’a-t-il eu qu’à inventer, puis à répéter que j’étais un nostalgique du cours classique, même si en réalité j’avais écrit le contraire, pour qu’en soient aussitôt persuadés les journalistes et chroniqueurs dont je suis devenu la tête de Turc ! Mon Dieu, m’ont-ils vraiment lu ? N’auraient-ils lu que Pelletier, sans aller vérifier au texte ? Et lui, il s’est peut-être contenté de lire les journalistes avant d’écrire que je suis pour le cours classique ? Mais où donc a-t-elle commencé, cette erreur de lecture ? Nulle part… Il faut croire qu’elle arrangeait tout le monde. 
 +Livernois confirme dans son article (2008) la présence de ce qu’il qualifie de « sophismes d'inférence » dans le texte de Pelletier. « L'argumentation, qui se voulait objective, est viciée », écrit-il. 
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 +On aperçoit poindre, derrière les différentes salves que les belligérants s’envoient par la tête, les traits d’une vague guerre de clochers qui oppose les deux universités francophones de Montréal, l’UQAM (pour laquelle enseigne Pelletier) et l’Université de Montréal (pour laquelle enseigne Larose), et plus spécifiquement leurs départements de littérature respectifs. « À l’Université de Montréal, en tout cas, sur cette ''montagne'' dont le relief affole tellement la jalousie, nous enseignons à nos étudiants qu’il est essentiel, pour bien lire un texte, de relever avec précaution les nombreuses voix qui s’y font entendre. », écrit Larose. C’est donc deux visions de la littérature qui s’affrontent ici, comme le remarque Jonathan Livernois dans son article, évoquant au passage un retour au débat entre régionalistes et exotiques.  « La littérature souveraine contre l'objectivité des faits, du concret, renforcée par la sagesse populaire de la petite servante thrace : autrement dit, une opposition entre un monde romanesque et un monde scientifique, entre le non-sérieux et le sérieux. Plus qu'une simple dichotomie gauche/droite, ce que révèle l'analyse des procédés rhétoriques de Pelletier et de Larose, c'est une coupure profonde qui condamne à un dialogue de sourds, chacun des protagonistes vivant sur sa planète culturelle », résume Livernois. 
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 +Les propos de Larose resteront sans réponse de la part du principal intéressé jusqu’à ce que, trois ans plus tard, Pelletier publie un nouvel essai, intitulé Situation de l’intellectuel critique. La leçon de Broch, à l’intérieur duquel il consacre un chapitre à cette polémique qui, selon lui, n’a pas eu lieu (« Le débat impossible ? », Montréal, XYZ, coll. « Documents », 1997). Larose a usé, selon Pelletier, d’une « rhétorique de la diffamation, à la limite du libelle et de la littérature haineuse » (p. 70), et ce dernier ne savait tout simplement pas quoi répondre à « un discours constitué pour l’essentiel d’insultes, d’injures et dépourvu, pour reprendre une expression de Pierre Milot, de toute rationalité argumentative. » (p. 72). 
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 +Si les livres de Pelletier et de Larose ont connu une réception critique enviable (spécialement en raison des réactions de leurs auteurs), personne n’osa, dans la presse écrite, sauter directement dans l’arène, laissant les deux adversaires débattre entre eux à ciel ouvert. 
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 +===== 1996-1997 : Affaire LaRue =====
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 +[[1996]]-[[1997]]
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 +==== a) Description : ====
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 +En mars 1996, Monique LaRue a été invitée à donner une conférence au Cétuq de l’Université de Montréal. Intitulée L’arpenteur et le navigateur (titre sous lequel cette conférence a été publiée chez Fides la même année), sa conférence avait pour objet la remise en question de la définition de la « littérature québécoise » devant l’importance grandissante prise par les écrivains migrants, écrivains qui, pour certains commentateurs, ne peuvent être considérés comme « québécois » parce qu’ils dérogent à tout ce qui caractérise cette appellation (une certaine utilisation du langage, l’inscription dans l’histoire et le développement poétique et esthétique de la littérature québécoise, un cadre de références communes, une recherche d’identité, etc.). LaRue, s’inscrivant en faux contre cette conception homogénéisante de la littérature québécoise, propose deux types de personnages, l’arpenteur et le navigateur, dont le dialogue est essentiel à la constitution d’une littérature « nationale ». Proposant une réflexion sur l’héritage, la mémoire et ses traces, sur l’identité nationale, LaRue a évidemment créé une forte polémique autour de ces questions ravivées par le référendum de 1995 et la déclaration de Parizeau lors de son discours de défaite, polémique qui repose pour l’essentiel sur la lecture de l’essai faite par Ghila Sroka dans Tribune juive (mars 1997), qui accuse LaRue de propager « la haine, la jalousie et le ressentiment » alors que l’argumentaire de LaRue se dirige efficacement vers la position inverse. 
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 +Comme le remarque Dominique Garand_ dans Spirale (n° 228, septembre-octobre 2009), alors que LaRue désirait faire réagir les écrivains québécois « de souche » dont elle démolissait l’argumentaire dans sa conférence, ce sont plutôt les écrivains migrants qui ont pris LaRue en grippe en considérant « l’ami-écrivain », personnage qui tient des propos discutables sur les écrivains migrants, comme le porte-parole de la romancière. Garand décrit cette polémique comme « un désastre intellectuel à cause d[’une] polarisation nocive et abêtissante » (p. 33). Cette affaire révèle une « crise de la représentation au sein du monde littéraire », du « rapport de la littérature à la collectivité » (p. 34). 
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 +Garand note que « l’affaire LaRue » est composée de 38 textes (parus dans des revues, journaux, etc.)
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 +La polémique a véritablement été créée lorsque Ghila Sroka, écrivaine juive, a publié un éditorial dans le magazine Tribune juive de mars 1997 où elle accuse LaRue de xénophobie voire de fasciste (voir plus bas). Tribune juive a ensuite consacré son numéro suivant (mai 1997) exclusivement à « l’affaire LaRue », en intitulant cette édition de la revue « Non au Québec xénophobe ». Différents intervenants, détracteurs de LaRue, y vont de leur interprétation de la plaquette et de la vision du Québec qui, selon eux, y apparaît. Sroka a cru bon d’insérer dans ce numéro une lettre adressée à Tribune juive par Pierre Nepveu qui fait, selon elle, « comme d’habitude dans la déraison ». De même, elle attaque Jeanne Demers, alors présidente du P.E.N Club, en disant qu’elle « fait dans le délire » dans une lettre qu’elle lui a envoyée, lettre que Sorka a décidé de ne pas reproduire pour « ne pas entacher la présente livraison de Tribune juive ». Je note que quelques paragraphes plus haut, la même Sroka militait pour le « droit à la parole, la liberté de presse, la liberté de penser ». 
