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Sens de l'intrigue

À partir des recherches de Ricoeur sur une intrigue aux vertus conciliatrices (inspirées de la Poétique d’Aristote), Villeneuve travaille à mettre ce principe de configuration en rapport avec le monde des intrigues. Sans nier la fonction de concordance, elle concède aux discordances un pouvoir d’attraction qui aurait valeur de mise en intrigue, c’est-à-dire que tout désir de narrer (et de lire) reposerait sur les désordres du récit :

« Ce que la mise en intrigue met en commun, elle s’acharne aussi à en exacerber l’incompatible présence ; ce qui est “mis ensemble” peut produire du conflictuel, du déchirement encore plus grand. En quoi les indices du divers et du désordre, bien qu’absorbés dans l’effort de concordance, ne seraient-ils pas, de par la menace qu’ils font peser sur la concordance elle-même, l’indice d’un tout autre triomphe ? En vertu de quel désir narratif faudrait-il recommencer inlassablement le récit des concordances ? » (p. 41).

Villeneuve pose l’hypothèse que, ce qui intrigue dans les intrigues, ce qui stimule le désir narratif, l’imagination et la sensibilité du lecteur, ce sont davantage les conflits, les méprises, les doutes, les obsessions, les peurs, les erreurs ; bref, tout ce qui est paradoxe, aporie et impasse, tout ce par quoi « les alliances s’effondrent, les abîmes se creusent et les existences se brisent » (p. 50). Il s’agit là, du reste, de ce que révèlent les contenus sémantiques de la notion d’intrigue (contenus ignorés par Ricoeur), l’auteure remontant le cours historique et étymologique du concept pour en signifier le caractère impur (alors que, à la suite de la morphologie des contes de Propp, s’est opérée l’assimilation de la notion d’intrigue à l’idée de pureté, de neutralité, sorte de degré zéro du récit). C’est à cette condition d’impureté que le récit offre la possibilité de tant de recommencements dans son geste de raconter. Par la médiation de l’intrigue, le récit acquerrait une capacité d’autotransformation – transformation qui n’est rendue possible que parce qu’il y a « perversion » du concept de concordance, que parce que certains traits présents sont convertis en traits nouveaux.

Par « sens de l'intrigue », Villeneuve entend donc la « médiation entre le sensible et l'intelligible dont éclôt une prolifique imagination de la vitesse et de l'attente » (p. xviii). Attente (et anticipation) des possibles qui jouent de vitesse pour déstabiliser et emballer l'imagination et l'intelligence sensible et perceptive du lecteur : voilà ce qui fonde le sens et l'intérêt de l'intrigue.

Fiche de lecture

Le sens de l'intrigue ou La narrativité, le jeu et l'invention du diable

ranx/sens_de_l_intrigue.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

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