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Carl Leblanc (2006), Le personnage secondaire

FICHE DE LECTURE - ORION + POROSITÉ + PERSONNES RÉELLES

I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE

Auteur : Carl Leblanc

Titre : Le personnage secondaire

Éditeur : Boréal

Collection :

Année : 2006

Éditions ultérieures :

Désignation générique : Récit (couverture)

Autres informations :

Remerciements : « James Richard Cross n’est pas un personnage de fiction. Je peux donc le remercier. » Épigraphe : « Dans un mélodrame, l’histoire s’impose aux personnages. Dans un drame, l’histoire révèle les personnages. » (Sydney Lumet, Making Movies)

Quatrième de couverture : « Moi, cet après-midi, je me dirige vers un vieillard que tout le monde croit mort. » En été de 2001 [sic], un cinéaste québécois se rend en Angleterre pour rencontrer le personnage central de son prochain film. Un personnage bien réel : James Richard Cross, le diplomate anglais qui fut, en automne de 1970, l’un des deux otages du Front de libération du Québec. La rencontre de ce « personnage secondaire » de l’histoire du Québec se double d’un voyage dans le temps, un voyage dans les coulisses du XXe siècle en compagnie d’un de ses acteurs. Un de ceux, si nombreux, pour lesquels le script ne prévoyait pas de réplique.

Ce personnage « retrouvé » est donc aussi un temps retrouvé : l’époque trouble de la crise d’octobre, où un autre otage, le ministre Pierre Laporte, fut assassiné et où la Loi des mesures de guerre transforma momentanément Montréal en État policier. Dans cette histoire, Cross, qui croupira soixante jours dans la « prison du peuple », n’est qu’un détail et, par là, il s’approche de celui que nous sommes tous, qui compte pour peu, et qui, pourtant, est, doit être, la seule mesure de notre humanité.

Révolution. Ordre public. Contre les idées, les individus ne font jamais le poids. À moins qu’on cesse de les imaginer pour enfin, vraiment, les rencontrer.

Notice biographique de l’auteur : Carl Leblanc est cinéaste. Il a réalisé en 2004 un documentaire sur James Richard Cross, L’Otage, qui a été couronné par le prix Historia. Le personnage secondaire est son premier livre.

II - CONTENU ET THÈMES

Résumé de l’œuvre : Le récit retrace le parcours du « cinéaste » ou « documentariste », sorte d’alter ego de Carl Leblanc qui se rend en Angleterre pour rencontrer James Richard Cross à qui il a parlé de son projet de documentaire sur lui. Il s’agit d’une rencontre préparatoire avec les membres de la famille, et il passe quelques semaines là-bas, à Seaford, sur le bord de la côte. Le livre fait aussi le récit du projet de documentaire (demandes de subventions, discussions parfois difficiles avec les collègues) et relate les visites aux archives à Londres sur la Crise d’Octobre où, en 2001, elles sont rendues publiques. Il y a recréation également de l’enlèvement de Cross et de ce qui a pu se passer alors qu’il était dans la « prison du peuple »; on voit aussi quelques scènes de la vie de Cross avant son séjour à Montréal, les réactions de ses proches pendant sa détention, etc. Le « cinéaste » se remémore également lui-même, à l’âge de 7 ans, le fameux soir de l’enlèvement de Cross et s’interroge sur la part de cet événement dans l’Histoire du Québec, sur le rôle qu’a pu y jouer Cross bien malgré lui. Finalement, mentionnons qu’on retrouve parsemés à travers les chapitres les communiqués du FLQ et autres documents officiels.

Thème principal : le poids de l’Histoire sur les existences individuelles – devoir de mémoire

Description du thème principal : le « personnage secondaire » est celui qui a subi l’histoire, celui dont la vie ordinaire a été happée par la grande Histoire. Il doit par la suite vivre avec le souvenir et les soubresauts d’une mémoire qu’il n’a pas forcément sollicitée. C’est le cas de Cross (et le « documentariste » se questionne beaucoup là-dessus, sur son choix de parler de lui), mais la réflexion proposée s’étend plus largement aux questions éthiques que cela soulève. Doit-on s’intéresser à ces « personnages secondaires »? Doit-on récupérer leur mémoire avant qu’il ne soit trop tard? Etc. Certains, comme Cross, sont plus réticents à parler de leurs souvenirs, alors que d’autres, comme sa fille Susan le vivent comme une grande libération.