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 +Sroka se place d’emblée dans ce numéro comme la victime d’une « cabale orchestrée par la petite corporation littéraire québécoise pure laine » qu’elle oppose aux « vrais intellectuels de la belle province », et son magazine comme « l’unique média indépendant et libre. » Il n’est jamais question de littérature dans ses textes, ni de ce qui pourrait définir la littérature québécoise. Dans le numéro précédent de Tribune juive, elle a d’ailleurs affirmé qu’une « littérature nationale » était impossible ici puisqu’il n’y a pas de nation à proprement parler qui pourrait justifier une telle expression.
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 +Selon elle, tous les défenseurs de LaRue sont des disciples du chanoine Groulx et lui font un procès stalinien, l’accusant sans preuve de tous les torts. Son article intitulé « La seule grossièreté que je connaisse est la lâcheté » (mai 1997) fait la chronologie, de son point de vue, de l’affaire LaRue, chronologie où elle brise les uns après les autres les liens amicaux qui la liaient à ceux qui défendent LaRue. Elle dit avoir « démasqué » Claude Lévesque, qu’elle considérait pourtant comme un « intellectuel honnête » ; la lettre envoyée par Nepveu est, selon elle, « merdique » ; Monique LaRue est, dans la sphère littéraire québécoise et aux yeux du public, une inconnue, etc. 
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 +Ce numéro de mai 1997 est important puisqu’on y trouve à la fois l’histoire de « l’affaire », des textes contre LaRue et sa « réponse » par les tribunaux (Andrée Yanacopoulo), des apologies de Sroka comme « pionnière » (texte de Yves Alavo) et des textes « pro-LaRue ». Toutes les positions sont représentées dans ce numéro, ce qui en fait un condensé de la polémique en entier. 
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 +Le numéro 5 de Tribune juive (juin-juillet 1997) comporte également des textes en lien avec l’affaire LaRue (en fait toute une section du numéro porte ce titre). Marc Angenot réfléchit au lien littérature et nationalisme, trois lettres ouvertes (adressées à Nepveu, Demers et Émile Olliver) reprennent l’argumentation sur le texte de LaRue et son « racisme », et un texte de Yvonne-América Truque relate l’expérience de l’écrivaine « ethnique » face à l’institution littéraire québécoise et canadienne.
 +Point de vue intéressant d’Angenot qui montre que tout lien entre idéologie nationaliste et littérature empêche à la fois cette littérature et la société qu’elle dépeint d’être modernes. Il profite de cette lettre pour pourfendre la littérature québécoise, qu’il dit médiocre, sauf en de rares exceptions (Ducharme). Le seul fait que la question se pose au Québec, qu’il y ait un « Nous autres » et un « Eux autres » est scandaleux selon lui, une aberration. Il montre le sentiment d’infériorité des Québécois, leur peur de l’autre qui dénote une incapacité à s’affirmer.  
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 +Monique LaRue a elle-même fait paraître des textes dans les journaux où elle défend sa position, explique son argumentaire, s’excuse des ambiguïtés que L’arpenteur et le navigateur a pu créer. (Voir Le Devoir, 15 juillet 1997)
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 +En août 1997, LaRue, ayant laissé retomber la poussière, écrit un nouveau texte paru dans Le Devoir (13 août 1997, section « Idées ») pour, écrit-elle, « [s]'exprimer librement quant aux véritables enjeux, […] de la controverse créée autour de [s]on texte ». LaRue établit les faits de « l’affaire » portant son nom, puis se dit déçue que des universitaires aient appuyé la lecture de Sroka, une lecture où on lui impute des paroles et des idées qui ne sont pourtant pas de son fait. Elle compare cette imputation à un « rapt ». Ce texte est une réflexion générale sur la littérature, son fonctionnement, les idées qu’elle brasse et qui ne peuvent être liées directement à l’auteur sans leur faire subir une torsion qui les dénature.  
 +Des extraits de ce texte ont été reproduits dans Tribune juive, vol. 14, n° 6, octobre-novembre 1997, p. 35.
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 +==== b) Défendeurs de LaRue : ====
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 +Réginald Martel, La Presse, 15 avril 1997 : fait état de la polémique installée entre Sroka et LaRue et se rapporte à l’argument principal de cette dernière : Sroka a mal lu.
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 +Robert Saletti, Le Devoir, 19 avril 1997 : En faisant le compte rendu de la plaquette de LaRue, Saletti mentionne au passage l’attaque dont l’auteure est victime et écrit la comprendre comme une mauvaise lecture faite avec ou sans mauvaise foi.
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 +Pierre Nepveu, Le Devoir, 26 avril 1997, section « Idées » : Nepveu se présente dans cette lettre comme le directeur du CETUQ (où LaRue a donné sa conférence en mars 1996) et porte-parole de son comité de direction. Encore une fois, c’est la « lecture à l’envers » de Sroka qui est dénoncée comme une « injure à la personne même de Monique LaRue ». 
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 +9-10 juin 1997, « Idées », deux textes : On sort ici tranquillement du débat portant spécifiquement sur le texte de LaRue. Si la polémique qui a suivi la publication est bien à l’origine de la réflexion proposée par Nepveu, c’est davantage à une analyse du « pluriel » et de la difficulté toute québécoise de la conjuguer que s’adonne l’intellectuel. 
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 +François Hébert, Le Devoir, 21 mai 1997, section « Idées » : réaction à la lettre de De Sève. Cette lettre est selon lui la preuve d’une dispersion de la censure dans l’ensemble de la société, où tout le monde est taxé d’emblée de mauvaises intentions. Or Hébert montre que l’entreprise de LaRue est précisément de comprendre la censure plutôt que de la réactiver.
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 +Claude Lévesque, Le Devoir, 3 juillet 1997, « Idées » : Lévesque corrige certaines affirmations faites par Sroka au sujet d’une conversation qu’ils ont eu avant la publication du numéro de mars où elle s’attaque à LaRue. Lévesque aurait tenté de persuader Sorka de ne pas publier l’éditorial où elle pourfend l’écrivaine. Il admet du même geste la parenté idéologique qu’il partage avec LaRue. 
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 +Claude Jasmin, Le Devoir, 15 juillet 1997, « Idées » : Jasmin revient sur la critique de Nepveu faite par Gary Klang (voir plus bas son argumentaire). Il est intéressant de lire que Jasmin, dès le deuxième paragraphe de son texte, s’inclut comme sujet d’une critique pourtant adressée par Klang à Nepveu. Jasmin écrit : « D’abord, il reproche à Nepveu de ne pas donner le nom de ceux qui nous accusent de “nazisme”. » Ce « nous » fait évidemment référence aux écrivains québécois « de souche » attaqués par les détracteurs de LaRue. En somme, Jasmin retourne les arguments de Klang en montrant qu’il a une vision du Québec qui n’est pas si différente de celle défendue par le personnage d’ami-écrivain mis en scène pas La Rue.
