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I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE

Auteur : Patrick Modiano

Titre : Accident nocturne

Éditeur : Gallimard

Année : 2003

Désignation générique : Roman

Quatrième de couverture : «Quelle structure familiale avez-vous connue? J’avais répondu : aucune. Gardez-vous une image forte de votre père et de votre mère? J’avais répondu : nébuleuse. Vous jugez-vous comme un bon fils (ou fille)? Je n’ai jamais été un fils. Dans les études que vous avez entreprises, cherchez-vous à conserver l’estime de vos parents et à vous conformer à votre milieu social? Pas d’études. Pas de parents. Pas de milieu social. Préférez-vous faire la révolution ou contempler un beau paysage? Contempler un beau paysage. Que préférez-vous? La profondeur du tourment ou la légèreté du bonheur? La légèreté du bonheur. Voulez-vous changer la vie ou bien retrouver une harmonie perdue? Retrouver une harmonie perdue.»

II- CONTENU GÉNÉRAL

Résumé de l’œuvre : Le narrateur se rappelle un évènement de sa vie : une voiture qui l’a renversé lorsqu’il était au début de la vingtaine et où une femme, Jacqueline Beausergent, s’est avérée être la conductrice. Le narrateur est interné une dizaine de jours (blessé à un pied), et lorsqu’il retrouve sa vie normale, l’impression floue d’être à un tournent de sa vie l’assaille. Tout en racontant à rebours sa recherche de Jacqueline Beausergent et de sa voiture «vert d’eau», il se rappelle des bribes incertaines de souvenirs : les rencontres avec Bouvière, un professeur de philosophie qui tenait des petites réunions dans lesquelles il expliquait ses pensées à des étudiants avides de ses paroles, les rencontres avec son père dans des cafés qui suivaient un trajet précis dans la ville, des souvenirs d’enfance plus ou moins heureux, des lieux, des personnes, un chien, un autre accident comme celui qui vient de lui arriver, mais une quinzaine d’années plus tôt, etc. Finalement, il retrouve Jacqueline Beausergent dans un commerce qui semble abandonné. Il semble que les personnages aient des projets d’avenir ensemble. Elle aussi l’a cherché après l’accident.

Thème(s) : Enfance, imprécision des souvenirs, absence des parents, grandeur de Paris, convergence et étrangeté du temps, l’odeur de l’éther.

III – JUSTIFICATION DE LA SÉLECTION

Explication (intuitive mais argumentée) du choix : Patrick Modiano est l’auteur de L’Horizon et de Dora Bruder, deux œuvres dans lesquelles il est intéressant de se pencher sur le personnage, pour ce qui nous intéresse. Je me suis dit qu’il serait pertinent de faire des fiches sur quelques œuvres du même auteur publiées après 2000.

Appréciation globale : Lecture agréable, un peu dans le même genre que L’Horizon.

IV – TYPE DE RUPTURE

A) Rupture actionnelle : Le personnage agit : il tente de retrouver Jacqueline Beausergent. Par contre, il a souvent de la difficulté à comprendre ses propres gestes ou paroles. De plus, lorsqu’il ne cherche pas Jacqueline dans la ville, ses actions sont étranges, un peu inconsistantes. Il se trouve souvent incapable de demander de l’aide (de l’argent à son père, par exemple) ou de s’affirmer. À certains moments, le narrateur semble ne même pas vouloir agir sur le monde.

« Il suffisait peut-être de demander à ce type, sur la banquette, de nous laisser partir. Mais je me sentais incapable de prononcer la moindre parole.» (p.11)

«Je crois que si je m’étais avancé à leur table, ils ne m’auraient pas vu et, si je leur avais adressé la parole, ils n’auraient même pas entendu le son de ma voix. J’essayais de m’attacher à des détails concrets.» (p.81) «Il faut laisser les gens vivre leur vie. Voyons, je n’allais quand même pas sonner chez Geneviève Dalame à l’improviste…» (p.95)

«Il faut attendre que les autres viennent à vous d’un mouvement naturel. Pas de gestes trop brusques. Rester immobile et silencieux et se fondre dans le décor. Je m’asseyais toujours à la table la plus retirée. Et j’attendais.» (p.97)

«Je lui ai dit que je plaisantais, mais je n’en étais pas sûr.» (p.139)

B) Rupture interprétative : Le narrateur est plongé dans un flux de souvenirs brouillés, dans des images incertaines qui lui reviennent de façon confuse. Il n’est jamais certain de ce qui s’est réellement passé, et ne tente rien, mis à part la narration, pour retrouver une image claire du passé. Il est plongé dans une faille spatio-temporelle dans laquelle les choses perdues sont parfois presque retrouvées. On a l’impression d’un univers spatio-temporel trop vaste, trop changeant, pour être compris. Il est parfois prisonnier de la loi de l’éternel-retour, mais cela reste nébuleux. Puis, le narrateur n’a pas vraiment d’opinion sur lui-même ou le monde. Finalement, il confond les lieux et les moments de son existence.

Il perd une chaussure lors de l’accident, mais quelques pages plus loin, il dit : «Et à ceux qui voudraient en savoir plus sur cet objet, je répondrais que c’était la seule chose que mes parents m’avaient léguée; oui, aussi loin que je remontais dans mes souvenirs, j’avais toujours marché avec une seule chaussure. À cette pensée, j’ai fermé les yeux et le sommeil est venu dans un fou rire silencieux.» (p.21)

«Les mêmes situations, les mêmes visages reviennent, et l’on dirait les fragments de verre coloriés des kaléidoscopes, avec ce jeu de miroir qui donne l’illusion que les combinaisons peuvent varier jusqu’à l’infini. Mais elles sont plutôt limitées, les combinaisons.» (p.29)

«J’étais déçu à la perspective qu’elle demeurerait un mystère, parmi tant d’autres mots et tant de visages surpris un instant et qui brilleront dans votre mémoire d’un scintillement d’étoile lointaine, avant de s’éteindre le jour de votre mort, sans avoir livré leur secret.» (p.42)

«[J]’ai été saisi d’une panique. J’avais l’impression de me fondre dans ce brouillard qui annonçait la neige. […] J’essayais de m’accrocher à de petits détails concrets.» (p.52)

«Tout se confond dans ma mémoire pour la période qui a précédé l’accident. Les jours se succédaient dans une lumière incertaine.» (p.59)

«Le malaise est toujours là. Ou plutôt, la sensation de glisser dans un monde parallèle, en dehors du temps. Il suffit que je longe cette rue et je me rends compte que le passé est définitivement révolu sans que je sache très bien dans quel présent je vis.» (p.79)

«[J]’avais eu le sentiment que je n’étais issu de rien.» (p.116)

V – SPÉCIFICITÉS POÉTIQUES

Narrateur autodiégétique.

Souvent, pour se définir ou pour s’exprimer sur une situation, des mots sont placés entre guillemets, comme si le narrateur était incapable d’avoir sa propre idée sur les choses et qu’il se contentait de rapporter des paroles. Par exemple : «pansements» (p.27), «compte rendu» (p.27), «voyou» (p.76), etc.

Le narrateur soulève plusieurs questionnements, au fil du texte. Des questions sont posées, mais la réponse reste évasive, inexistante. Par exemple : « Comment un homme peut-il changer à ce point selon qu’il se trouve à Pigalle ou à Denfert-Rochereau? J’avais toujours été très sensible aux mystères de Paris.» (p.38)

ranx/accident_nocturne.1431718568.txt.gz · Dernière modification : 2018/02/15 13:56 (modification externe)

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