Outils pour utilisateurs

Outils du site


fq-equipe:medialite

3- Médialité

La notion de médialité, dégagée de l’approche de Marie-Pascale Huglo, fait référence à la position non dominante, dans le monde contemporain, du langage écrit par rapport aux autres médias, en particulier visuels. C’est toutefois un aspect de la recherche qui a été très peu développé jusqu’à maintenant. Les quelques données collectées nous révèlent toutefois deux tendances majeures : soit on s’intéresse aux liens entre les différents médias et à l’impact de ces transferts et influences dans un média donné, soit (et c’est le cas le plus fréquent) on s’intéresse à la place occupée par la littérature dans les autres médias, souvent pour en déplorer l’absence (voir les bibliographies, cf. infra).

3a) position de l’écrit par rapport aux autres médias

Un regard rapide sur cette question nous amène à considérer une autre avenue d’étude de la médialité, qui relèverait d’une approche disons « pragmatique », en considérant l’influence des divers médias dans la formation de l’imaginaire du lecteur ou, pour le formuler autrement, la question du rapport de l’écrit par rapport aux autres médias peut être pensée à partir du lecteur, son imaginaire et sa culture, qui ne sont pas exclusivement littéraires, mais surtout qui sont empreints de culture populaire (discours social des journaux et mass media, télévisuelle, cinématographique, photographique, etc…), voire d’une culture plus vaste et plus complexe que celle du lecteur d’avant (hausse du niveau de scolarité) :

« La conscience du code romanesque devient manifeste, elle est sollicitée chez un lecteur qu’on suppose formé par le cinéma, la télévision, les médias et dont la culture peut être un terrain commun de jeux et de transgressions. Roman distancié, à la limite de la parodie, ne se prenant pas (trop) au sérieux mais cultivant en fait les valeurs esthétiques et éthiques de ce dégagement » (Rabaté, 1998 : 112)

Cette troisième façon d’envisager le rapport littérature et média n’est pas très loin du pur jugement de valeur, de la conscience alarmiste, même, lorsque, par exemple, T. Guichard met en rapport le succès de l’autofiction avec un public obsédé de télé-réalité (2007) ou lorsque Henri Raczymow lie la mort du grand écrivain et de la littérature à l’avènement de la télé :

« [Pendant les années 50, 60, un] écrivain, selon la difficulté ou l’immédiateté de sa possible réception, pouvait être accueilli au sein de l’une ou l’autre de ces formes de la reconnaissance [du grand publique, de la critique littéraire]. Il n’y a plus aujourd’hui de ciel que celui constitué par le public et le public n’est touché que par la seule télévision. » (1994 : 23)

En d’autres termes, pour certains, l’écrit se serait quelque peu fait « bouffer » par les autres médias, ce qui aurait contribué à la crise de la littérature : « La pauvreté relative de l’imaginaire dans la littérature d’aujourd’hui serait due à ce que cinéma et télévision, par l’extension de leur pouvoir au moment même où le roman subissait les assauts de la théorie, ont pour un temps absorbé – ou paralysé – une bonne part des facultés inventives et de la puissance d’évocation du romancier. » (Nadaud, 1987 : 11)

Dans cette optique, le collectif la Caméra des mots, donne le ton :

Majorano, Matteo (dir.) (2007), La Caméra des mots, Bari, Edizioni B.A. Graphis. [fiche de Leppik]

Majorano, M. « Une insouciante clandestinité », p. XIII-XVI.

Nous sommes passés à « l’ère du spectacle » : le spectacle est la forme d’organisation sociale la plus répandue dans le monde technologique. La littérature de nos jours souffre de cette hégémonie croissante du spectacle, et fait recours à toutes les ruses à sa disposition pour survivre en gardant son identité, soit en essayant de ‘s’adapter au spectacle, soit en refusant le spectaculaire,

Bégaudeau, F. « Littérature/Cinéma, le partage des tâches », p. 5-21.

La littérature et le cinéma cohabitent, mais le cinéma prend toute la place, gagne la bataille de la fréquentation, des parts de marché, et jusqu’aux esprits de certains écrivains. Ainsi parmi les romanciers qui occupent le devant de la scène, beaucoup se sont assimilées des techniques narratives importées du cinéma.

Pasquier, R. « L’œuvre indistincte (Vasset, Volodine, Delaume, Bon) », p. 49-69.