Quelques citations :

• Lorsque Cross demande au « Québécois » « À quoi cela peut-il bien servir? », celui-ci répond : « À montrer la précarité de nos parcours en ce monde. […] On entend parler ceux qui font l’Histoire, ceux qui la subissent sont sans voix. Vous êtes le seul qui puisse témoigner, l’autre otage est mort. » (24) De même, lorsque Cross se demande si ce film peut intéresser les gens, le cinéaste répond : « Je crois que votre expérience intime doit faire partie de l’Histoire. » (40)

• Lorsqu’il évoque le film du cinéaste sur le raid avorté de Dieppe, Cross est touché : « Il y avait vu d’anciens soldats revivre, devant la caméra, ces quelques heures durant lesquelles leur vie avait été happée par la grande Histoire, de vieux hommes, d’anciens gamins, envoyés sans aucune chance de réussite sur une plage tapissée d’obus et criblée de balles. Une orgie de personnages secondaires. » (41) ; « ces petits hommes perdus dans l’Histoire-qui-se-fait comme dans des habits trop grands pour eux » (41)/ « Hors cadre, de l’autre côté de la Manche, un millier de jeunes Canadiens, personnages secondaires de la Deuxième Guerre mondiale, gisent en terre française. » (245)

• Susan : « Personne ne va l’empêcher de prendre sa revanche sur l’Histoire qui n’a pas retenu son histoire. Tout est intact en elle. Personne ne va l’empêcher de se libérer. Les larmes qu’elle n’a pu retenir durant leur premier entretien étaient anciennes. » (142)

Thèmes secondaires : Crise d’Octobre, FLQ, enlèvement, bourreaux et victimes, violence, traumatisme, famille, mémoire.

III- CARACTÉRISATION NARRATIVE ET FORMELLE

Type de roman (ou de récit) : récit (auto)biographique fictif

Commentaire à propos du type de roman : Le récit joue sur la frontière entre réalité et fiction. Par sa mention « récit » et par la coïncidence de l’anecdote avec la réalité (Carl Leblanc a bel et bien réalisé un film sur James Richard Cross qui renvoie au livre), ce livre se place majoritairement du côté du biographique et de la vérité – même si une part de recréation (dialogues, épisodes dans la vie de Cross) est présente et donne sa touche littéraire à l’ensemble. Cependant, il s’agit d’une mystification, puisque Leblanc, en personne (et donc en dehors de tout paratexte) affirme ne pas avoir fait ce voyage préparatoire et avoir tout inventé, au point que son « Cross » n’est pas le vrai Cross et qu’il aurait aimé lui donner un autre nom… On est donc peut-être du côté d’une certaine autofiction et/ou d’une biographie fictive au sens de Dion et Fortier mais qui ne se donne pas explicitement comme telle.

Type de narration : multiple

Commentaire à propos du type de narration : La narration se déplace très allégrement et très habilement de l’autodiégétique à l’homodiégétique à l’hétérodiégétique. Ainsi, même si « le documentariste » assume en grande partie la narration et le regard, la focalisation passe aussi par les divers personnages et le « documentariste » est ainsi nommé par les autres comme un personnage.

Personnes et/ou personnages mis en scène : des personnes réelles fictionnalisées : James Richard Cross et sa famille (sa femme Barbara et sa fille Susan); Carl Leblanc.

Lieu(x) mis en scène : Angleterre (Seaford et Londres) et Montréal

Types de lieux : petit village côtier d’Angleterre, lieu de retrait(e); le Montréal des années 70 (l’appartement de Montréal-Nord où était prisonnier, la maison d’Outremont de Cross).

Date(s) ou époque(s) de l'histoire : 1970 et 2001 (le narrateur insiste sur le fait que le film s’inscrit hors du cycle des commémorations du trentième anniversaire de la Crise d’octobre).

Intergénéricité et/ou intertextualité et/ou intermédialité :

Intermédialité : Entre le récit et le cinéma. À quelques reprises, le narrateur s’interrogera sur comment rendre, par le biais des images, le drame intime qu’il veut mettre au jour. « Peut-être même que je tiens là un récit? » se demandera-t-il en revanche (voir 181-182).

