Notice bibliographique : JAUFFRET, Régis, //Tibère et Marjorie//, Paris, Éditions du Seuil, 2010, 294 p. Résumé de l’œuvre : Tibère et Marjorie forment un couple depuis une dizaine d’années. Subitement, Marjorie annonce à son conjoint qu’elle veut le quitter et ne veut plus le voir, parce qu’elle l’aime trop. Tibère, un peu confus, refuse de partir ainsi. Ils retournent à leur appartement, où une bagarre se déclenche. Commence alors une très longue nuit. Marjorie se brûle la main et doit être portée à l’hôpital duquel elle se sauve alors qu’elle a encore un soluté de planté dans le bras. Elle tombe sur le ministre des Affaires étrangères, Gauthier Volvic, ancien médecin, qui lui retire la perfusion. Il la raccompagne et s’attache inexplicablement à elle. Au cours de la nuit, il revient plusieurs fois à l’appartement du couple, obsédé par l’idée de la revoir. Tibère et Marjorie, eux, réfléchissent et parlent de leur couple. Ils n’ont pas fait l’amour depuis un an et demi, car Marjorie a développé une phobie du sexe masculin. Elle collectionne toutefois les jouets sexuels, ce qui rend Tibère jaloux. Les deux se questionnent sur la profondeur de leur amour. Un accident a soudainement lieu dans l’immeuble, entrainant la mort du voisin d’en dessous et déclenchant une enquête. Le couple, inquiet, se sauve. Le lendemain, ils vont chez Séphora, la sœur de Marjorie, pour lui demander d’héberger Tibère pour un moment. L’enquêteur et le ministre les retrouvent à cet endroit et la voisine devenue veuve les y rejoint. Au cours de la soirée, tout le monde devient très soul. Puisque le ministre apparait comme un suspect dans l’accident à cause de ses allées et venues de la soirée près de l’immeuble, le président de la France se lance à sa recherche et le trouve chez Séphora. Étourdi par les vapeur d'alcool, il s'endort lui-aussi. Le lendemain, au réveil de tous, le ministre est mort d’un coma éthylique, la veuve est également décédée et Marjorie décide de quitter Tibère pour de bon, car finalement elle l’aime vraiment trop. Narration : Hétérodiégétique Explication : Le narrateur est omniscient et raconte à la troisième personne. Cette narration ne présent pas de grande particularités. Personnage(s) en rupture : Marjorie A) Nature de la rupture : Interprétative et Actionnelle Explication : Marjorie est une femme désorientée et contradictoire, qui ne peut pas être seule, mais qui est incapable de se laisser approcher, car elle interprète mal les actions et les dires des gens qui l’entourent. Elle leur prête tous de mauvaises intentions, surtout aux hommes. Lorsqu’elle était transportée dans une salle de l’hôpital pour y être soignée, elle « se demandait si elle n’avait pas été enlevée par un maniaque qui allait l’entraîner dans une salle d’opération désaffectée et la violer après l’avoir endormie d’une injection de penthotal (p. 35). » Elle résume beaucoup les hommes à leur sexe et est convaincue qu’ils ne veulent que son corps. Ces interprétations faussées la poussent à agir ensuite de façon déconnectée, comme lorsqu’elle se rend à la Closerie des Lilas avec un soluté dans le bras, en trainant son pied à perfusion ou qu’elle enlève sa culotte devant le ministre pour lui présenter à son tour son sexe. Selon Tibère : « Elle avait peut-être une douzaine de petits cerveaux comprimés dans son crâne, qui réfléchissaient chacun dans son coin, et lui conféraient une personnalité cacophonique. » (p. 67) « Elle ne l’étonnait jamais, il savait que ses neurones étaient connectés entre eux par un réseau de synapses beaucoup plus complexe que le sien. Cette organisation lui conférait une personnalité qui n’était pas seulement réversible, mais protéiforme, aléatoire […] » (p. 63-64) B) Origine de la rupture : Mondaine, Actorielle Explication : Le décalage de Marjorie provient surtout de son malaise en société et de sa difficulté à avoir un rapport avec les hommes. Elle-même semble être obsédée par son corps (elle est anorexique) et s’imagine que tout le monde partage cette obsession. Marjorie est une femme très centrée sur elle-même, mais les raisons qui la font agir et penser bizarrement ne sont pas claires. Elle a également de la difficulté à assumer son rôle de mère « il n’avait jamais entendu parler d’une mère à ce point peu mère. » (p. 57) Elle ne veut pas non plus être une amoureuse pour Tibère à cause de l’aspect sexuel d’une relation de couple. C) Manifestations : Affective Explication : La rupture de Marjorie lui cause des problèmes affectifs. Plusieurs fois au cours du roman, elle réévalue son amour pour Tibère. Lorsqu’elle sent qu’elle l’aime moins, elle accepte de rester avec lui, mais si elle a l’impression d’être très amoureuse, elle le supplie de quitter l’appartement. Son rapport à la sexualité est également déconnecté de la réalité. Elle considère le sexe masculin comme un danger, comme une bête qui se réveille parfois et pourrait la tuer. Elle s’imagine que le ministre des Affaires étrangères a voulu la violer, alors qu’il lui a simplement parlé. À son départ, elle nettoie tout le salon par peur de tomber enceinte : « elle pensait aussi qu’il avait sans bruit vaporisé un nuage de spermatozoïdes dans l’appartement. » (p. 125)