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FICHE DE LECTURE
INFORMATIONS PARATEXTUELLES
Auteur : Jacques CHESSEX Titre : Le rêve de Voltaire Lieu : Paris Édition : Grasset Année : 1995 Pages : 105 Cote : Université de Montréal PQ 2663 H396 R4 1995 Désignation générique : Récit
Bibliographie de l’auteur : Poète, essayiste et romancier suisse. Œuvre importante accompagnée de quelques prix, dont le Prix Goncourt pour l’Ogre (1973). Aussi, mentionnons deux autres biographies : Flaubert ou le désert en abîme (1991) et Maupassant et les autres (1981) .
Biographé : Voltaire, surtout, mais aussi Rousseau et Casanova.
Quatrième de couverture : Résumé de l’histoire.
Préface : Non.
Autres (note, épigraphe, photographie, etc.) : Une note de l’auteur, à la toute fin du livre : «Parmi les œuvres rêvées et relues récemment, le prince de Ligne : De fleur en fleur (Guilde du Livre) ; les deux volumes de Gibbon, édition de M.Baridon (Bouquins) ; et la Correspondance de Voltaire où M. Jacques-Abram-Élie-Daniel Clavel, à Ussières, apparaît souvent en 1759 et 1760 (Pléiade).»
LES RELATIONS (INSTANCES EXTRA ET INTRATEXTUELLES) :
Auteur/narrateur : Nous sommes manifestement dans une fiction, puisque la narration est autodiégétique. C’est un personnage, Jean de Watteville, qui raconte son propre récit.
Narrateur/personnage : Les différents personnages historiques qui se succéderont au château d’Ussières (mais plus particulièrement Rousseau, Voltaire et Casanova), marqueront un tournant émotif majeur dans le cheminement psychologique du narrateur et, par conséquent, ils marquent tous un tournant narratif important. Il y a donc comme un «avant» et un «après» Voltaire : «Qu’est-ce que je fais, de 1750 à cet été 60, où pour la première fois je rencontre M. de Voltaire ?» (p.26) ; car Voltaire vient en quelque sorte renforcer l’image tranquille de la vie à Ussières, une image qui s’est édifiée en réaction à Jean-Jacques Rousseau (et à sa visite qui n’est qu’évoquée) ; il représente une sorte de figure de l’ordre à laquelle leur univers est soumis, une figure de force : «Et son rire chuinte à nouveau comme le vent sec, mais puissant et tenace au soleil. C’est aussitôt cette impression que M. de Voltaire m’a donnée : la force sèche. M. Clavel, et tous ceux qui le fréquentent, le disent fragile et malade. Moi, je l’ai immédiatement ressenti comme une formidable rigueur. Une résistance à franchir n’importe quoi. À faire ployer n’importe qui.» (p.17-18) Toutefois, un certain nombre de considérations viendront semer le trouble dans l’esprit du narrateur, à commencer par la visite de Casanova. Non pas en elle-même bien sûr, mais parce que Casanova professera une opinion tranchée sur Voltaire : «“- M. de Voltaire ? Le grand Voltaire ? Vanitas vanitatum”. C’est tout. Il n’a même pas hésité. Et maintenant il se tait. La stupeur fige mon oncle.» (p.50) Ainsi, un important heurt s’opère : «Quel silence autour de la table. Pour moi, c’est comme si le monde que j’avais connu jusqu’alors, le monde paisible et cohérent, s’ouvrait brutalement sous le coup d’une terrible rupture. Oui, l’ordre du monde cède, la surface rompt, et la faille, l’effroi, apparaissent comme un scandale. Voilà, nous étions à Ussières, au jardin, autour de la table d’un philosophe qui reçoit plaisamment des hôtes lettrées. Et un jour de l’été 1760, à l’heure du goûter, l’un de ces hôtes, d’un seul mot biblique, insulte M. de Voltaire, qui est le dieu de la maison. Et par ce seul mot d’insulte, tout ce que je ressens de l’incertitude des apparences, tout ce que je souffre du peu d’épaisseur du réel, du manque de solidité des choses et des figures : oui, par ce mot, j’ai terriblement la révélation du mensonge théâtral du monde. » (p.51) Et après cette visite, plus rien n’est pareil dans l’esprit du narrateur : «la visite du Vénitien à Ussières est comparable, dans un registre contraire, à celle qu’y a faite Jean-Jacques Rousseau.» (p.58)
Biographe/biographé : Je ne peux établir une relation entre ces deux instances que d’un point de vue diégétique, c’est-à-dire en rapportant comment le personnage de Voltaire est vu par les autres personnages. M. de Voltaire est «l’hôte le plus choyé d’Ussières, le plus consulté, le plus remarquable et le plus aimé, au point d’y avoir sa chambre à l’étage noble […].» (p.10) L’oncle du narrateur lui «voue un véritable culte, l’interroge sur tout, le contredit souvent pour s’aiguiser à ses idées.» (p.10-11) Il représente, comme je viens de le mentionner, une figure phare qui n’est pas réellement en jeu ici.