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 +Sur la même page, on trouve un texte de LaRue, qui désire faire le point sur la controverse causée par la publication de sa plaquette. Elle affirme avoir voulu interroger le malaise ressenti après le référendum de 1995 et la déclaration de Parizeau, certains commentaires entendus, une xénophobie larvée et souvent inconsciente d’elle-même. Loin de vouloir imposer à ce personnage écrivain ses propres vues, elle a plutôt tenté de monter un argumentaire visant à le convaincre de sa faute, dans une sorte de dialogue socratique où le point de vue de l’opposant est adopté pour en montrer la fausseté.  
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 +Voir aussi : 
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 +Demers et le Pen Club
 +Bulletin de l’UNEQ où LaRue s’exprime. 
 +Texte de Lison Macklovitc dans la Voix Sépharade
 +Lise Bissonnette, Le Devoir, 26 avril 1997, cahier « Les Arts ».
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 +==== c) Attaquants de LaRue : ====
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 +Ghila Sroka, « De LaRue à la poubelle », Tribune juive, vol. 14, n° 3, mars 1997 : Dans cet éditorial, Mme Sroka réagit à la parution de L’arpenteur et le navigateur, conférence qu’elle juge d’entrée de jeu comme «  estampillée par la haine, la jalousie et le ressentiment », représentative de la « verve haineuse de l’intelligentsia scribouillarde » québécoise, et que les 30 pages qui forment cette conférence « dans leur totalité sont à vomir ». On comprend rapidement que Mme Sroka en a contre tout discours anti-pluraliste, tout discours qui fait la promotion d’une essentialité québécoise (blanc-catholique-descendant de Canadiens français). Elle accuse LaRue de vouloir effectuer un « nettoyage ethnique », de faire la promotion « d’une idéologie du rejet de l’autre » et d’avoir Céline pour maître à penser. Les extraits du texte de LaRue repris par Sroka sont tous issus des pages 7 à 11, soit du tout début de l’argumentation où l’écrivaine expose le point de vue de l’ami-écrivain, opinion qu’elle démontera ensuite.  
 +Cet éditorial a mis le feu aux poudres des intellectuels, écrivains et universitaires nommés plus haut qui se sont immédiatement rangés du côté de LaRue. 
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 +Micheline De Sève, Le Devoir, 5 mai 1997, cahier « Idées » : Mme De Sève prend ici la défense de « [s]on amie Ghila », qui ne faisait, selon elle, que contester un texte rempli d’ambiguïtés. L’auteure en profite pour faire une rapide analyse de ce qu’elle considère comme des fautes argumentatives dans le texte de LaRue, notamment l’utilisation des pronoms « ils » et « nous », qui expose l’exclusion des immigrants qu’elle affirme pourtant défendre.    
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 +Gary Klang, Le Devoir, 3 juillet 1997, « Idées » : Klang réagit aux deux textes de Nepveu en critiquant leur argumentaire. Plus loin, il revient sur l’absence de justification de LaRue lorsqu’elle affirme à la page 10, après avoir rapporté les paroles de son ami-écrivain, « Si cette conversation a continué à me hanter, c'est cependant parce que j'étais incapable de nier que ce que cet écrivain disait restait, en un certain sens, exact. » Klang reproche à LaRue de ne pas s’expliquer et de laisse planer le doute sur sa réelle affiliation. 
 +Il défend ensuite le ton adopté par Mme Sroka en rappelant celui utilisé dans par Sartre, Camus, Revel et d’autres dans des écrits participant également d’une polémique.
 +Je note que M. Klang est un collaborateur régulier de Tribune juive.
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 +===== 1998 : Affaire Turgeon/Michaud =====
 +[[1998]]
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 +*Note : l’ensemble de la polémique est résumé dans un texte de Louise Loiselle, éditrice de Flammarion-Québec, disponible sur le site web de l’auteur Pierre Turgeon, à l’adresse http://pierreturgeon.net/laffaire-turgeon/ (page consultée le 6 novembre 2015). 
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 +Conflit opposant l’auteur Pierre Turgeon et Pierre Michaud, représentant de Réno-Dépôt, qui avait commandé à l’auteur une biographie du fondateur de l’entreprise Paul-Hervé Desrosiers. La biographie a déplu à M. Michaud. M. Turgeon l’a alors proposée à Jacques Lanctôt pour publication. Or M. Michaud prétend que les droits de cette biographie lui appartiennent puisqu’il a commandé l’œuvre et payé des avances à l’auteur. 
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 +Le juge Georges Audet de la Cour supérieure du Québec a débouté M. Turgeon, tout comme la Cour d’appel du Québec. Dans La Presse du vendredi 27 mars 1998,  A4 : Affaire Réno-Dépôt: « Turgeon condamné au bâillon : La Cour supérieure estime que l’écrivain a cédé ses droits à la famille Michaud » (http://pierreturgeon.net/affaire-reno-depot-turgeon-condamne-au-baillon/ )
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 +L’auteur a déclaré au moment du jugement de la Cour d’appel (en mai 2003) qu’il porterait la cause devant la Cour suprême. Rien n’a été trouvé dans les journaux en référence à cette nouvelle tentative de Turgeon de faire invalider la décision. 
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 +Pendant toute cette saga, Turgeon a bien sûr eu l’appui de l’ensemble du milieu de l’édition, mais également de la Ligue des droits et libertés, de la Fédération des journalistes du Québec, de l’Union des artistes, du PEN club, de la Société historique de Montréal et de la Société St-Jean-Baptiste. 
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 +Cette polémique pose la question du mécénat à l’époque contemporaine et de ses conséquences sur le droit de propriété intellectuelle. 
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 +Voir :
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 +BOIVERT, Yves, «Le PDG de Réno-Dépôt veut un procès secret», La Presse, 17 décembre 1996, p. A9.

 +_____________, «Le secret de Réno-Dépôt: le juge tranche ce matin», La Presse, 18 décembre 1996, p. A14.
 +_____________, «Réno-Dépôt fait maintenir le bâillon pour un an», La Presse, 19 décembre 1996,
p. A12.
 +_____________, «L’affaire Réno-Dépôt: réactions d’amère indignation», La Presse, 20 décembre 1996, p. A12.
 +CARDWELL, Mark, «The biography blues», Maclean’s, 5 mai 1997, p. 63-64.
 +CHARTIER, Jean, «Biographier d’un des bailleurs de fonds de Duplessis: injonction contre P.-H. le Magnifique», Le Devoir, 7 septembre 1996, p. A3.
 +MONTPETIT, Caroline, «Une biographie litigieuse», Le Devoir, 13 décembre 1996, p. A2.
