Fiche de lecture
1. Degré d’intérêt général
Décidément, je ne suis pas très chanceux dans mes lectures… Le déluge blanc n'est pas non plus la fameuse découverte de l'année 1981 que tout le monde attendait et, même s'il recèle quelques passages intéressants qui tantôt rappellent un peu La métamorphose de Kafka, tantôt traitent, par métaphore, de la condition humaine à la sauce sisyphienne et du combat de l'homme contre le Mal, il n'en finit plus de finir. Le “combat” de l'homme contre le rat est interminable et le lecteur en vient à espérer un vainqueur non par désir de résolution de l'intrigue, mais plutôt par désir de passer à autre chose (évidemment, ce n'est que mon opinion).
2. Informations paratextuelles
2.1 Auteur : Normand Rousseau
2.2 Titre : Le déluge blanc
2.3 Lieu d’édition : Montréal
2.4 Édition : Leméac
2.5 Collection : roman québécois
2.6 (Année [copyright]) : 1981
2.7 Nombre de pages : 215
2.8 Varia : -
3. Résumé du roman
Le 27 avril, une tempête de neige s'abat sur le Québec et paralyse la société pendant plusieurs jours. Orval Bélanger, professeur de paléontologie à l'université, se retrouve coincé (plus ou moins volontairement) dans sa maison de banlieue. Alors que sa femme vient de le quitter, il se met à entendre les grignotement d'un rat qu'il s'efforce par tous les moyens de repérer, de piéger, de tuer. Toutefois, c'est le rongeur qui, à force d'un acharnement et d'une ruse qui n'ont rien d'animal, parvient à rendre Orval fou, ou plutôt à réveiller et révéler sa folie et sa paranoïa. Plus l'histoire avance et plus Orval se désagrège, autant physiquement (il ne mange plus, a froid, se blesse à plusieurs reprises) que psychologiquement (ses souvenirs pas toujours exacts et ses rêves se mélangent avec sa réalité).
4. Singularité formelle
Le roman est divisé en 45 chapitres à peu près égaux appelés “séquences”. Aucun dialogue, ce qui s'explique par le fait que le personnage principal est seul dans sa maison pendant la majeure partie du récit.
5. Caractéristiques du récit et de la narration
La narration est hétérodiégétique et focalisée sur le personnage d'Orval. Comme je l'ai esquissé plus haut, dans le dernier tiers du roman, les retours en arrière sont plus fréquents au fur et à mesure que l'esprit d'Orval s'embrouille et que ses rêves et ses souvenirs font irruption dans la narration.
6. Narrativité (Typologie de Ryan)
6.1- Simple 6.2- Multiple 6.3- Complexe 6.4- Proliférante 6.5- Tramée 6.6- Diluée 6.7- Embryonnaire 6.8- Implicite 6.9- Figurale 6.10- Anti-narrativité 6.11- Instrumentale 6.12- Suspendue
Justifiez :
Le récit est tout ce qu'il y a de plus uni. Une seule intrigue centrée autour d'un seul personnage, racontée par un seul narrateur de façon linéaire.
7. Rapport avec la fiction
Rien à mentionner.
8. Intertextualité
À deux reprises dans le roman (p. 132, notamment), un déluge de figures historiques, mythiques et religieuses sont évoquées en relation avec une invasion de rats. Leur impact, tout comme celui de la figure récurrente de Sisyphe, me semble davantage exploité dans un objectif philosophique que purement littéraire.
9. Élément marquant à retenir
L'inexorabilité de la progression narrative qui rend la lecture éprouvante. Le récit est construit de manière à oppresser le lecteur par l'inlassable répétition du motif de la lutte contre le rat et par la concentration autour des pensées d'un Orval manifestement fou.
**10. Réception immédiate
“[…] Conduit à la Hitchcock, le drame, qui se déroule comme un kaléidoscope de 45 «séquences», sert de reconstitution, dans le double registre du souvenir et du rêve, à la cohabitation difficile du couple, aux amours secrètes des deux conjoints, à leurs fantasmes irrésolus, à la vie professionnelle d'Orval. […] Le traitement exceptionnel du temps («Depuis que Thérèse était partie, il n'avait pas changé la date du calendrier», p. 152) contribue à créer un suspense qui crispe les nerfs du protagoniste (« Le temps s'était étiré dans l'esprit d'Orval et chaque minute devenait une nuit ou un jour», p. 152) et ceux du lecteur. A cela s'ajoute une fermeté d'écriture qui ne s'est pas démentie depuis la Tourbière, en même temps que Normand Rousseau se construit un univers sis aux confins de la marginalité. Certes, une oeuvre attachante dont il faudra suivre le dérou- lement et le progrès. ” [Gilles DORION, Québec français, no 44, 1981, p. 8)