Outils pour utilisateurs

Outils du site


fq-equipe:kafka_par_pawel

FICHE DE LECTURE

INFORMATIONS PARATEXTUELLES

Auteur : Ernst Pawel Titre : Franz Kafka ou le Cauchemar de la raison Lieu : Paris Édition : Seuil Année : 1988 Pages : 478 p. Cote UQAM : PT2621A26Z814 Désignation générique : Biographie

Bibliographie de l’auteur : Theodor Herzl ou le Labyrinthe de l’exil, Paris : Seuil, 1992, 523 p.

Biographé : Franz Kafka

Quatrième de couverture : aucun

Préface : Remerciements du biographe, d’abord à Max Brod pour avoir sauvé l’œuvre de Kafka de la destruction, puis à divers collaborateurs qui l’ont aidé à mener ce projet jusqu’au bout.

Rabats : aucun

Autres (note, épigraphe, photographie, etc.) : Juste après la préface se trouve une carte de « La vieille ville de Prague au tournant du siècle », sur laquelle sont numérotés les lieux significatifs dans la vie et l’œuvre de Kafka.

LES RELATIONS (INSTANCES EXTRA ET INTRATEXTUELLES) :

Auteur/narrateur : Aucune confusion possible, c’est Pawel qui prend la parole tout au long du récit et son point de vue est toujours extérieur à l’histoire.

Narrateur/personnage : Pawel ne se met jamais en scène aux côtés de Kafka. Son discours est très historique et très peu imaginatif.

Biographe/biographé : Pawel voue une admiration évidente à Kafka, regarde d’en bas, celui qu’il place tout en haut d’un piédestal. Le biographe tente d’expliquer, en répertoriant toutes les expériences qui ont pu être significatives dans la vie de l’écrivain, comment celui-ci a réussi le tour de force de produire une œuvre aussi clairvoyante et intemporelle. La recherche qui sous-tend le propos ne peut que dénoter un intérêt hors du commun non seulement envers l’œuvre, mais aussi envers tout ce qui concerne de près ou de loin la vie de Kafka, de la misère de ses ancêtres à la maladie qui l’a affecté, en passant par les traumatismes subis dans l’enfance, à l’école et à la maison. La curiosité de Pawel à l’égard de Kafka semble n’avoir de limite que celle qu’il ne peut franchir : la mort de son biographé, qui ne peut lui en apprendre davantage que ce qui est déjà connu. Autres relations : Très nombreux emprunts aux différents admirateurs de l’œuvre de Kafka qui ont déjà publié des biographies de cet écrivain. Il ne fait pas que se servir de leurs écrits comme d’une archive supplémentaire pour reconstituer la vie de Kafka, mais il amorce avec eux un dialogue concernant certains faits qu’il serait possible de déduire en scrutant attentivement tous les documents produits par Kafka au cours de sa vie.

L’ORGANISATION TEXTUELLE

Synopsis : L’œuvre consiste en une explication des différents paradoxes concernant la vie et l’œuvre de Kafka. On a donc droit à une reconstitution de sa généalogie à partir de ses grands-parents pour ainsi mieux comprendre le milieu familial dans lequel il a grandi, dont la relation assez malsaine qu’il entretenait avec ses parents. Pawel fait ensuite une très vaste mise en situation sociale en parlant des différentes classes qu’on retrouvait dans la société pragoise du début du siècle (tchèques, allemands, juifs, bourgeoisie, pauvres, etc) puis des diverses confrontations entre groupes religieux, qui ont dégénéré vers l’antisémitisme et les massacres que l’on connaît. Le biographe passe ensuite à la vie scolaire de Kafka, s’intéressant autant aux enseignants qui l’ont influencés qu’aux camarades qui vont le suivre et l’épauler durant sa courte vie, dont Max Brod à qui il confiera la charge de détruire la presque totalité de ses œuvres, ainsi qu’aux manifestations culturelles auxquelles Kafka va assiter; Pawel s’intéresse également beaucoup aux relations amoureuses tordues de Kafka, toutes choses qui semblent selon lui avoir grandement influencé son œuvre puisqu’il fait sans cesse des parallèles entre la vie et l’œuvre de Kafka. La maladie occupe également une place importante dans le récit, puisqu’elle semble donner une explication somatique aux troubles de Kafka, autant en ce qui concerne sa vie que ses écrits.

