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AUDRÉE WILHELMY - OSS

I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE

Auteur : Audrée Wilhelmy

Titre : Oss

Éditeur : Leméac

Collection : -

Année : 2011

Éditions ultérieures : -

Désignation générique : Aucune, mais la quatrième de couverture du deuxième livre de Wilhelmy (Les sangs, aussi publié par Leméac) précise qu’Oss est son premier roman.

Quatrième de couverture : « À la mort de Grumme, la Petite tourne le dos au magasin générale de la vieille obèse, quitte les Naëlle, Fribulle et Marie Grille-Temps de son village, pour aller faire sonner ses grelots jusqu’au cirque de Fort-Bouteille. Aux confins d’une étrange forêt, elle retrouvera le grand méchant Loup.

Mais dans ce conte amoral, érotique et cruel, on ne sait plus trop qui est pris au piège de l’autre. »

Notice biographique de l’auteur : [Quatrième de couverture] « Audrée Wilhelmy est née à Québec en 1985. Elle étudie, écrit et dessine. Oss est sa première publication. »

II - CONTENU ET THÈMES

Résumé de l’œuvre : À une époque sans nom, dans le petit village pêcheur d’Oss, entre les maisons en bois ternies par le sel et les restes d’une baleine pourrissante, un cortège funèbre s’avance dans le cimetière. Grumme, la propriétaire du magasin général, réputée sorcière, est morte, au grand bonheur de tous. Lô, le prêcheur du village, prononce une oraison ennuyée, avant de retourner au presbytère avec Noé, la fille adoptive de Grumme, avec qui il entretient une relation perverse et violente, ajoutant chaque jour aux cicatrices déjà nombreuses de celle-ci.

Le soir même, le presbytère s’embrase et Lô avec. Noé, pieds nus et les jupes collantes de sel, s’enfuit par la route de terre. Elle arrive à la foire de Fort-Bouteille, où elle fait la rencontre des forains, et où elle apprend l’existence d’un curieux moyen de transport : les bécosses de la foire, louées. Noé, se cachant dans une de celles-ci, réussit à se faire transporter clandestinement jusqu’à l’entrepôt central des latrines, cette « étrange forêt » que mentionne la quatrième de couverture.

Rameau, un adolescent d’Oss ayant longtemps désiré Noé, mais n’ayant jamais osé profiter de la jeune femme aux convulsions effrayantes, décide lui aussi de quitter le village en utilisant le système de bécosses. S’ensuit la rencontre inattendue de Noé et Rameau à l’entrepôt, où celui-ci avoue avoir tué Grumme et Lô. Devant l’impassibilité de la jeune fille, il la frappe puis la viole à répétition, avant de s’embarquer dans l’unique bécosse à destination d’Oss, commandée pour le chantier du nouveau presbytère. La scène finale nous laisse comprendre que Rameau, rapidement lassé de Noé de qui il a pu obtenir ce qu’elle lui a toujours refusé, retourne à Oss pour reprendre le rôle de prêcheur. Le destin de Noé, lui, est inconnu : Rameau la laisse presque pour morte dans une bécosse à destination inconnue.

Tout le récit est interrompu d’analepses précisant le rapport de Noé à Grumme et Lô. Noé, trouvée et recueillie par Grumme, subit sous ses soins des rituels d’exorcisme (on comprend qu’elle est prise de crises convulsives) : des grelots sont chauffés à blanc, posés sur sa peau puis noués dans ses cheveux. Plus tard encore, Lô surprendra Noé chantant nue dans son bain. Celle-ci, impassible, lui demandera de lui maintenir la tête sous l’eau le plus longtemps possible, mais aussi de « la toucher » en même temps.

Thème principal : La violence

Description du thème principal : La violence est omniprésente dans le récit. On la retrouve, de façon explicite, dans le comportement qu’ont les habitants d’Oss à l’égard de Noé : violence physique de la part de Grumme, violence sexuelle de la part de Lô, violence morale de la part des autres. La rencontre de Noé et de Rameau est extrêmement violente : celui-ci frappe celle-là, puis la viole à répétition, avant de la forcer à entrer dans une bécosse en direction d’on ne sait où.

Mais la violence se fait dans les deux sens. Noé, par son détachement maladif des choses et des êtres, fait violence : Lô souhaiterait qu’elle parle, Rameau qu’elle se débatte, etc. L’épilogue, alors que Rameau rentre à la maison, nous montre que le comportement de Noé a causé plus d’un mal.

À noter que les chants doux de Noé viennent fermement contraster avec la violence entourant le personnage.

Thèmes secondaires : Le passage à l’âge adulte, la vacuité, la perversité.