[S.A.], «L’UNEQ: gain de cause», La Presse, 29 mai 1997, p. A3.
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 +===== 2004 : L’Affaire VLB =====
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 +[[2004]]
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 +==== A) Description ====
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 +Dans un article proposé à La Presse (« Nos jeunes sont si seuls au monde », 29 février 2004), Victor Lévy-Beaulieu réfléchit à la vigueur de la littérature québécoise en adoptant pour objet la « relève », les jeunes romanciers contemporains. Il met la production de ces jeunes auteurs en perspective avec celle des écrivains des années 1970, qui parcouraient non seulement le territoire québécois, mais également celui de la langue et de la forme romanesque. Le constat de VLB est univoque : la nouvelle génération d’écrivains (l’écrivain cite Myriam Beaudoin, Katerine Caron, Stéphane Dompierre, Anick Fortin, Hélène Guy, Julie Hivon, Alexandre Laferrière, Jean-François Lanseigne, Geneviêve Lauzon, Grégory Lemay, Marie-Hélène Poitras et Anne-Marie Savoie), au milieu des années 2000, n’est pas à la hauteur de ce que l’on a jadis connu. 
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 +VLB constate qu’au personnage du grand-père, figure de « la pérennité de la société québécoise et sa sagesse » dans les romans des années 1970, s’est substituée la figure de la grand-mère, qui entretient un rapport plus trivial, quotidien avec les jeunes, veillant à la sustentation des petits-enfants, tant en nourriture qu’en argent. La grande différence entre ces deux « types » est qu’alors que le grand-père garantissait la transmission d’un héritage symbolique, culturel, « la grand-mère n’est qu’une passeuse de biens matériels ».
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 +Autre transformation « parentale » : le père. Les romans contemporains en font un personnage sinon absent, du moins haï, mauvais, égoïste, un père qui ne remplit jamais son rôle à la fois autoritaire et aimant. L’absence du père laisse une place démesurée à la mère. Il ne faut pas croire, selon lui, que la relation à la mère est plus pure ; la mère est étouffante, mais tout de même aimante. « [O]n s’arrange donc pour [la] cannibaliser le plus longtemps possible avant de penser au meurtre propitiatoire. » La présence au monde des adultes issus de ces relations parentales blessantes est empreinte d’incertitude et d’ambivalence, autant dans la sphère intime que publique et sociale. Plus de verticalité (de regard vers l’ascendance) mais plutôt une horizontalité (regard vers les frères et sœurs) où le Même (la blessure reconnue chez l’autre) est célébré. 
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 +Associant cette « affectivité atrophiée » au lieu, au territoire, les personnages représentant les jeunes refusent de connaître le Québec en voyageant énormément le plus loin possible de la Belle province. Les lieux d’ici sont indéfinis, restent innomés au point où les villes décrites pourraient être ici et nulle part. Le pays, son peuple, sa société sont absents de ces romans de la relève.
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 +VLB remarque que cet aveuglement sur tout ce qui touche le pays se manifeste également dans les références intertextuelles que mettent de l’avant ces jeunes personnages. Et il termine sur cette question : « Un tel enfermement, dans pareille réduction de l'espace-temps québécois, n'est-il qu'un épiphénomène de notre béance collective, grossi par la lunette de l'imaginaire, ou représente-t-il la nouvelle vérité d'une société en train de s'effondrer ? ». Dernier constat : les jeunes écrivains sont incapables d’expérimenter avec la langue, ils ont, en ce sens, un manque cruel d’inventivité. « Ne cherchez donc pas de véritables expérimentations langagières dans les premiers romans de la jeune littérature. Vous aurez plutôt l’impression d’un retour aux années 50 quand le romancier d’ici rêvait d’écrire un jour convenablement en français. », écrit Beaulieu.
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 +Le 25 avril de la même année, VLB répond, toujours dans les pages de La Presse (« Quand souffle le Mistral ») à ceux qui ont réagi à sa lettre, la plupart du temps de jeunes romanciers ou de jeunes éditeurs, tout en martelant les arguments de son brûlot de départ. Le ton y est, difficile d’éviter de le mentionner, fortement paternaliste. Mistral est « trop vieux, mais trop jeune », la « naïveté » des jeunes éditeurs « l’a charmé et amusé », lui qui n’hésite pas à leur conseiller la lecture des quelques ouvrages sur l’édition québécoise. Les jeunes écrivains « apprendront entre autres que les problèmes dont ils parlent ont été vécus avant eux par les Édouard Garaud, les Albert Léversque, les Albert Pelletier et les Bernard Valiquette », écrit-il.
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 +==== B) Contre VLB ====
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 +Le texte de VLB a suscité de nombreuses réactions chez les jeunes écrivains dont il parle, la plupart étant recueillies dans un article publié la semaine suivante intitulé « Monsieur Beaulieu, dans quel monde vivez-vous ? » (La Presse, 7 mars 2004) ». Certains, à l’orgueil blessé, attaquent la personne de VLB plutôt que ses idées, tandis que d’autres proposent une réelle réflexion sur les transformations de la littérature et de la société québécoise. Anne-Marie Savoie oppose la bataille pour l’indépendance à celle, contemporaine, contre la mondialisation, en affirmant que le monde a bien changé depuis que M. Beaulieu a commencé son projet littéraire. 
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 +La réponse la plus souvent citée à VLB est probablement celle que lui a faite Marie-Hélène Poitras (ciblée dans l’article de VLB) dans les pages du Voir, intitulée « Nous ne sommes pas si seuls ». Poitras affirme ne pas se reconnaître dans le portrait que dresse l’auteur de Race de monde, en mettant l’accent sur le fait que la production contemporaine est trop bigarrée pour permettre à quiconque de tirer des conclusions si générales sur son état. « Les auteurs que vous avez lus ont tous en commun au moins une chose que vous n’avez pas relevée : leur lucidité corrosive, plus ardue à repérer qu’un archétype récurrent, mais bien présente et précieuse, car elle nous fait et nous défait. Pour paraphraser Saint-Denys Garneau, je dirais que c’est là sans repos que nous prenons appui. », écrit Poitras. 
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 +Nelly Arcan, dans sa chronique mensuelle (La Presse, 18 mars 2004), revient sur la lettre de VLB en répondant à la question qu’il pose en clausule de sa lettre : l’imaginaire des jeunes écrivains est-il « la nouvelle vérité d’une société en train de s’effondrer ? » Arcan répond par l’affirmative : « Laissez-nous, de grâce, nous effondrer, sans contribuer de vos poings à cet effondrement. » Ce faisant, elle accuse VLB de considérer sa génération comme la génération indépassable, où la littérature était à son sommet et que tout ce qui vient après ou qui en refuse l’héritage serait de facto « moins bon ».