Particularités stylistiques ou textuelles : Le livre est divisé en courts chapitres chapeautés d’un sous-titre chaque fois étonnement à propos qui donne de la densité à l’ensemble. La dimension littéraire de l’œuvre est indéniable, même si elle se cache sous la vérité historique.

IV- POROSITÉ

Phénomènes de porosité observés : réel/fiction; porosité des pratiques d’écriture.

Description des phénomènes observés : Comme je l’ai signalé plus haut, Leblanc, en personne, revendique la dimension totalement fictionnelle de son ouvrage. En revanche, lors de la publication, son éditeur et lui ont joué le jeu de la vérité historique. Cependant, à la lecture, on a du mal à imaginer qu’il s’agisse d’une pure fiction puisque nombre d’éléments de la réalité sont mis en scène de façon tout à fait crédible – et les échos avec le documentaire qui se veut véridique sont tout à fait convaincants (je pense par exemple à ce moment où Cross confie que, lors de sa détention, il refaisait souvent dans sa tête son parcours d’écolier; le personnage du cinéaste dit qu’il le mettra dans le film, ce qui est bien le cas). Bref, on peut lire ce livre comme un récit véridique avec une certaine part d’affabulation et de mises en scène, mais les postures d’écriture (journaliste et littérature, fiction et réel) sont mélangés. La porosité entre réel et fiction est même absolue.

V- ÉCRITURE DE LA PERSONNE RÉELLE

De quel type de personne réelle s’agit-il (écrivain, artiste, inconnu, membre de famille, personne issue d’un fait divers, etc.) ? :

Personnage de l’Histoire, mais qui a subi l’Histoire. On insiste aussi à quelques reprises sur la différence entre le vrai Cross et celui construit par et pour l’histoire : « Il sait que je tiens à montrer ce fossé entre ce qu’il est et ce qu’il symbolisait aux yeux de ses ravisseurs. » (94)

Est aussi mis en scène une sorte d’alter ego de l’auteur, mais qui s’incarne ici dans la figure de l’enquêteur, cet enquêteur qui se questionne sans cesse sur son droit à fouiller les mémoires et à les mettre au jour (voir « éthique ») : « Un nouveau siècle débute, l’inventaire du précédent s’accélère. Un de ses acteurs bien secondaires va parler. Je suis un chasseur de têtes. Il a celle de l’emploi. Mon emploi du temps, c’est le passé. Je vais en faire un film. C’est mon métier. » (17)

Comment celle-ci est-elle mise en scène (personnage principal, secondaire ; narrateur, personnage, etc.) :

Tous les personnages mis en scène sont des personnes réelles.

Commentaire sur le rapport réel/fiction : Voir « commentaire à propos du type de roman » et section « porosité »

Thématisation de l’écriture (le geste d’écrire est-il thématisé?): pas de manière significative.

Dimension éthique (telle que mise en scène dans l’œuvre et telle qu’elle peut se poser pour le lecteur) :

La dimension éthique est extrêmement importante et se décline en plusieurs volets :

1/ Figure de l’enquêteur

Elle s’incarne d’abord dans cette figure de l’enquêteur qui part à la recherche d’une mémoire et de ses traces, qui tente de la mettre au jour et qui se questionne sur son rôle et sur les limites de son rôle. • « Que va-t-il faire de leur mémoire? » se questionne le personnage de Barbara, la femme de Cross (63) • Il dira de lui-même « Je suis un prédateur » (110). • « Cher M. Cross vous auriez pu faire un effort! Cinquante-neuf jours, tout de même. Non, ça ne va pas. Ce n’est pas assez. Et je doute parfois de votre engagement réel dans le film. Cela vous intéresse-t-il encore? Si au moins vous aviez un peu de cette hargne des victimes insatisfaites. Je vois bien que vous faites votre devoir. N’importe quel documentariste rêverait d’un oublié triste, d’un abîmé de l’Histoire, d’un Indien balafré d’Amérique. Je n’ai qu’un vieillard intelligent, calme et fatigué. Je ne suis pas dupe, mais ça ne change rien. Alors j’imagine que je devrais me contenter d’avoir retrouvé la trace d’un homme? Donner le premier rôle à un personnage secondaire de l’Histoire. Tu parles. » (185) • « Nous montons la première séquence. Je voudrais bien faire plus que raconter un fait divers du XXe siècle, un accident d’auto, une erreur… Je voudrais qu’il y ait du sens. Mais il n’y a qu’une petite histoire sans personnages principaux. Ah! Le sens! Ce petit bout de Dieu qu’on aime tant sucer. » (243)