Si le roman est le fils du spectacle, le XXe siècle avant-gardiste aurait tenté un parricide. Cependant, la « nouvelle alliance scellée depuis les années quatre-vingts [sic] ne serait donc qu’un sage retour aux sources, à l’impureté spectaculaire fondamentale. Elle représente pourtant une autre impasse, en dissolvant le roman dans le tout-marchandise, et le rendant ainsi indistinct du produit. On cherchera à montrer comment certains romanciers relèvent le défi de la double impasse, en assumant l’“indistinction” [ressemblance “presque” parfaite] de leurs oeuvres avec les fictions-marchandises. » (résumé, p. 192)

Oliver, A. « Lire et voir. Traces de vies. », p. 170-179.

Laurens, Ernaux, NDiaye « … ces textes s’inscrivent dans le champ de la littérature biographique et accordent une large place à des photographies qui ne représentent pourtant jamais l’auteur-narrateur. Ancrées dans le réel ou ouvertes à l’imaginaire, elles suggèrent une autre “scène” où le spectacle du monde devient comme l’écho proche ou lointain du moi textuel. » (résumé, p. 191)

Cependant, l’approche de Marie-Pascale Huglo se veut, je crois, une approche plus globale du phénomène et qui convoque tant le fait littéraire que le rapport à une culture commune : « D’une façon générale, les relations entre l’oralité et l’écriture constituent une excellente approche de l’intermédialité dans le champ de la littérature. Elles ont déjà amplement montré que les textes mobilisent une mémoire appareillée verbale et non verbale (musicale par exemple), écrite et non écrite, mais on ne saurait s’en tenir là. La culture audiovisuelle, qui est aujourd’hui la nôtre, engage lecteurs et critiques à questionner l’impact des images sur le récit littéraire et contemporain. » (2007 : 28)

On peut se référer directement à la fiche pour plus de précisions : http://contemporain.info/wiki2/doku.php/fq-equipe:huglo_marie-pascale_2007_le_sens_du_recit

Le rapport de l’écrit à l’archive pourrait aussi s’inscrire ici.

Blanckeman, pour sa part, propose d’appeler « graphèmes » « une unité d’écriture élémentaire, concentrant une charge de signification minimale mais constituant un point de société irréductible, intégré dans la langue ordinaire. » La « masse d’écrits, anonymes et insidieux, qui bordent les routes, animent les murs, passent d’une main à l’autre (journal), d’un regard à l’autre (affiche), d’une conscience à l’autre (réglementation), d’un affect à l’autre (lettres, chansons) », « insérés dans l’œuvre littéraire ». (2006 : 164) Il en distingue quatre types : 1- sociographèmes, à valeur d’identifiants sociologiques 2- ethnographèmes, à dominante ethnographique 3- psychographèmes, à dimension émotive 4- philographèmes, à fonction assertive.

Rapport écriture et référence picturale, voir Viart (2005a)

Par ailleurs, dans un article intitulé « L’autonomie intermédiale du littéraire : Une introduction » [L’esprit créateur, volume XLII, n° 1, printemps 2003, p. 3-9.] Jean-Christophe Valtat remarque une réticence, chez la critique, à tirer les conséquences théoriques de l’introduction des nouveaux médias « tant sur le plan de la production « scientifique », que sur le plan de l’objet littéraire même. » (2003 : 3) L’autonomie du littéraire est donc mise en question à l’époque contemporaine, et le littéraire peut retrouver ou reconstruire sa spécificité grâce à la concurrence des médias. − intermédialité, hybridation…

Autre perspective moins connue mais intéressante dans l’article de Bénédicte Boisseron, « Post-coca et post-coïtum : La jouissance du logo chez Guillaume Dustan et “Seinfeld” » [L’esprit créateur, volume XLII, n° 1, printemps 2003, p. 81-91] : Boisseron montre combien la culture « pop » s’infiltre dans l’art. Elle [il?] opère une étude comparative entre le sitcom américain Seinfeld et les livres de Guillaume Dustan (Je sors ce soir - 1997, Dans ma chambre – 1996), en se servant de la boisson coca-cola comme trame idéologique. Elle souligne l’américanisation de la littérature contemporaine en France et la libre circulation, créées par la culture « pop », des idées et des biens de consommation d’un champ de production à l’autre. Tout comme le coca, les petits récits sans vraie intrigue sont construits pour motiver la prochaine lecture, puisque ils n’étanchent pas la soif d’une histoire. Ces récits forcent le lecteur à toujours rester dans l’étape de la séduction, d’un récit possible, sans jamais en recevoir un. » Séries télé et culture populaire, des médias/médiums ?