Autres relations :
L’ORGANISATION TEXTUELLE
Synopsis : Jean de Watteville, étudiant en théologie à l’Académie de Lausanne, est orphelin et vit chez son oncle, M. Jacques-Agram-Eli-Daniel Clavel, seigneur de Brenles, jurisconsulte et assesseur baillival. À tous les étés, toute la famille, dont la pupille de M. Clavel, Aude Bellet, vont vivre au château d’Ussières, près de Lausanne, où sont reçus tous les gens du monde intellectuel, artistique, philosophique, scientifique, politique, etc. Mais l’invité le plus apprécié est Voltaire qui représente un peu le «Dieu» de la maison en opposition aux doctrines de Rousseau qui fait l’objet du mépris du château. Toutefois, le narrateur, Jean, commence à sentir que sous les apparences tranquilles de leur vie, se cache une vérité morcelée qu’il n’arrive pas à recomposer. Ce sentiment est d’autant plus mis à vif qu’il est fasciné par Aude, jeune femme magnifique plus vieille que lui cependant, et qu’il découvre que, sous ses airs soumis, se cache une certaine rage de vivre qu’elle évacue en ayant de nombreuses relations sexuelles avec divers hommes. Il la suit les après-midi alors que tous font la sieste et qu’elle va rejoindre ses amants à la rivière ; il épie les bruits qu’elle fait la nuit puisque sa chambre est juste à côté de la sienne et devient de plus en plus obsédé. Jean résume son drame ainsi : «En fait la maison d’Ussières est sublime, j’y suis heureux, et je ne m’en contente pas. Le visage d’Aude est sublime, et je ne veux y voir que de la dissimulation. La bonté de mon oncle est entière et sublime, et je n’y lis que la sainte rigueur des huguenots.» (p.62) Lors d’une visite de Voltaire, il croit discerner un flirt entre celui-ci et Aude. Fou de jalousie, il finit par se lever une nuit, par cogner à toutes les portes mais surtout à celle de Voltaire en criant à Aude de sortir. C’est alors que Voltaire apparaît ; il n’était pas dans sa chambre et Aude non plus. Ayant manqué de respect à ses deux personnes, Jean se voit mis à la porte par son oncle. Il nous raconte cet épisode à l’âge de soixante-quinze ans.
Ancrage référentiel : Il semble, selon les très minces informations que j’ai pu glaner, que l’auteur se soit inspiré d’un fait divers et j’ignore quel est au juste la nature de son intervention sur la référentialité. Ce que je crois assez certain, c’est l’historicité des personnages (incluant des plus connus tels M. Gibbon, l’historien, M. de Haller, etc. ; et des moins connus comme les personnages principaux) et des lieux, ainsi que des éléments contextuels qui sont mentionnés. Par exemple, Voltaire présente l’écriture de trois contes pour s’excuser de ne pas accompagner ces hôtes en forêt. Or, c’est bien dans les années 1750-60 qu’il compose et publie Candide qui se retrouvera dans les mains du personnage de Mlle Aude.