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 +Catherine Paradis (« Si on écoutait les jeunes auteurs ? » Québec français, nº 136, 2005, p. 86-91) propose une lecture de la jeunesse littéraire contraire à celle de VLB, à partir des textes de Mathieu Arsenault (Album de finissant), Grégory Lemay (Le sourire des animaux) et Karoline Georges (Ataraxie). Elle écrit, à propos des jeunes auteurs : « Il faudrait d’abord éviter de les considérer comme un ensemble homogène, puisqu’ils offrent des textes extrêmement diversifiés, à l’image de la production littéraire québécoise contemporaine qui ne se laisse pas ranger sous l’étiquette d’un seul mouvement ». Paradis prétend que d’imposer une grille de lecture des années ’60-70 à la littérature d’aujourd’hui amène nécessairement à un non-lieu intellectuel.
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 +==== C) À la défense de VLB ====
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 +Toujours dans l’article « Monsieur Beaulieu, dans quel monde vivez-vous », Stéphane Dompierre, identifié par VLB comme un de ces auteurs de la relève, s’interroge sur la voix que portent les écrivains. Il soumet l’hypothèse que cette voix était auparavant collective alors qu’aujourd’hui elle est individuelle (ce qui, il faut l’admettre, ne fait que corroborer les dires de VLB).
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 +Philippe-Jean Poirier, écrivain également, ne donne ni tort ni raison à VLB, mais montre comment le premier roman de celui-ci, Race de monde, comprend de nombreuses caractéristiques du premier roman que dénonce l’écrivain de Trois-Pistoles dans son brûlot. 
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 +Christian Mistral explique, sur son blogue personnel (http://christianmistral.blogspot.ca/2004/03/dbat-dides.html, page consultée le 31 août 2015), qu’il a d’abord fait parvenir une réponse à VLB sous forme de courriel à quelques connaissances, en plus de l’adresser à l’auteur lui-même, qui l’a lui-même relayée à la journaliste Jocelyne Lepage, auteure de l’article « Monsieur Beaulieu, dans quel monde vivez-vous ? », qui en a dès lors publié quelques extraits et annoncé que Mistral était le grand gagnant du certificat cadeau de 200$ chez Renaud-Bray. Suite à cela, Mistral a rendu publique la totalité de sa réponse sur son site web. 
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 +Mistral reproche d’abord à l’équipe de La Presse d’avoir incité VLB à publier son pamphlet et d’avoir, en somme, cherché le conflit. L’auteur de Vamp place Beaulieu en position de victime. Il écrit : « Tout ça pour quoi ? Tout ça pour ce texte de VLB qui une fois de plus s’est pensé plus fin que la presse. Ce génie tout en finesse, d’esprit et de cœur, est toujours aussi démuni devant les manœuvres des gazettes que le jour maudit où il accorda la fameuse entrevue à Nathalie Pétrowski [sic]. » Jocelyne Lepage démentira cette affirmation en disant que « ce n’est pas La Presse qui manipule Victor-Levy Beaulieu ; plutôt le contraire… ». Sur le fond des choses, Mistral répond non pas pour réfuter les dires de Beaulieu, mais pour faire l’hommage de l’écrivain et confirmer la solitude filiale des jeunes d’aujourd’hui pressentie par VLB. Tout en concédant que celui-ci « trempe […] dans un bain de nostalgie » (« Quel écrivain majeur ne macère pas dans ce jus-là ? », précise-t-il), le trentenaire refuse le qualificatif de « vieux schnock » qui a été accolé à l’auteur de Bouscotte. Le plus grand reproche que fera Mistral à VLB, c’est celui d’être trop modeste en ne s’incluant pas lui-même dans le panorama qu’il dresse de la littérature des années ’60-70. Or Mistral salue du même coup l’intense vie relationnelle que ces mêmes jeunes entretiennent entre eux par l’entremise d’Internet, ou encore lorsqu’ils s’assemblent pour défendre une cause qui leur tient à cœur (Mistral donne en exemples le Sommet des Amériques et le squat du centre Préfontaine), tout en reprochant à VLB d’avoir gommé de grands pans de l’histoire de la littérature québécoise à des fins rhétoriques. 
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 +Le 4 avril 2004, Francine Allard écrit un texte (uniquement disponible en version électronique, sur le site www.cyberpresse.ca) dans lequel elle donne parfaitement raison à Victor-Levy Beaulieu. S’appuyant sur son expérience de jury pour divers prix littéraires, elle dit : « le Québec, pour qui je me suis battue griffes et ongles, est remplacé [dans les premiers romans des jeunes auteurs] par le Maroc ou le Vietnam. » Elle termine en disant qu’« il n’est pas normal qu’un écrivain chevronné soit mis de côté par un éditeur pour en lieu et place publier un jeune auteur dont il faut réécrire le roman… »
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 +En 2009, dans les pages d’Études françaises, Michel Biron revient sur la polémique dans un article qui brosse un tableau général de l’œuvre de Beaulieu (« VLB au pays des géants », Études françaises, vol. 45, nº 3, 2009, p. 25-40). Biron reproche aux jeunes écrivains qui ont répondu à Beaulieu de ne pas avoir lu l’œuvre de celui-ci, de ne pas s’être rendu compte que la « déstructuration du tissu familial, social, culturel et politique que dénonce VLB dans ces romans est au cœur de ses propres livres. »
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 +Dans le numéro d’avril 2013 de la revue en ligne Temps zéro, Francis Langevin analyse la production récente des jeunes romanciers et remarque que « Victor-Lévy Beaulieu semble malgré tout avoir été entendu, ne serait-ce qu’en écho, car on ne compte plus les romans dont l’action se déroule en particulier dans des « parties » de territoire qu’on pourrait toutes appeler « régions » : Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, Saguenay, quartiers de Montréal tels Saint-Henri, Griffintown ou HoMa, Abitibi ou Nord d’Ontario, quartiers de Québec ou de Shawinigan, Cantons-de-l’Est, etc. » (http://tempszero.contemporain.info/document936) 
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 +===== 2006 : L’Affaire Homel =====
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 +[[2006]]
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 +==== A) Description ====
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 +Le 16 mars 2006, à l’occasion du Salon du livre de Paris qui se tenait, cette année-là, sous le thème de la francophonie, le journal Le Monde publia un texte, signé David Homel, écrivain et traducteur anglo-québécois d’origine américaine, intitulé « La littérature québécoise n’est pas un produit d’exportation ». Au centre de la réflexion d’Homel se trouve la quasi-absence de la littérature québécoise des rayons des librairies françaises. À partir de ce constat, l’écrivain proposera quelques pistes de réponses qui n’ont pas tardé à embraser le milieu littéraire québécois. Gillian Lane-Mercier a écrit un article sur l’affaire Homel dans un dossier spécial de la revue Spirale consacré aux écrivains anglo-québécois. Elle a résumé en cinq points succincts les propos et constats d’Homel. Je me permets ici de la citer : 
