RAPPORT (Réunion 30 juin)

I- Présentation (rappel) =

Ma tâche consiste : En une sorte de métalecture du discours critique sur le contemporain québécois. Plus précisément, l’objet de ma recherche est non pas le propos des critiques (ex: ce qu'ils disent sur telle oeuvre, tel courant, etc.), mais bien comment (par une rhétorique particulière, une méthodologie ciblée, etc.), les critiques construisent un métadiscours sur la littérature contemporaine de manière à rendre celle-ci plus lisible et intelligible dans son ensemble. Autrement dit, il s’agit pour moi de voir comment la critique elle-même contribue, à travers des voi(x)(es) particulières, à « créer » le contemporain ; comment, en en proposant une interprétation, elle en conditionne aussi l'émergence et la réception.

II- Tâches et travail réalisé

C’est une tâche assez complexe. Mais, pour cela, j’ai réuni quelques titres à partir des bibliographies sur le contemporain qui était disponibles. Il ne s’agissait pas tant d’établir une bibliographie précise et exhaustive, mais plutôt d’essayer de planifier mes lectures, de prendre déjà un peu la mesure de ma tâche, d’autant plus que le contemporain n’est pas du tout mon objet de recherche en dehors du projet – mais, par contre, j’ai une certaine pratique de la critique du discours critique.

L’établissement d’une bibliographie sommaire a été l’occasion pour moi de voir que le corpus était assez disparate parce que les différents ouvrages abordent la littérature contemporaine selon différents points de vue (par vue d’ensemble, par thématique, par genre littéraires, etc. « littérature contemporaine », « depuis 1980). Au début j’y suis allée un peu à tâtons, j’ai fait des fiches sans trop savoir quoi y mettre –de toute façon, l’idée c’était de me construire une vue d’ensemble.

Pour me donner des balises, j’ai émis l’hypothèse qu’il pouvait y avoir trois « générations » pour la critique dans la constitution du discours sur le contemporain, soit 1- de 1980 à 1994, 2- de 1995 à 2001 et 3- de 2002 à nos jours. Donc, au lieu de faire une lecture chronologique, j’y suis allée de façon disons aléatoire, d’un groupe à l’autre.

III- Bilan provisoire

Ça s’est avéré plutôt fructueux et j’ai pu produire, au mois de décembre, un bilan provisoire contenant mes différentes hypothèses et réflexions faites à partir de mes premières lectures. Ce serait un peu long à résumer ici, d’autant plus que ce sont des résultats provisoires, que je veux étoffer et contre-vérifier par d’autres lectures. Dans les grandes lignes :

- J’essaie de mesurer l’impact de l’ouvrage de Nepveu L’écologie du réel et celui de Simon Harel Le voleur de parcours : identité et cosmopolitisme dans la littérature québécoise contemporaine qui me semblent être les piliers de la constitution du discours critique contemporain.

- J’essaie aussi de caractériser les trois générations (hypothèse qui permet de faire parler un corpus disparate) :

1) la première représenterait un premier mouvement critique de configuration du contemporain par l’étude en continue de phénomènes qui annoncent une partie de la littérature à venir. On a conscience du schisme que constituent les années 1980, mais on étudie cette période dans une continuité, pour justement mettre en relief le changement qui se produit au tournant de 1980. On cherche encore, à cette période-là, à cerner la spécificité de la littérature québécoise.

2) la deuxième reprendrait le principe de l’étude en continuité d’un phénomène particulier mais commence à théoriser davantage le contemporain. Elles se démarqueraient donc des études précédentes par un souci plus net de construire un regard théorique sur l’objet et aussi par une volonté de cerner non pas ce que la littérature québécoise a de particulier, mais bien comment elle s’inscrit dans un mouvement plus global de la littérature postmoderne.

3) la troisième génération ferait quant à elle cohabiter les considérations théoriques avec la lecture du corpus contemporain de manière à inscrire la littérature québécoise dans la littérature occidentale et d’en démontrer le caractère universel. Ainsi, à cette période, il ne s’agirait plus de lire la production contemporaine dans une continuité (donc, par rapport à la production d’une époque antérieure), mais bien de façon transversale, par l’étude d’un phénomène particulier qui est représentatif de la période contemporaine dans son ensemble.

- Finalement, le bilan a aussi été l’occasion de réfléchir à la notion très problématique de « contemporain ». Ok, depuis 1980, mais dans la pratique, ce n’est pas aussi simple; les ouvrages qui se donnent spécifiquement comme étude de « l’après 1980 » ne sont pas si nombreux. Les panoramas comme celui dirigé par Réginald Hamel prend pour objet « le contemporain » au sens de « ce qui est du même temps que soi », alors que d’autres ouvrages, comme La narrativité contemporaine au Québec, entendent plus implicitement le contemporain comme étant la période d’après 1980. Mais je pense que cette ambiguïté même est intéressante pour mon travail.

IV- Suite

Je voulais poursuivre mes lectures par la suite pour mesurer le bien-fondé de ces différentes hypothèses, mais, malheureusement, comme j’ai été affectée à d’autres tâches au cours de la session, je n’ai pas pu avancer autant que je l’aurais souhaité dans la suite des lectures. J’ai seulement pu en compléter trois qui sont venues renforcer ma réflexion. J’ai encore de quoi m’occuper pour un bout… J’ai dit au début que c’était une tâche complexe surtout parce qu’elle nécessite un bon investissement, mais c’est une réflexion qui mérite très certainement d’être poursuivie.