III- CARACTÉRISATION NARRATIVE ET FORMELLE

Type de roman (ou de récit) : Nouvelle / roman / conte

Commentaire à propos du type de roman : L’œuvre reprend à première vue les caractéristiques traditionnellement attribuées à la nouvelle : texte court (environ soixante pages), développement limité des personnages, chute. Cependant, la quatrième de couverture du deuxième livre de Wilhelmy (Les sangs, Leméac) précise qu’Oss est son premier roman, position tout à fait tenable compte tenu du flou générique entourant les œuvres littéraires modernes. Finalement, plusieurs éléments narratifs rappellent le conte : incertitude quant au cadre temporel du récit, noms invraisemblables (Rameau, Lô, Marie Grille-Temps, etc.), exergue de Perrault (reproduit en annexe).

Type de narration : Hétérodiégétique.

Commentaire à propos du type de narration : La narration hétérodiégétique est neutre et constante. Elle est froide, descriptive et appliquée, rappelant parfois, à la limite, des narrations d’ordre sociologique, dans le style d’Annie Ernaux. (Incipit : « Il faut voir ce très petit village de sel et de roches appelé Oss. Une vingtaine de maisons en bois, une chapelle, une école, un magasin. Les cabanes se ressemblent toutes avec leurs couleurs sales qui tournent au brun; elles sont plantées trop près des vagues : les algues montent en mousse le long des joints. »)

Personnes et/ou personnages mis en scène : Le prêcheur Lô, la tenancière et sorcière Grumme, sa fille adoptive Noé (surnommée « la Petite ») et Rameau, un adolescent du village.

Lieu(x) mis en scène : Les lieux sont longuement décrits mais demeurent, paradoxalement, nébuleux, renforçant l’impression de conte donnée par l’œuvre.

Types de lieux : Le village pêcheur d’Oss, la foire de Fort-Bouteille, l’entrepôt de bécosses.

Date(s) ou époque(s) de l'histoire : Incertaine.

Intergénérité et/ou intertextualité et/ou intermédialité : Bien qu’aucun élément merveilleux n’y soit incontestablement repérable, le texte emprunte décidément l’esthétique du conte et du récit folklorique. Cette esthétique, qui relève de plusieurs éléments (noms de lieux (Oss, Fort-Bouteille), de personnages (Lô, Marie Grille-Temps, Rameau), thèmes (sorcellerie, enfant abandonné), lieux (chemin indéfini au milieu de nulle part, cimetière côtier aux monuments faits d’ossements de baleines), etc.) entre en vif contraste avec la perversité ambiante du récit : violences physiques, psychologiques et sexuelles, domination, viol, mais aussi (la fin nous le montre) comportement masochiste qui rappelle le Marquis de Sade. Ce contraste n’est pas unique. L’adjonction de ces deux éléments, dans le but de produire un effet « dérangeant », est commune au cinéma, dans le jeu vidéo, en littérature, etc., dans le domaine populaire ou restreint.

Particularités stylistiques ou textuelles : Rien d’immédiatement notable.

IV- POROSITÉ

Phénomènes de porosité observés : Porosité générique (conte / roman); porosité du savant et du populaire

Description des phénomènes observés : De la même façon que dans Frères de David Clerson, Oss présente une porosité entre le roman et le conte ou le folklore, c’est-à-dire que malgré toutes les caractéristiques associant l’œuvre à ceux-ci, elle demeure avant tout et décidément un roman. Il devient intéressant de ne pas considérer cette porosité de façon isolée, mais plutôt comme un ensemble, considérant sa récurrence dans la production des jeunes auteurs québécois des dernières années. Je proposerais quelque chose comme une idée de « proche exotisme »; on donne aux œuvres quelque chose d’étrange en utilisant des procédés formels et génériques bien connus (à la limite, je proposerais de rapprocher l’effet de lecture de ces œuvres de la notion d’Unheimlich, ou inquiétante étrangeté). Quoiqu’il en soit, je crois qu’il serait intéressant de s’attarder à cette tendance générique en prenant comme point de départ la notion de porosité.

Encore de la même façon que dans Frères, cette porosité générique entraîne nécessairement une porosité du savant et du populaire, en intégrant dans des œuvres revendiquant (du moins il me semble) une nature « littéraire » des éléments provenant de genres résolument populaires, transmis souvent par voie orale.

IV – Annexes

1. Exergue

« Assise sur un tas de bûches, elle fourrage dans sa tignasse pleine de paille, d’herbe et d’aiguilles de pin. Son cou, ses bras et ses jambes hâlés sont criblés de piqûres de maringouins. L’air est parfumé, sonore d’insectes et d’oiseaux. Anne Hébert

Le loup, la voyant entrer, lui dit en se cachant dans le lit sous la couverture : Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche et viens te coucher avec moi.

Auteur de la fiche : Alex Tommi-Morin

fq-equipe/wilhelmy_audrey_2011_oss.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

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