BIBLIOGRAPHIE POTENTIELLE (littérature et autres médias)

1- Littérature et médias :

—- (1987), La littérature et les médias : Études françaises, volume 22, no 3 (hiver), p. 7-115.

BOURQUE, P.-A. (1987), « La marginalisation de la littérature », in H.-J. Greif (éd.), Arts et littératures, Québec, Nuit blanche, p. 115-135.

DEN TOONDER, Jeanette (2005), « L'Autoreprésentation dans une époque massmédiatisée : Le Cas Angot », in Houppermans, Sjef ; Delzons, Christine Bosman ; De Ruyter-Tognotti, Danièle (éd. et introd.), Territoires et terres d'histoires : Perspectives, horizons, jardins secrets dans la littérature française d'aujourd'hui, Amsterdam, Rodopi, p. 39-59.

DJIFFACK, André (1994), « Les Enjeux des mass média dans les récits de Sylvain Bemba », Présence Francophone : Revue Internationale de Langue et de Littérature, no 45, p. 169-191.

FRIGERIO, Vittorio (2003), « Cui predest ? Réflexions sur l'utilité et l'utilisation de la théorie des genres dans la culture de masse », Belphégor : Littérature Populaire et Culture Médiatique, volume 3, no 1 (décembre).

GROENSTEEN, Thierry (2005), « Médiagénie et réflexivité, médiativité et imaginaire: Comment s'incarnent les fables », Belphégor: Littérature Populaire et Culture Médiatique, volume 4, no 2 (mai).

HENRIQUEZ, Pradel (1998), « Médias et littérature en Haïti : Écrire envers et contre tout », Notre Librairie : Revue du Livre: Afrique, Caraïbes, Océan Indien, no 133 (janvier-avril), p. 178-181.

IMBERT, Patrick (2004), Trajectoires culturelles transaméricaines: Médias, publicité, littérature, et mondialisation, Ottawa, Presses de l’Université d'Ottawa (coll. « Transferts Culturels/Cultural Transfers »), 350 p.

LATTÈS, Vanessa et Pascal LARDELLIER (1999), « Les émissions littéraires à la télévision : ambiguïtés du ‘‘médiatexte’’ », Communication et langages, no 119 (1er trimestre), p. 24-37.

Analyse des rapports entre la télévision et la littérature et plus particulièrement de la notion de médiatexte.

MARCHAUDON, Elisabeth (1988), « Le livre et les médias [imprimés] », Écrits du Canada français, no 64, p. 31-35.

TENESCU, Alina (2007), « L'influence des médias sur la littérature francophone contemporaine », Cuadernos de Filologia Francesa, no 18, p. 209-220.

VIGOUREUX, Elsa (2004), « Le grand déballage : secrets intimes sous projecteurs », Le Nouvel Observateur, no 2059 (22 avril), p. 44-48.

→ Enquête sur le phénomène de la divulgation de la vie privée dans l'autofiction, les émissions axées sur le témoignage, la télé-réalité, etc.; les conséquences psychologiques de ces confessions et témoignages publics pour les participants.

2- Sur la question de la place de la littérature dans les médias :

DE JONQUIÈRES, Jenny et Nadia SERAIOCCO (2008), « Le livre dans les médias », Livre d'ici, volume 34, no 1 (septembre), p. 7-11.

→ Les médias parlent peu du livre [et des petites maisons d'édition au Québec] / Jenny de Jonquières, p. 7-8 – Oui, les blogues explosent : ces “carnets virtuels” peuvent-ils contribuer à la promotion du livre? / Jenny de Jonquières, p. 9-10

→ Les réseaux médiatiques en coulisses [les réseaux de diffusion classiques comme CNW et Marketwire et le Web 2.0 (blogues et autres contenus participatifs)] / Nadia Seraiocco, p. 10-11.

DORAIS, David (2008), « Quel média pour la littérature ? », Spirale, no 219 (mars-avril), p. 22-23.

→ Regard critique sur la place de la littérature dans les différents types de médias au Québec et réflexion sur celui qui est le mieux adapté pour couvrir le domaine littéraire, soit la radio communautaire.