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 +[L]'article se construit autour d'un constat de départ, soit « les auteurs québécois sont quasiment absents des librairies françaises », suivi de cinq propositions explicatives qui s'enchaînent comme suit: 
 +1- « le Canada [étant] un pays très tranquille », sa littérature l'est aussi ; « Les écrivains québécois ne bénéficient pas de la vague postcoloniale », si bien que les Français s'intéressent davantage aux auteurs « ressortissants d'un pays difficile » ou en voie de développement ; 
 +2- « les livres québécois arrivent avec un net accent qui serait difficile à assimiler par la machine de l'édition française »; d'où le fait que les écrivains québécois « restent des « provinciaux », des « petits cousins d'Amérique » » ; 
 +3- « les grands thèmes de La littérature du Québec restent intimes : la famille et ses secrets, la quête de soi, l'enfant qui peine à devenir adulte, comme dans les histoires de Réjean Ducharme ou de Marie-Claire Biais »; de plus, « c'est surtout une littérature féminine » en ce sens que « la grande majorité des lecteurs [au Québec] sont des lectrices » ; 
 +4- les écrivains québécois « commencent avec un net désavantage » dans la mesure où 22,3 % de la population âgée de 16 ans et plus « ne sauraient pas lire» ;
 +5- l'émergence récente d'un nouveau genre, le conte, fondé sur la performance et inspiré des traditions orales canadiennes-françaises et autochtones, à la fois met « au défi le monde intime, un peu figé, de la littérature québécoise actuelle » et s'avère plus exportable que le livre. » 
 +(« Au-delà de la controverse : David Homel, écrivain-traducteur anglo-québécois » Spirale, nº 210, 2006, p. 33-36)
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 +==== B) Contre Homel ====
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 +La première salve contre les constats d’Homel (et la plus commentée, d’ailleurs) est venue de la part de Madeleine Gagnon qui, dans les pages du Devoir du 22 mars 2006, y est allée d’une charge à fond de train contre le texte d’Homel (selon elle « minable »), mais aussi sur sa personne et sur son statut, le qualifiant entre autres « d’écrivain mineur » et de « petit polémiste au parcours erratique ». Gagnon ira même jusqu’à fomenter l’idée d’une pétition pour la « défense et illustration de la littérature québécoise », pétition qui devrait rallier l’ensemble du milieu littéraire, professoral et culturel. Dans sa lettre, elle demande au Devoir de faire enquête à Paris, afin d’éclaircir le statut de la littérature québécoise en France, et au Monde d’emboiter le pas, afin que « cette histoire littéraire soit connue en France ». 
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 +Plusieurs autres réactions ont suivi celle de Gagnon, la plupart étant en accord avec la première. Odile Tremblay (Le Devoir, 26 mars), Patrick Bourgeois (La tribune libre de Vigile, 29 mars), Yannick Gasquy-Resh (Le Monde, 31 mars) et Bernard Pozier (L’unique, en juin de la même année) sont du nombre. Je réfèrerai ici à l’article de Gillian Lane-Mercier qui résume de façon admirable les positions respectives de ces intervenants. 
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 +André Vanasse, dans Lettres Québécoises, dira que le contexte de la publication de la lettre d’Homel (celui du Salon du livre de Paris, placé sous le thème de la « francophonie ») a eu une influence certaine sur sa réception. Déjà, plusieurs dénonçaient que ce Salon du livre de Paris se tienne sous l’étiquette « la francophonie », ce qui laissait entendre que Paris serait le centre, et tout le reste, en périphérie. Vanasse revient sur un incident mettant en scène Monique LaRue, qui se serait mise en colère après qu’on lui ait demandé pourquoi elle écrivait en français, alors qu’elle réside sur un continent à majorité anglophone. « C’est malpoli [de poser une telle question]. C'est nul et non avenu. Pour tout dire : terriblement parisianiste. Aussi bien demander à une femme : pourquoi portez-vous des mamelles et depuis quand? », aurait répondu LaRue (Vanasse, Lettres québécoises, nº 123, 2006). Le texte d’Homel aurait donc été « la goutte qui a fait déborder le vase ». Vanasse s’en prend d’abord à la crédibilité d’Homel pour traiter de l’état de la littérature au Québec, puisqu’il le considère d’abord comme un « spécialiste de littérature anglophone », et non de « littérature québécoise ». Vanasse s’insurge contre les constats d’Homel, qu’il démolit tour à tour, principalement celui qui touche la question de la littérature québécoise comme « une affaire de femmes », prenant en exemple les plus récentes publications de la maison XYZ, où il est éditeur. Trois romans écrits par des hommes (Sergios Kokis, Bertrand Gervais et George Szanto), tous trois se déroulant, en majorité, à l’extérieur des frontières québécoises. « Drames intimes, dans un pays sans histoire ? Allons donc ! », écrit Vanasse, qui termine son éditorial en affirmant « comprendre » la réaction de Madeleine Gagnon, qu’il juge justifiée en regard à la gravité de l’article de David Homel, à qui « l’on aurait jamais dû demander de le faire ». 
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 +Aurélien Boivin quant à lui, en ouverture du numéro 142 de Québec Français en 2006, fera sensiblement les mêmes remarques que Vanasse, s’en prenant d’abord au manque de crédibilité d’Homel, le qualifiant de « peu connu » et de « marginal » (Québec Français, nº 142, 2006). Cet argumentaire sera renforcé par l’utilisation constante d’un « nous » (« nos écrivains », « notre littérature » reviennent à de très nombreuses reprises) duquel Homel serait, implicitement, exclu. Boivin vante l’exotisme de la littérature québécoise (contrairement à ce que laissait entendre Homel) et félicite certaines associations et regroupements québécois et français qui mettent en place différents systèmes d’échange afin de promouvoir la littérature québécoise dans l’Hexagone. 
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 +==== C) À la défense d’Homel ====
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 +De nombreux autres penseurs et intellectuels sont intervenus dans le débat non pas pour appuyer directement les propos d’Homel (que la majorité d’entre eux juge comme étant regrettables), mais bien pour dénoncer le traitement que ses critiques lui font subir. De ce nombre, on compte entre autres Philippe Navaro (Le Devoir, 28 mars 2006), Carl Bergeron (Le Devoir, 28 mars 2006), Marc Cassivi, (Le Devoir, 28 mars 2006), Jacques Desrosiers (Le Devoir, 31 mars 2006), Raymond Cloutier (Le Devoir, 21 mars 2006), Michel Lapierre (Le Devoir, 29 avril 2006), Ginette Pelland (Le Devoir, 7 avril), Charles Binamé (Le Devoir, 11 avril 2006), Michèle Côté (Le Devoir, 18 avril 2006) et Pierre Thibeault (Ici, 20 avril 2006), tous encore une fois référencés dans l’article de Gillian Lane-Mercier. 