2/ Devoir de mémoire

Réflexion, également, à propos du devoir de mémoire, du rôle du témoin, de la mince frontière entre mémoire et histoire, passé et présent : « Cross n’a pas le charme humble des victimes télévisées. Il n’est pas de ceux qui doivent être pris en charge par des sociologues justiciers. Il n’a pas beaucoup de qualités médiatiques. Et je rêve de dire quelque chose d’irréfutable. De définitif. Or, la seule chose d’irréfutable, c’est qu’il n’y a rien de définitif tant qu’il y a de la vie. L’Histoire, n’est-ce pas quand tout le monde est mort? Tant qu’il y a de la vie, des révélations indiscutables nous sont promises. Il y a des histoires, pas encore l’Histoire. Avec la mort des acteurs, quelque chose ne se fige-t-il pas? Plus personne ne peut dire “j’y étais” et venir mêler les cartes. Le temps est “passé”. Tout se dématérialise, tout s’objective…. Une science historique. Le Graal des humanités. Mais, même dans le silence des morts, s’élèvent toujours des voix. De vrais et de faux experts qui disent : “Il pensait que…”, “Elle voulait que…”, “Jamais il n’aurait pu…” Et l’Histoire qu’on était sur le point d’attraper, coule, son image se diffracte. Ainsi cohabitent l’Histoire espérée et les histoires révélées. Dès lors, le mieux que l’on puisse faire, c’est de le reconnaître [89 :] et d’exposer la complexité. […] Dans tous les pays il y a un peu d’Histoire et beaucoup d’histoires. Et je ne ferai qu’en ajouter une. » (88-89)

Dans la foulée, Leblanc constate l’intransigeance de l’Histoire. Si Cross est un personnage secondaire, quelqu’un que l’histoire ne retient pas vraiment, c’est qu’il n’est pas mort – mais cela ne rend pas – et c’est toute la base de l’argumentaire de Leblanc – ses souffrances moins importantes : « En ne mourant pas, Cross était disqualifié. Et cette inélégante survie rendait son histoire mortellement secondaire… » (128) /« L’histoire politique est la marche des éveillés entraînant les endormis. Pourquoi n’y vois-je que la victoire des tonitruants sur les chuchotants? » (129) / « Une histoire qui ne fera pas le poids de l’Histoire. » (180)

3/ Aspect culturel

De même, la dimension éthique se pose dans son aspect culturel; il s’agit à la fois d’un épisode traumatique pour le Québec, mais d’un des seuls moments où l’Histoire a frappé à sa porte. Qui plus est, la figure de Cross n’intéresse sans doute pas les Québécois, se dit Leblanc, autrement que comme le symbole qu’il fut (ou qu’on croyait qu’il était) à l’époque :

« La mémoire des peuples est-elle aussi sélective que celle des individus? Est-ce par gêne que les Québécois ne se sont jamais intéressés à ce qu’était devenu, à ce qu’avait vécu cet étranger désigné pour expier le mal colonial? Que répondrais-je si quelqu’un me demandait ce que je vais faire en Angleterre? Que je suis un enquêteur bien inefficace qui vient recueillir, trente ans après les faits, la déposition d’une victime? » (16)

« Comment filme-t-on un vieillard qui se souvient? Comment sort-on un squelette du placard national? […] Je dois être l’arpenteur minutieux de son décor, de ses lieux, de ses gestes, de son présent qui me servira de tremplin. […] Comme dans les Mafia Stories, ce serait donc l’histoire de ‘celui qu’on croyait mort’ et ‘qui va parler’ et qui est dangereux pour tous ceux dont la version de l’Histoire se nourrit de silence. Ceux qui ont des plaques d’immatriculation où on peut lire : “Je ne veux pas me souvenir”. De l’autre côté du pays, la réapparition de Cross a ravivé l’intérêt de nombreux journalistes anglophones alertés par la rumeur. Pour les Canadiens anglais, la crise d’Octobre a été l’un des traumatismes fondateurs de leur unité sentimentale; un repoussoir fédérateur. Elle a cristallisé l’image idéale du nationalisme québécois qu’ils rejettent comme une menace anachronique et irrationnelle. J’interroge donc cet après-midi un témoin gênant pour les uns, héroïque pour les autres. Que je le veuille ou non, être ici, c’est prendre parti. » (83)