Ancrage référentiel : Très important, ce dont témoigne une bibliographie de 5 pages à la fin du volume et de nombreuses citations tirées de correspondances de Kafka et de diverses études concernant sa vie et son oeuvre. Très nombreuses références à d’autres biographies de Kafka (Brod, Janouch, Marthe Robert, etc). Pawel énonce aussi parfois directement la présence de ses sources qui sous-tendent le propos : « La première idylle de Kafka sur laquelle nous avons des documents eut lieu dans sa dix-septième année (…). » p. 92. Écritures basée sur des « témoignages » (p. 153). Parle de l’archive comme d’un gage de vérité : « C’est grâce aux archives de son organisation [Karel Slavicek], constituées avec un soin maniaque et scrupuleusement conservées par des successeurs aussi zélés que lui, que l’on peut, sans risque de se tromper, enterrer l’un des grands mythes attachés à la personne de Kafka. » p. 161. La présence de l’archive est partout, sans compter celle de l’œuvre, à laquelle Pawel se réfère constamment.

Indices de fiction : Assez peu. Même lorsqu’il s’éloigne de la réalité des faits connaissables, il l’avoue immédiatement : « Nous n’avons aucun moyen de suivre l’évolution de cette prise de conscience dans l’esprit de Kafka (…). » p. 66. Plus loin, Pawel va remettre en question le témoignage d’un proche ami de Kafka, Hugo Bergmann, alors que lui n’a pas accès directement à la réalité des faits mentionnés par Bergmann dans ses mémoires: « Dans ces conditions, un éloignement progressif entre Kafka et Bergmann devenais inévitable, et cela commença probablement vers 1898, bien que Bergmann, dans ses Souvenirs, l’ait situé plus tard [1900-1901]. » p. 75. Pawel dira pourtant un peu plus loin que « Bergmann n’en reste pas moins l’unique informateur fiable sur les jeunes années de Kafka. » (p. 77), alors qu’il vient justement de mettre en doute les faits énoncés par Bergmann. Il arrive même à Pawel de mettre en doute ses propres affirmations : « Si tel fut le cas, cela n’est mentionné nulle part (…). » p. 150

Rapports vie-œuvre : Que ça! Il est évident que toutes les informations qu’amène Pawel à propos de la vie de Kafka et du contexte socio-historique et politique veulent servir à mieux comprendre son œuvre et à mieux cerner de quelle manière elle s’est construite : darwinisme acquis par le professeur Gottwald (p. 84), influence de la prose « légale » sur les écrits futurs (p.133). De façon plus ciblée, les éléments autobiographiques mis au jour dans L’Amérique, Felice Bauer inspirant Le Procès, écriture du Verdict qui suivit de peu la rédaction d’une importante lettre à Felice, le lien entre la relation de Kafka et Milena Jesenska et de nombreuses nouvelles, etc. Plus globalement, comment la conception de la vie de Kafka a déterminé sa conception et sa pratique de l’écriture. Pawel jette un regard critique sur la pratique courante de la biographie et sur ce qu’il aurait pu être tenté de faire bien inutilement : « Dépister les sources d’inspiration dans l’œuvre de Kafka sans omettre les éléments secondaires, peut être passionnant comme un jeu de salon, mais n’apporte pas grand-chose. Au-delà du fait, indiscutable, que Kafka a été la somme de ses expériences vécues et que les livres qu’il a lus font partie intégrante de ses expériences, il existe un piège pour les prétentieux ou les ignorants. On ne sait jamais ce que l’inconscient créateur va retenir pour le transformer en œuvre d’art car il n’obéit qu’à sa logique; l’exercice académique consistant à détecter chez Kafka des traces de Kleist, de Dickens ou de Kierkegaard est aussi stérile que celui qui consisterait à ramener les personnages de ses histoires à leurs inspirateurs dans la vie réelle. » (p. 169)