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 +Pierre Lefebvre, dans un texte publié la même année dans Liberté, est loin de se porter directement à la défense d’Homel. Il est, au contraire, très critique des positions de ce dernier, qu’il qualifie tour à tour de « bêtise » et de « niaiserie » (« Entre le signe et les choses », Liberté, nº4 (274), 2006, p. 4-24). Lefebvre ne verse cependant jamais dans la critique ad hominem, piège dans lequel selon lui les détracteurs d’Homel sont trop facilement tombés. Au contraire, il s’attarde à montrer le peu de fondement de certaines observations d’Homel, en argumentant, mais sans attaquer. C’est Madeleine Gagnon qui subira ici la grande majorité des reproches. Si Lefebvre n’est pas en accord avec Homel, il répudie encore davantage la réaction de celle qui a signé sa lettre au Devoir comme « membre de l'Académie des lettres du Québec et de l'Union des écrivains québécois » (« ce n’est donc pas, attention, une simple écrivaine ou citoyenne qui nous parle, mais bien une académicienne », ironise à ce propos Lefebvre). Lefebvre associe les « moyens d’action » proposés par Gagnon à de la « vengeance », réaction, selon lui, complètement disproportionnée et qui laisse poindre un malaise plus grand, certains complexes non résolus. 
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 +Pour Gillian Lane-Mercier, qui ne se prononce par directement sur le texte d’Homel mais bien sur le florilège de réactions qu’il a provoqué, le plus grand tort des commentateurs qui se sont exprimés sur l’affaire, c’est celui d’avoir entretenu un flou sur le statut de David Homel dans l’institution littéraire québécoise. Certains de ses détracteurs les plus virulents se sont servis de ses origines américaines pour le disqualifier d’emblée, ce qui a forcé les autres à tenter de le réhabiliter comme « véritable Québécois ». L’enjeu s’est donc déplacé du rôle de l’écrivain dans la littérature québécoise à la question de son origine ethnique, ce qui a donné lieu, selon Lane-Mercier, a une sorte de repli identitaire de la part des critiques d’Homel, qui ont brandi face à ses affirmations un « nous » collectif dont il serait exclu. Lane-Mercier dira qu’elle fut surprise de constater qu’aucun des commentateurs de l’affaire ne mentionnait le travail de traducteur d’Homel, lui qui « a traduit quelques-unes des œuvres québécoises et néo-québécoises contemporaines non seulement les plus marquantes, mais aussi les moins intimistes, voire les moins tranquilles » (Spirale, nº 210, 2006, p. 36). Cette omission caractérise pour elle une accentuation de la « faille » entre les écrivains francophones et anglophones au Québec, trope que l’on a trop souvent tendance à reconduire sans l’interroger, et « cache mal une méconnaissance réelle des liens, aussi fragiles soient-ils, tissés depuis une vingtaine d'années entre les communautés littéraires anglophone et francophone du Québec » (idem). 
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 +Les travaux sur la littérature anglo-montréalaise de Martine-Emmanuelle Lapointe abondent dans le même sens. Déjà en 2005 (un an avant le début de la polémique, donc), dans un article paru dans Voix et images intitulé « Les lieux de l’écrivain anglo-québécois », elle faisait remarquer le caractère « à part », d’outsider de David Homel, en plus de son penchant pour la polémique, le qualifiant de « franc-tireur », voire de « tireur d’élite » (Voix et images, vol. 30, nº 3, p. 91). Déjà, Lapointe remarquait certains traits chez Homel qui lui seront, un an plus tard, ouvertement reprochés (refus de l’intimisme, certaine méfiance face aux écrits féministes, etc.) Suite à la polémique engendrée par l’article du Monde, Martine-Emmanuelle Lapointe reviendra sur la réception des textes d’Homel au Québec dans le collectif Le Québec à l’aube du nouveau millénaire dirigé par Marie-Christine Weidmann Koop. Lapointe, en accord avec Gillian Lane-Mercier, dira que « le point de vue de Homel a surtout choqué parce qu’il ne provenait pas nécessairement d’un porte-parole digne de confiance, voire d’un ambassadeur crédible de la littérature québécoise en France » (« Entre le propre et l’étranger. La réception québécoise des œuvres de Ying Chen et de David Homel », Montréal, Presses de l’Université du Québec, 2008, p. 209-210). 
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 +===== 2007 et 2011 : L’Affaire Arcan =====
 +[[2007]] - [[2011]]
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 +==== A) Description ====
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 +En septembre 2007, l’auteure Nelly Arcan était invitée à la très populaire émission Tout le monde en parle, diffusée les dimanches soirs sur les ondes de Radio-Canada, pour faire la promotion de son plus récent roman, À ciel ouvert. Dès le mot d’introduction de Guy A. Lepage, le ton de l’entrevue était donné. « Si l’on se fit à ses livres, elle ne manie pas que le verbe. Voici l’écrivaine Nelly Arcan », de dire l’animateur, alors qu’Arcan descend les marches du studio d’enregistrement au son de « Quand on se donne à une femme d’expérience ».  Il sera donc question, dans les quelque 12 minutes que durera le montage final de l’entretien, bien davantage du passé de prostituée d’Arcan, de la sexualité omniprésente dans ses romans à caractère autobiographique et de la profondeur du décolleté de sa robe que de son nouveau texte. Le malaise d’Arcan, entourée uniquement d’hommes, est palpable. À sa diffusion, l’entrevue n’a cependant pas fait grand bruit.  L’écrivaine est cependant revenue, dans un texte publié dans le journal ICI (« L’image », 20 septembre 2007), sur son passage à l’émission. Elle écrit : « Pourtant, dans l’intégralité de l’entrevue, où il y a eu, c’est vrai, des moments de malaise sous l’insistance de questions qui se ressemblaient toutes, qui rejetaient sur moi le blâme, questions martelées, acharnées (vous, qui avez un problème, comment osez-vous vous prononcez, puisque votre corps, votre robe, vous font mentir) mais aussi des moments intéressants... qui n’ont pas été retenus. » Ce n’est qu’après le décès de l’écrivaine, qui s’est donné la mort en 2009, que le segment refait surface. En 2011, le site internet www.nellyarcan.com, piloté, entre autres, par Jérôme Langevin, publie une nouvelle posthume de l’auteure, intitulé « La honte », dans laquelle Arcan revient sur – selon ce que le lecteur peut en déduire, car Arcan ne nomme jamais le nom de l’émission, ni ceux de ses animateurs – son passage à l’émission de Lepage et témoigne, à la troisième personne, de l’humiliation qu’elle a ressentie suite à la diffusion des images.  À partir de ce moment, les images de l’entrevue ont refait surface sur Internet, et de très nombreux commentateurs ont réagi à l’affaire. 