FOULON, Alexandrine (2006), « L’invisibilité de la littérature québécoise », Lettres québécoises, no 121 (printemps), p. 17-19.

→ Etude de la place de la littérature québécoise dans les médias et, en particulier, dans quatre journaux québécois («La Presse», «Le Devoir», «Voir» et «Le Soleil»); comparaison avec la diffusion de la littérature française et étrangère au Québec.

GOULEMOT, Jean, Thomas STEINFELD et Gilles MARCOTTE (2000), « La place de la littérature dans les médias en notre fin de millénaire », Études françaises, volume 36, no 3, p. 149-160.

→ Textes présentés respectivement par les lecteurs critiques littéraires Jean-Marie Goulemot, Thomas Steinfeld et Gilles Marcotte lors d'une table ronde tenue à Montréal en mars 1999; réflexions sur l'inscription de la littérature dans la vie culturelle contemporaine, sur ses principaux enjeux ainsi que sur les circonstances de sa diffusion et de sa réception.

MARTEL, Réginald (1990), « Au colloque des associations d'écrivains, on dénonce la marginalisation de la littérature dans les médias [au Québec] », Écrits du Canada français, no 70, p. 152-155.

→ Propos tenus sur ce sujet lors du Colloque “Critique(s)/écrivains/lecteurs”, organisé par l'Académie canadienne-française en novembre 1989 à Mont-Rolland.

THÉRIO, Adrien (1988), « Nos grands quotidiens [montréalais] et la littérature », Ecrits du Canada français, no 64, p. 36-40.

3b) littérature et nouvelles technologies

Pas de citations ni de remarques pour l’instant…

BIBLIOGRAPHIE POTENTIELLE (littérature et autres médias)

BOUCHARDON, Serge (2008), « Le récit littéraire interactif : une valeur heuristique », Communication et langages, no 155 (mars), p. 81-97.

→ Les principes ainsi que les problèmes théoriques et pratiques liés à la conciliation de la narrativité et de l'interactivité dans le récit interactif; les composantes, les spécificités et la nature dynamique du récit littéraire interactif; l'influence sur ce dernier des tensions générées par le support numérique, à la lumière de l'étude d'un corpus de cent œuvres.

CHASSAY, Jean-François (1997), « Les technologies de la voix : espace culturel et hybridation dans “Le mal de Vienne” de Rober Racine », Voix et images, volume 22, no 3 (printemps), p. 547-556.

→ Analyse de la culture dans l'univers postindustriel dans le roman «Le mal de Vienne» de l'écrivain québécois R. Racine, à travers les “technologies de la voie” qui reviennent de manière récurrente dans ce roman (du magnétophone au téléphone en passant par la radio).

LENOBLE, Michel, Jean-Pierre LE GRAND, Derrick DE KERCKHOVE, Ginette DAIGNEAULT, Suzanne LEBLANC et Roy ASCOTT (1995), « Navigations dans le cyberespace », Spirale, no 144 (septembre-octobre), p. 22-25 et 26-29.

→ Dossier: transformations amenées par l'hyperécriture et interrogations sur la force de l'acte créatif; analyse du réseau Internet et de ses promesses de démocratie; esthétique de la cyberculture; l'hypertexte; parcours des divers courants artistiques de la modernité ayant rendu possible l'approche hypermédiatique par une succession de ruptures avec la pensée et la sensibilité classiques; étude de trois démarches parallèles, celle de Wittgenstein, V. Bush et de Kosuth ayant pressenti de nouvelles façons de concevoir l'espace et l'occupation de l'espace, par les humains et par l'information.

SAEMMER, Alexandra (2008), « Le texte résiste-t-il à l'hypermédia ? », Communication et langages, no 155 (mars), p. 63-79.

→ Méthodologie et résultats d'une enquête menée en 2006 à l'Université Lyon 2 avec 596 étudiants afin de circonscrire les tendances, les attentes et les habitudes de lecture à l'écran de ces jeunes lecteurs, et de les comparer avec la lecture sur papier; constat des problèmes de lecture générés par les dimensions graphiques, visuelles, interactives et technologiques (code de programmation) du texte numérique.

fq-equipe/medialite.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

Donate Powered by PHP Valid HTML5 Valid CSS Driven by DokuWiki