Samoyault, Tiphaine, Littérature et mémoire du présent, Nantes, Pleins Feux, 2001.

« La littérature fait rarement bon ménage avec l’écriture au présent. » (p.7)

« La modernité n’est plus une quête du sens et la quête du sens qui anime encore, je l’espère, la littérature, ne prétend plus aux ruptures de la modernité. » (p. 10)

« Le problème de notre présent, c’est de ne valoriser que le présent présent, c’est-à-dire celui qui n’en dessine pas l’esprit mais qui en retient une conformité non pérenne, une évidence mobile. […] Or il n’y a de littérature possible qu’au moment où on s’impose quelque chose en elle qui n’était pas déjà là. Qui perturbe, surprend, bouleverse le lecteur […] » (p. 12)

Cependant, Samoyault ne dévalorise pas la production pour le grand public : « toute culture, tout présent, ot besoin d’objets qui leur ressemblent, qui les confortent et les réconfortent. C’est une des tâches de l’art, et de la littérature, que d’offrir ce miroir aux alouettes. Créer des signes rassurants qui soient aussi des produits lisses, attendus. Attendus parce que déjà là. » (p. 14-15)

« Faire du nouveau, s’inscrire dans une modernité, c’est dès lors ajouter quelque chose à la mémoire. C’est ce quelque chose qui dérange le présent et qui ne fait jamais de l’écrivain un exact contemporain. À quoi cela tient-il ? On peut évidemment poser des critères, plus internes qu’externes, pour tenter de dire en quoi, pourquoi, un texte est littéraire et par quelles voies il impose des modes de rupture : on le fait bien pour le oeuvres du passé, soumises à divers types d’analyse, pourquoi ne le ferait-on par pour les oeuvres contemporaines ? C’est critères pourraient être 1) Le rapport d’un texte à son genre […] ; 2) L’énonciation consciente : le texte dit, de façon plus ou moins implicites, sa volonté de faire oeuvre […] ; 3) Le jeu de l’ancrage et du désancrage : un texte est littéraire (ce qui ne préjude évidemment pas de sa qualité) à partir du moment où il s’incrit dans la littérature présente ; mais, en outre, un texte est littéraire à partir du moment où il s’inscrit dans la littérature passée, présente, à venir. […] Le travail du langage : écrire contre, ou autrement. […] » (p. 18-21)

Débat : avec Tiphaine Samoyault et Philippe Forest

TS : « On entend souvent le propos selon lequel “aujourd’hui, il n’y a plus de littérature”, discours repris à toutes les époques, mais il naît principalement de l’indifférenciation. » (p. 28)