Indices de fiction : Tout le récit joue d’une mise en abîme de la fiction ; tout d’abord, la désignation générique et la présence d’un narrateur autodiégétique nous convainquent d’une fiction traditionnelle. À un deuxième niveau toutefois, nous sommes confrontés tant aux réflexions de l’auteur quant aux déformations que peu susciter sa mémoire qu’aux doutes qu’il a face à l’histoire qu’il nous raconte, qui balance entre le vrai (au niveau intradiégétique) et l’onirique (d’où le titre) (Voir aussi la rubrique «Thématisation de la biographie»). Le récit s’ouvre d’ailleurs ainsi : «Mon nom est Jean de Watteville. Aujourd’hui j’ai soixante-quinze ans, mais j’en ai dix-huit quand à lieu ce rêve, et je viens d’être chassé du château d’Ussières par mon oncle.» (p.9, je souligne) Il s’agit donc d’un rêve «sur» et non «de» Voltaire.
Rapports vie/œuvre : Ne s’applique pas ici.
Thématisation de l’écriture et de la lecture : L’écriture du récit lui-même est thématisée, l’énonciateur laissant des traces très nettes de son énonciation : «Peut-être suis-je maladroit et voit-on trop clair dans mon jeu ? Je confesse l’attrait que Mlle Aude a exercé sur moi, - exerce encore, sans aucun doute, par-delà tant d’années, puisque je suis incapable de parler d’elle sans que ma plume hausse le ton jusqu’à une sorte d’indécence. Ce dont je me sens coupable, et ce qui a causé ma perte dans la maison de mon protecteur.» (p.14) Au niveau intradiégétique, ni la lecture ni l’écriture ne sont thématisées.
Thématisation de la biographie : C’est le fondement même de la réalité qui est questionné ici (comme topoï le plus important) et l’entreprise (auto)biographique se retrouve, par ricochet, thématisée au cœur même de l’œuvre. Voici les extraits où il en est fait explicitement mention : «Mais est-ce que je rêve ? Est-ce que je rapporte avec clarté des événements très anciens ? Une clarté qui est peut-être un trompe-l’œil. Il y a eu tant de déplacements, dans mon souvenir, depuis que j’ai quitté Ussières. Puis les choses se sont recomposées, comme le limon se remet en place après qu’on a [sic] agité l’eau, et maintenant je vois dans cette eau comme dans un songe.» (p.12, souligné dans le texte) «Je regarde aujourd’hui Aude Bellet à travers la durée qui filtre les figures, et je me rends compte que je ne vois rien d’elle au temps du rêve.» (p.38) «Mais j’étais beaucoup plus jeune et je dois confondre mes propres souvenirs avec les réponses détournées, ou les allusions embarrassées, que font M. Clavel et son épouse lorsqu’on les interroge sur Jean-Jacques.» (p.59) → «Et puis tout cela s’estompe dans une sorte de brume qui est peut-être celle de l’été. Peut-être aussi la part du temps, où se redessinent les figures, s’affermissent les voix, s’estompent et réapparaissent les scènes où la lumière s’est fixée. Il n’y a pas loin de la mémoire au récit : ce que j’appelle ma vie tient dans cet écart si peu déterminable, à l’instant où je l’écris, entre ce qui a été réellement vécu, et quand, et ce qui a été rêvé ou vécu comme en rêve au moment de l’événement.» (p.61) «Est-ce que j’ai seulement songé ces choses ? Ou lues, toutes ces années, chez tant de témoins de notre hôte ? Est-ce que je mêle mon souvenir, l’été rêvé, mes lectures ?» (p.84) «Qu’est-ce que le rêve ? “Si les organes seuls produisent les rêves de la nuit, pourquoi ne produiront-ils pas seuls les idées du jour” se moque M. de Voltaire dans son Dictionnaire. Je suis certain et pas très sûr de comprendre cette phrase, comme si cette définition enlevait sa part de vérité à mon histoire rêvée et vraie. Or j’ai vécu les choses que je dis dans la lumière de la nuit et à la clarté du jour, et c’est le temps, portant le songe et l’éclairant de sa propre lumière, qui me les a gardées et dictées.» (p.104, je souligne)