Leblanc fait cavalier seul, contre sa mémoire collective :

« Que puis-je affirmer d’autre? Que je vais tourner un documentaire sur ce vieil homme un peu contre la mémoire de mes concitoyens? Que je vais faire un film antirévolutionnaire? Qu’il est délicat de se préoccuper d’un vieillard lorsque tant de destins sont abîmées, là ce soir, aujourd’hui, ailleurs, partout?… Qu’il est illusoire de penser faire un grand film quand son personnage est si secondaire, quand son pays est si secondaire, quand sa douleur est si secondaire, quand le passé ne semble jamais faire le poids? » (121)

Laporte aussi aurait été une mauvaise cible (194).

Leblanc se questionne sur la pertinence de sa démarche : « J’ai parfois l’impression d’être plus fâché que lui, plus découragé, plus choqué. Suis-je venu moi-même expier la faute de mes compatriotes? Ce serait ridicule, mais ce n’est pas exclu. » (194) Faire le documentaire revient à prendre parti :

« Les premières images défilent sous mes yeux. Son histoire commence à exister sur l’écran. J’ai choisi mon camp. Le sien. Contre les miens qui ont fait cela, contre les miens qui ont cru à l’Histoire comme on fait confiance aux panneaux de signalisation. » (243)

4/ Nature de l’enlèvement

Plusieurs insistent sur le fait que Cross a été bien traité, qu’il n’est pas mort et que, se faisant, il n’est pas tellement victime de ce qui est arrivé : « Puis nous allions changer de millénaire, l’enlèvement ‘civilisé’ aurait bientôt le même cachet que les vieilles baignoires sur pattes. » (54) Cela frappe Leblanc avec beaucoup de force lorsqu’arrive le 11 septembre : « Et, au milieu des corps désintégrés de Ground Zero, un kidnapping vieux de trente ans a bel et bien acquis l’élégance d’un acte décent…. Les ravisseurs de Jasper seront les premiers à être d’accord. Mon film est-il rendu caduc par l’inflation warholienne des appétits destructeurs? On vient d’empiler trois mille cadavres sur celui de Laporte. Et Jasper est un personnage toujours vivant, ce qui le rend encore plus secondaire. » (198) La question éthique se pose donc à savoir si certains traumatismes, certains actes violents ont des degrés selon lesquels ils sont plus ou moins acceptables.

Pertinence dans le cadre d’une recherche sur la personne réelle :

Cette lecture et cette fiche ont été faites dans le cadre de la journée d’étude « Expériences du temps, de la mémoire et de l’histoire dans les écritures contemporaines » où Carl Leblanc était invité comme participant à la table ronde. La pertinence de cette œuvre dans le cadre d’une recherche sur la personne réelle est indéniable. Robert a déjà, d’ailleurs, travaillé sur cette œuvre dans un article paru dans Voix et Images : http://www.erudit.org.proxy.bibliotheques.uqam.ca:2048/revue/vi/2015/v41/n1/1033961ar.html Il s’agissait d’une analyse comparative avec La constellation du Lynx. Dans le cadre de la recherche sur la personne réelle, c’est bien sûr la dimension éthique de l’œuvre et le jeu sur les frontières entre fiction et réalité qui rendent cette œuvre si pertinente.

Autres commentaires : Remarques sur le XXe siècle : « Vu d’ici, de ce musée, le XXe siècle, plus que les autres, est une fabrique de slogans. » (137) « Le personnage secondaire ne peut pas faire un blockbuster. » (138) L’Histoire comme « superprésent » : « C’est normal, l’Histoire, quand elle survient, est ce superprésent dont on ne nous a jamais parlé. Avec les autres survivants, il [le jeune Cross] court vers la sortie, à moitié aveugle, momentanément sourd. Des cris, des larmes, du sang…. c’est bel et bien l’Histoire en bleu de travail. » (164)

Auteur(e) de la fiche : Manon Auger

fq-equipe/leblanc_carl_2006_le_personnage_secondaire.1467155881.txt.gz · Dernière modification : 2018/02/15 13:56 (modification externe)

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