Table des matières

FICHE DE LECTURE

I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE

Auteur : Schwartz, Violaine

Titre : Le Vent dans la bouche

Éditeur : P.O.L.

Collection : -

Année : 2013

Éditions ultérieures : -

Désignation générique : roman (couverture)

Quatrième de couverture : “Fermez vos gueules, j'ouvre la mienne !”

II- CONTENU GÉNÉRAL

Résumé de l’œuvre :

La narratrice du roman, madame Pervenche, est la présidente d'une association qui milite pour que la tombe de Fréhel (célèbre chanteuse française de l'entre-deux-guerres) soit déplacée du cimetière de Pantin à celui de Montmartre, où plus de gens iront se recueillir. À travers le récit un peu pathétique des fréquentes allées et venues de madame Pervenche au cimetière pour se recueillir sur la tombe de la chanteuse et des lettres quotidiennes qu'elle écrit au président français, on apprend l'essentiel de la vie de Fréhel. C'est que madame Pervenche est la seule membre de son association qui ne soit pas (encore) grabataire et sénile. Elle se voit donc investie de la mission sacrée de défendre Fréhel contre l'oubli, mais son admiration pour la chanteuse est tellement forte qu'elle s'identifie complètement à elle, au point de parler de Fréhel autant à la troisième qu'à la première personne, comme elle l'explique ici: « Je me suis rendue à l'évidence. Elle était rentrée dans ma tête, elle s'était faufilée à l'intérieur, la nuit pendant mon sommeil, comme un ver dans une pomme, ou un perce-oreille, ou une tumeur, ou un virus, ou la gale. Maintenant, je m'y suis habituée. Je ne lutte plus comme quand je tapais dans les murs, quand j'essayais […] de la faire taire […] . J'attends que ça passe, les yeux plantés dans mon rideau à guetter les couleurs du matin.“

Thème(s) : Chanson, musique, décadence, luxure, fanatisme, vieillesse.

III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION

Explication (intuitive mais argumentée) du choix :

Ce qui est intéressant dans ce roman, ce sont les frontières entre les personnages qui sont perturbées par le fanatisme de la narratrice. En effet, madame Pervenche répète souvent “Fréhel, c'est moi” et, quand elle raconte à la première personne du singulier, elle est plus souvent Fréhel qu'elle-même: “J'ai vingt ans, le Tout-Paris au creux de la main et Maurice Chevalier dans la peau. Toutes les nuits, je prends un nouvel amant pour le faire enrager. Le faire bander de rage. Pour m'en protéger. C'est moi qui commande. C'est moi la vedette. C'est moi la présidente. On boit comme des trous, on respire de l'éther, on regarde nos pensées se déployer à l'infini dans l'air confiné de la chambre.” (70, j'ai mis en italique la petite partie où Madame Pervenche parle brièvement d'elle-même; ceci dit, la plupart du temps, les segments où elle est elle et non l'autre sont plus étendus et plus distincts qu'ici)

Et, plus normalement, quand madame Pervenche parle d'elle-même, parle de Fréhel à la troisième personne: “Je rédigerai l'histoire de sa vie, je finirai par y arriver, et tout à coup on ne parlera plus que d'elle. De nouveau, comme avant, sa vie en grosses lettres, étalée dans les journaux: L'inoubliable oubliée. Il y aura un film à gros budget, comme pour Édith Piaf, pourquoi Édith Piaf et pas elle ?” (27)

Appréciation globale :

Lecture agréable, une voix puissante. Ça fait changement de l'errant dépressif qui se questionne sur le pourquoi du comment.

IV – TYPE DE RUPTURE

Validation du cas au point de vue de la rupture

a) actionnelle :

Motivation et intention: Toutes les actions de la narratrice, sans exception, sont posées en fonction de réhabiliter Fréhel dans la mémoire collective. On s'en doute, ce fanatisme qui frise plus souvent qu'autrement la folie la pousse à agir de manière inconsidérée, tout étant justifié pour “sauver” la chanteuse.

Il n'y a pas vraiment d'intrigue dans ce roman puisqu'on ne sait jamais si les démarches que la narratrice fait en vue de rapatrier à Montmartre la tombe de Fréhel ont ou non du succès. Deux péripéties, somme toute mineures: quand madame Pervenche manque de se faire frapper sur son vélo en bordure de l'autoroute et quand elle éloigne à coup de cailloux un visiteur venu déposer des fleurs même pas belles sur sa tombe de Fréhel.

b) interprétative :

Évidemment, le fanatisme de madame Pervenche perturbe sa capacité à donner sens au monde puisqu'elle ne vit plus que pour préserver la mémoire de Fréhel (excentricité interprétative, donc), mais il me semble que ce n'est pas l'aspect le plus important en ce qui concerne le personnage de ce roman. Et puis, sa quête a un petit je ne sais quoi de noble, sa folie un je ne sais quoi d'attachant…

V – SPÉCIFICITÉS POÉTIQUES

C'est surtout la voix narrative qui est particulière, et je pense l'avoir bien montré dans les sections II et III.