Topoï : Tout le récit est prétexte à la mise en scène d’un thème : la recherche quasi névrotique d’une vérité troublante sous des apparences tranquilles, la recherche de la «réalité». L’auteur monologue souvent là-dessus : «Je réfléchis longtemps sur cette licorne, sur le Tibet, j’aime la fabuleuse bête surgie en pleine montagne réelle, parce qu’elle correspond aux images que je me fais si souvent de ma propre vie. Comme s’il y avait toujours quelque chose de très secret, d’inconnaissable, au milieu des choses les plus sûres. Comme s’il existait un mystère, une menace, un gouffre, derrière les événements banals. Qu’est-ce que la réalité ? Je la reconnais, je la touche, je l’expérimente, en même temps je ne suis assuré de rien de ce qui paraît la constituer. Je rêve ? J’imagine ces failles ? Elles sont là, elles s’ouvrent à l’instant, elles béent en pleine lumière.» (p.34-35) «Encore ce masque sur les choses. Encore un mensonge, mais si peu décelable, et sur une figure si claire, et toujours cette apparence sous laquelle s’ouvre la ruine. Comme si le monde était une fausse simplicité, un code, un système réglé et visible, et le miroir que nous y promenons ne révèle d’abord que la feinte. Puis on va dessous, on creuse, et ce que l’âme découvre la plonge dans la stupeur et l’effroi.» (p.43-44) «Mais pourquoi tient-on un journal ? Pour essayer de rendre à la réalité un peu de cohérence, et de la vérité, que le mensonge couvre à la surface ?» (p.54) «Tant de sécurité me choque, parce que je la sais trompeuse et plaquée de force sur les fissures que j’observe.» (p.58)
Aussi, tel que mentionné dans la rubrique «Narrateur/personnage », un réseau de signification s’établit entre le topoï et les trois figures principales des biographés : Rousseau et Casanova offrent les premiers points de comparaison et de réflexion : «[J]’étais trop jeune, je l’ai dit, pour savoir grand-chose de Rousseau, mais je ressens, je retiens, comme aujourd’hui je m’étonne de sa naïveté matoise, de son habit de bure élimée, de ses airs de fausse simplicité toujours aux aguets. Horreur de ce personnage outré, émotif, mensonger. Aussi menteur, dans ses indignations sensitives, que les spectacles qu’il blâme. […] Ce qu’il y a de fort, chez M. Clavel, c’est qu’il déteste l’imposture par-dessus tout. M. Casanova est un viveur, un libre penseur, un aventurier, soit, et il dit droit ce qu’il pense droit. On accuse le coup et on prend congé. Mais chapeau. (p.60) Tandis qu’avec M. Rousseau on flotte dans l’ambiguïté, et ses dénonciations des gouvernements, ses discours d’éducateur et de rédempteur tournent à la mesquine exaltation de ce bâtard de Diogène. Pas digne de l’orage, Rousseau. Non, le salut ne viendra pas de ce faux témoin.» (p.61) «Je ne porte pas de masque, je ne me déguise pas comme le copiste, je ne blâme ni ne pratique le théâtre. Moi je n’ai pas besoin de mentir, le réel ment à ma place. C’est pourquoi le rêve m’a toujours paru si important : ne cherchant à cacher rien, à ne mentir sur rien, et donnant du réel la seule interprétation qui m’intéresse, puisqu’elle ne prétend à rien d’autre qu’à y trier le probable. Et j’ai découvert cela : ce qui est probable est sublime.» (p.62) «C’est ainsi que M. Clavel ne peut avoir ignoré que j’ai décelé des fissures, sous notre surface polie, et que je souffre de garder cette découverte pour moi seul. Mais quelles fissures ? Le sais-je moi-même ? La conduite de Mlle Aude est-elle si grave ? N’est-il pas naturel qu’elle dissimule quelques ardeurs sous un maintien modeste ? Ou dois-je imaginer des craquelures, des ravines, des trous sous ce que j’appelle le masque, pour complaire à ma seule inquiétude d’orphelin ? Je vais ressembler au triste Rousseau, à voir le mensonge partout. À traquer la dissimulation à la façon du Manuel du confesseur.» (p.69) Voltaire, quant à lui, représente la vérité et la sincérité : «Donc il salue, il rit, il tourne autour de sa canne, salue encore, se casse en deux, et au lieu que j’entende grincer