Thématisation de l’écriture et de la lecture : Extrait du journal de Kafka qui parle de son désir d’écrire et aussi de son incapacité à assumer entièrement ce qu’il considère comme une vocation (p. 103). Plusieurs remarques de Pawel, mais aussi de Kafka lui-même dans ses écrits intimes sur l’angoisse face à l’écriture, sur la nécessité d’une routine, d’un temps consacré exclusivement à la pratique de l’écriture. Sur la singularité de l’écriture de Kafka : « Ce qui compte plus, dans son cas, ce sont les premières manifestations de son authentique originalité (…) » (p. 170) donc l’étude de ses premiers écrits.

Thématisation de la biographie : Pawel parle plutôt d’ « hagiographie » en ce qui concerne Kafka (p. 76). Quelques remarques sur la constitution des autres biographies de Kafka, dont celle de Brod qui est probablement la plus connue et reconnue (p. 122). Pawel note l’intense curiosité de Kafka « pour les faits de la vie des autres. Ce qui semble l’avoir fasciné plus que tout, ce sont les récits des vies des gens célèbres ou infâmes, les biographies des hommes de lettres avec tous les détails intimes et non expurgés, le vivier des pensées élevées et de banales accumulations, le bric-à-brac et les vétilles qui fermentent dans les gigantesques biographies, les autobiographies, les journaux, les carnets et les correspondances qui ont toujours constitué ses lectures favorites. Que lui apportaient-elles, à lui qui plaçait sa foi dans le mot plus que dans les choses, sinon la preuve qu’il y avait des gens capables de vivre leur vie, de mettre un pied devant l’autre et de progresser à leur rythme de la naissance à la mort. Pour quelqu’un qui était souvent paralysé par la peur et l’indécision, cela doit avoir été d’un certain réconfort. » (p. 169) On peut déduire que Pawel parle ici également de sa propre relation à la biographie.

Topoï : judéité, angoisse de l’écriture, la famille, la maladie, la lucidité, la souffrance.

Hybridation : Biographie et enquête.

Différenciation :

Transposition :

Autres remarques : Sur problèmes de traduction des œuvres de Kafka : « En allemand, les nombreuses connotations du mot Prozess, qui implique à la fois les notions de processus et de procès, n’ont pas de véritable équivalent en anglais ou en français. Et bien qu’il n’existe pas d’autre possibilité que le compromis généralement adopté, ce terme montre bien les difficultés particulières, et souvent insolubles, que présente la traduction de cette prose simple et classique mais d’une grande densité, même quand il s’agit d’experts. » p. 335

LA LECTURE

Pacte de lecture : Pawel invite à une relecture de l’œuvre de Kafka à la lumière d’éléments méconnus de son histoire et de sa vie quotidienne.

Attitude de lecture : L’aspect imaginaire n’occupe pas une grande place, Pawel s’attardant plutôt à revisiter ce qui a pu constituer l’imaginaire de Kafka qu’à se servir de son propre imaginaire afin de nous faire connaître sous un autre angle le biographé. Ce qui ressort le plus est vraiment la très grande quantité de documents qui ont servi à constituer cette biographie, qui peut même être assommante par moment tellement on se sent écrasé par toutes ces informations, qui s’avère souvent d’un intérêt discutable, non nécessaire à la compréhension de la vie de Kafka et du propos de Pawel. Biographie tout de même très sobre, qui s’attache à dépeindre la plus fidèlement possible ce qu’on peut connaître de la vie et de l’œuvre de Kafka.

Lecteur/lectrice : Catherine Dalpé

fq-equipe/kafka_par_pawel.txt · Dernière modification : 2018/02/15 13:57 de 127.0.0.1

Donate Powered by PHP Valid HTML5 Valid CSS Driven by DokuWiki