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ranx:pour_que_tu_ne_te_perdes_pas_dans_le_quartier

I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE

Auteur : Patrick Modiano

Titre : Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier

Éditeur : Gallimard

Année : 2014

Désignation générique : Roman

Quatrième de couverture : « — Et l’enfant? demanda Daragane. Vous avez eu des nouvelles de l’enfant? — Aucune. Je me suis souvent demandé ce qu’il était devenu… Quel drôle de départ dans la vie… — Ils l’avaient certainement inscrit à l’école…— Oui. À l’école de la Forêt, rue de Beuvron. Je me souviens avoir écrit un mot pour justifier son absence à cause d’une grippe. — Et à l’école de la Forêt, on pourrait peut-être trouver une trace de son passage… — Non, malheureusement. Ils ont détruit l’école de la Forêt il y a deux ans. C’était une toute petite école, vous savez…»

II- CONTENU GÉNÉRAL

Résumé de l’œuvre : Daragane, depuis quelques mois, ne parle plus à personne et semble n’être plus intéressé aux autres ni au monde. Un homme, Gilles Ottolini, et sa fille Chantal, le sortent pourtant de sa torpeur pour lui remettre un carnet d’adresse qu’il avait égaré. Suite à leur rencontre dans un café, ces personnages n’hésitent pas à l’appeler souvent, à le rencontrer tour à tour. Gilles Ottoloni veut savoir des renseignements sur un certain Guy Torstel qui apparaît dans le carnet de Daragane sans que ce dernier ne se rappelle de qui il s’agit. D’ailleurs, le protagoniste ne semble pas se souvenir de grand-chose en ce qui a trait à son passé, pas même du roman qu’il a écrit, Le noir de l’été. Mais progressivement, sans avoir la prétention de recouvrer la mémoire, il se rappelle de certains moments, très imprécis. Il se rappelle que ce Guy Torstel était un ami de Paul, un homme lié à Annie Astrand, la femme qui s’occupait de Daragane quand il était enfant. Il réussit à retrouver Annie, désormais mariée à un homme qui porte le nom de famille Vincent, mais lorsqu’il essaie de faire enquête sur son passé avec son aide, elle lui répond doucement que non, qu’ils n’ont jamais fait telle ou telle chose tous les deux, par exemple. Ainsi, ce n’est pas l’Annie Astrand de ses souvenirs. Il se rend dans son village d’enfance et feint d’être un étranger lorsqu’il rencontre le médecin, le voisin de la maison qu’il habitait. Ce dernier l’informe de son passé trouble. Puis, que sa maison a été détruite. Daragane marche dans la même rue que celle où il marchait lorsqu’il était enfant et a l’impression que le temps est aboli. Puis, il se souvient aussi qu’Annie Astrand avait essayé de l’enlever pour l’emmener à Rome, mais qu’il s’est un matin réveillé seul dans la chambre qu’il occupait avec elle. Le roman est en quelque sorte un lent retour en arrière, dans des souvenirs oubliés depuis quinze ans, par un personnage qui a perdu la mémoire.

Thème(s) : Imprécision (voire absence) des souvenirs, temps qui s’empile dans Paris, convergence et étrangeté du temps, enfance, enquête nébuleuse sur soi, course de chevaux.

III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION

Explication (intuitive mais argumentée) du choix : Patrick Modiano est l’auteur de L’Horizon, d’Accident nocturne et de L’herbe des nuits, trois œuvres dans lesquelles le personnage est déconnecté. Bien qu’il soit plus ou moins pertinent de faire une fiche de lecture sur une œuvre ressemblant beaucoup à ces trois œuvres, ce roman semble à première vue différent : le personnage recouvre la mémoire (on remarque une progression), et l’impression qu’il ne pourra jamais bien comprendre son passé est découverte contrairement aux autres œuvres de Modiano où le protagoniste connaît d’avance sa déconnection avec le monde.

Appréciation globale : Lecture agréable et récit intrigant.

IV – TYPE DE RUPTURE

A) Rupture actionnelle : Le personnage est en quelque sorte capable d’agir. Au début du récit, il semble ne pas avoir envie d’agir (ou plutôt d’interagir avec le monde), c’est tout. Mais à d’autres moments, il ressent l’envie de se «laisser glisser», «flotter», «dériver» ou de «faire la planche».

B) Rupture interprétative : Même si le personnage ressemble beaucoup aux autres personnages de Modiano (imprécision des souvenirs, temps nébuleux et incertain, impossibilité de comprendre son environnement pour ces deux raisons), Daragane donne une impression de reconnexion partielle avec le monde, à la fin. Mais en y réfléchissant bien, ce n’est qu’une impression. Il est si étranger à son passé que l’enfant qu’il était est un autre personnage et ne s’incorpore pas à lui-même. Il le dit à de nombreuses reprises. Le lecteur se sent floué lorsqu’il recouvre des souvenirs qu’il avait d’abord nié à lui-même et devant les autres personnages, mais ne lui en voulons pas : il est déconnecté. Il va jusqu’à oublier le premier livre qu’il a écrit…

«Mais ces souvenirs se dérobaient à lui au fur et à mesure, comme des bulles de savon ou les lambeaux d’un rêve qui se volatilisent au réveil.» (p.15)

«Mais ce soir, cette ville lui semblait étrangère. Il avait largué toutes les amarres qui pouvaient encore le relier à elle, ou bien c’est elle qui l’avait rejeté.» (p.21)

«Le présent et le passé se confondent, et cela semble naturel puisqu’ils n’étaient séparés que par une paroi de cellophane.» (p.33)

«Non, il n’avait jamais perdu ce carnet d’adresses. Ni Gilles Ottolini ni Joséphine Grippay qui se faisait appeler Chantal n’avaient jamais existé.» (p.62)

«Il se demandait si cette femme était la même que celle qu’il avait connue, enfant, à Saint-Leu-la-Forêt. Et lui, qui était-il? Quarante ans plus tard, quand l’agrandissement de la photomaton lui tomberait entre les mains, il ne saurait même plus que c’était lui, cet enfant-là.» (p.100)

«Cet enfant lui paraissait aujourd’hui un étranger.» (p.115)

Note: Les personnages de Modiano analysés dans cette liste sont déconnectés, certes. Mais souvent, ils semblent comprendre mieux le monde qu'un personnage dit connecté. Ils comprennent le caractère sibyllin et impossible à saisir des choses. Pour ce type d'univers je me demande: n'est-ce pas là la meilleure connexion possible à établir?

V – SPÉCIFICITÉS POÉTIQUES

Narrateur extradiégétique qui rapporte seulement les pensées de Daragane, de sorte que le lecteur ne comprend le monde que par sa perception.

ranx/pour_que_tu_ne_te_perdes_pas_dans_le_quartier.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

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