une carcasse, je vois une vieille vigueur solide jouer le plaisir d’être au monde, jouer la politesse des anciens temps, jouer la complicité avec ses hôtes, jouer le vieillard en voyage et le philosophe aux champs, jouer son propre personnage en public, secret et multiple, oui, jouer tout cela avec une prodigieuse vérité. Et tout de suite je comprends que ce jeu, pour M. de Voltaire, est une affaire de lumineuse sincérité. Et à la seconde, là, sur place, je comprends aussi pourquoi il déteste Rousseau, qui blâme les spectacles et condamne le théâtre : tout ce qu’aime M. de Voltaire. Parce que le théâtre, c’est le vrai, et Rousseau croit y dénoncer le mensonger et le vain. Ridicule myopie d’un faux témoin, et qui accuse son imposture.» (p.80) Mais le doute qui s’empare de lui concernant Voltaire et Mlle Aude fera voler cette dernière certitude que représente Voltaire en éclat : «Pourquoi le silence d’Ussières est-il encore si plein de bruits ? Il semble que l’esprit de M. de voltaire devrait dissiper les doutes qui m’inquiètent habituellement, toutes ces questions sur l’apparence et sur ce qu’elle cache, sur le mensonge, sur les craquelures qui le révèlent.» (p.87)
Hybridation : Nous sommes sans équivoque dans le genre du récit.
Différenciation : N’est marquée en aucune façon ici.
Transposition : L’œuvre est très peu transposée, mais il est intéressant de voir le parallèle que l’on peut établir entre la névrose du personnage principal et le conte de Candide que Aude lit et relit et refuse de prêter au narrateur : «Et maintenant je crois comprendre ce que Mlle Aude trouve dans Candide : des images d’elle-même et de la vie que nous menons ici. C’est pourquoi j’entends bien qu’elle me passe le livre au plus tôt, afin que je voie un peu plus clair dans son jeu et dans le mien.» (p.73) Le narrateur serait-il l’envers du personnage de Candide ? Ou bien, au contraire, comme il l’affirme lui-même, ce conte mettrait-il en scène l’univers mensonger où il croit vivre ? Peut-être cette biographie permet-elle de déceler un autre type de transposition : transposition des figures symboliques d’écrivains ? Au profit de la mise en forme d’un thème ?
Autres remarques : Mise en scène du corps du biographé : Voltaire est sans cesse dépeint comme un vieillard croulant : «Stupeur heureuse du vieillard. Sourire sans dents, cou décharné tout tendu de curiosité.» (p.85) / «Un vieil homme tordu de rhumatisme, courbé, édenté, grimaçant, vieux débris sautillant et raviné, vieille épure gourmande, vieux maniaque de tolérance, vieille chose primesautière et contournée comme une statue déjà habitée et qui se tord encore, s’exalte, se casse et se ranime sous nos yeux. Consumée et renaissant à son propre feu, la statue ! Crépitant de vigueur, le débris !» (p.98) ; il est à noter que ces descriptions de Voltaire arrive toutefois vers la fin du récit, ce qui n’est pas sans rapport avec la déchéance de l’image que représente le philosophe dans l’esprit du narrateur.
LA LECTURE
Pacte de lecture : Le pacte est fictionnel, mais l’auteur joue certes à un jeu de cache-cache en ne révélant pas ses sources.
Attitude de lecture : Les livres qui portent la désignation générique de «récit» ont souvent l’air de rien. Une première lecture à chercher avidement un rebondissement quelconque nous laisse sur notre faim. Mais les récits, de par leur longueur, sont faits pour être lus et relus et c’est à ce moment que le sens émerge. Ce fut le cas ici. Je ne peux pas dire que ce livre est passionnant (puisque, somme toute, le sens est souligné au crayon feutre), mais il me semble pertinent en regard du projet dans cette optique où les figures biographées sont utilisées pour illustrer de manière frappante le thème sur lequel s’articule le récit. Elles sont en quelque sorte épurée de leur potentiel biographique et réinvesties dans leur potentiel symbolique.
Lecteur/lectrice : Manon Auger