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 +Il est à noter que, la polémique explosant à un moment où les médias sociaux et les blogues jouissent d’une immense popularité, il est impossible de faire la liste exhaustive de tout ce qui a été écrit à son sujet. Ce qui suit est donc une recension des principales réactions. 
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 +==== B) À la défense d’Arcan ====
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 +Avant la publication de « La honte » (et donc, avant le déclenchement « officiel » de la polémique), plusieurs personnes avaient déjà commenté l’affaire. Dans son compte rendu d’À ciel ouvert, (Spirale, nº219, 2008, p. 49-50), Sandrina Joseph reproche à Lepage de s’être rincé l’œil plutôt que d’avoir discuté de littérature. À la publication de Burqa de chair, recueil posthume (qui comprend, entre autres « La honte ») dont elle signe la préface, Nancy Huston dira, dans une entrevue accordée à la journaliste Chantal Guy de La Presse parue le 12 septembre 2011 : « J'ai vu cette scène à Tout le monde en parle, et c'est totalement impardonnable la manière dont l'hôte l'a humiliée. Jamais on n'a vu un homme sexuellement humilié comme ça devant des millions de gens à la télévision. Je suis sûre qu'il ne se sent pas le moins du monde coupable, mais il l'est, qu'il le sache ou non, avec d'autres, qui n'ont pas su reconnaître l'intelligence de cette femme. » Suite à l’ampleur qu’a prise la polémique, Huston s’est toutefois rétracté en publiant un communiqué sur la page de Tout le monde en parle, précisant qu’elle n’avait, en vérité, jamais visionné l’extrait de l’émission en question, et que ses commentaires étaient plutôt adressés à la version française de l’émission, animée par Thierry Ardisson, à laquelle avait également, quelques années plus tôt, participé Arcan. Huston accuse également la journaliste Chantal Guy d’avoir trafiqué ses dires, et ne pas avoir respecté sa demande de garder ses propos en dehors de la publication de l’entrevue. 
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 +==== C) À la défense de Lepage ====
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 +Guy A. Lepage n’a pas voulu commenter la polémique lors de son éclatement en 2011, préférant rendre disponible sur le site web de Tout le monde en parle l’extrait de l’émission, et laisser aux auditeurs le soin de juger. La majorité des commentaires qui ont suivi le déclenchement de la polémique s’entendent pour ne pas jeter le blâme sur l’animateur, préférant rappeler que Nelly Arcan incarnait bien souvent ce qu’elle dénonçait, en insistant sur le fait que l’écrivaine avait un rapport très trouble avec son image publique, et qu’elle avait beaucoup de difficulté à doser son désir de plaire et sa volonté de faire passer un message sur le sort des femmes dans la société contemporaine. Remarquons que la plupart des gens qui ont pris la parole dans ce débat ont eu tendance à diagnostiquer Nelly Arcan de plusieurs troubles et ce même si, de leur propre aveu, ils ne la connaissaient pas personnellement, ou alors que très peu. 
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 +Jocelyne Robert (« Si vulnérable », La Presse, 14 septembre 2011) avoue être « stupéfiée […] de lire les commentaires de Nancy Huston dans La Presse ». Pour elle, « [Arcan] vivait en enfer, grugée par le cancer du narcissisme maladif, obnubilée par son besoin insatiable de séduire et d'être la plus belle à tout prix. En même temps, elle se désagrégeait de détestation d'elle-même et s'indignait du sort des femmes condamnées à consommer et à être consommées », et « elle n'avait pas l'étoffe pour jouer à ce jeu dangereux de la confrontation publique. » Elle rappelle entre autres que si Lepage et Turcotte ont bel et bien été « baveux » avec l’écrivaine, plusieurs invités dans l’histoire de l’émission avaient subi bien pire sort. Pour Sophie Durocher (« Tout le monde parle de Nelly », Canoë, 14 septembre 2011), Guy A. Lepage a été respectueux, et a offert à l’écrivaine la chance de s’expliquer devant 2 millions de téléspectateurs, chose qu’elle n’a pas su faire. 
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 +Pour Nathalie Petrowski (« Nelly et les poux », La Presse, 14 septembre 2011), on a trop rapidement occulté la dimension fictionnelle de la nouvelle d’Arcan. Elle précise que jamais dans le texte, l’écrivaine ne nomme l’animateur ni son fou du Roi par leurs noms, et y voit un signe clair qu’il ne faut pas prendre la nouvelle comme un témoignage, mais bien comme une œuvre littéraire. « La question, c'est pourquoi, dans le cas précis de cette nouvelle, on ne voit que la réalité et pas la fiction? Pourquoi, en somme, on refuse à Nelly Arcan le statut d'écrivaine pour mieux la ranger dans le camp des victimes, des femmes humiliées ou des femmes sans tête? », écrit Petrowski. Même son de cloche chez Danielle Laurin (« Nelly, son corps, ses livres », Le Devoir, 17 septembre 2011). « Nous ne sommes pas dans la réalité, nous sommes dans l'écriture. Nous ne sommes pas au tribunal de la vérité, nous sommes dans la vérité de l'écriture. Dans la liberté de l'écriture. », écrit-elle. 
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 +« Mais en même temps, on ne peut absolument rien reprocher à Guy A. Lepage. Guy A. Lepage n’a pas été haineux avec elle. Guy A. Lepage a fait son métier, ce soir-là, comme il le fait tous les dimanches. », écrit Stéphane Laporte (« Nelly, Guy A. et la honte », La Presse, 13 septembre 2011). Tout en admettant que les commentaires des animateurs et des invités sur l’apparence d’Arcan étaient « adolescents », voire carrément irrespectueux, Laporte soutient que « Nelly Arcan n’aurait jamais dû aller à Tout le monde en parle. Ce n’était pas un endroit pour elle, dans son état de haute vulnérabilité. »
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 +Fabien Loszach, qui a été responsable de rédiger quelques textes pour le site www.nellyarcan.com, cherche dans l’œuvre de l’auteure les sources des contradictions soulevées par les animateurs de Tout le monde en parle, faisant de son passage à l’émission un des maillons de son œuvre, qu’il qualifie d’ambiguë, qui « dénonçait les carcans de la féminité tout en les alimentant. » (Nelly Arcan : l’ambigüité et la contradiction », Le Devoir, 16 septembre 2011).
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fq-equipe/recherche_sur_les_polemiques_litteraires.1447713964.txt.gz · Dernière modification : 2018/02/15 13:56 (modification externe)

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