Informations paratextuelles

Auteur : Pajak, Frédéric Titre : L’immense solitude. Avec Friedrich Nietzsche et Cesare Pavese, orphelins sous le ciel de Turin Lieux: Paris Éditions : Presses universitaires de France Collection : Perspectives critiques Année : 1999 332 pages

Appellation générique : aucune sur la page couverture

Biographie de : Nietzsche et Pavese

Bibliographie de l’auteur : d’autres bios imaginaires, sur Apollinaire, sur Joyce, sur Luther. voir autre fiche pour sa biographie sur Joyce.

Quatrième de couverture : résumé de l’éditeur qui donne le point de départ du livre, le projet fait de rêverie qui relie Nietzsche, Pavese et Turin. Travail de la rêverie fait par rapprochements, détours, coïncidences (ces mots dans le texte en quatrième)

Épigraphe : dédicace : à la mémoire de mon père

Résumé : Biographie de deux auteurs Nietzsche et Pavese; surtout leur séjour à Turin à la fin de leur vie (là où Nietzsche va perdre raison fou et où Pavese se suicide), après avoir relaté rapidement l’enfance dont l’événement marquant (mort du père). Éléments retenus tentent de montrer l’importance de Turin (du point de vue psychologique, du point de vue poétique), ville qui a marqué les deux hommes (aurait aussi marqué Chirico, et l’auteur Pajak). Biographie assez libre qui relatent ces années et où on retrouve des témoignages d’amis des auteurs, des extraits des œuvres, des informations sur Turin aussi (son histoire, ses visiteurs, ses églises sataniques, ses architectes, etc.).. Rêverie qui ne mêle tout de même pas trop les repères : chapitres sur Nietzsche et Pavese sont séparés; ceux de Pajak aussi Avant-propos : où l’auteur présente son projet, ses objectifs La voix du Pô : présentation de la situation initiale : Nietzsche, Pavese et Pajak perdent leur père en bas âge; Turin où Nietzsche devient fou et Pavese se suicide. Ce qui a été sera : enfance de Pavese à Turin. Blessure de la perte du père pour les enfants Nietzsche et Pavese. Les amoureux : relations difficiles avec les femmes pour ces deux écrivains dont l’enfance n’était peuplée que de femmes (mère, sœur, tante, etc.) Viandes trop bouillies : Turin vu par Nietzsche. Y arrive en avril 1888. Amoureux de cette ville (vs haine de tout ce qui rappelle l’Allemagne; c’est là qu’il écrit son anti-Wagner) Piemontese et Montferrin pane vino e tamburin : le Turin de l’auteur : à travers son histoire et ses architectes, aussi par les yeux de quelques écrivains, Montaigne, Montesquieu, etc.; « Turin, je n’aurais pas pu la peindre. Ni l’écrire ou la décrire. Ni même la filmer — trop de voitures! Turin, c’est un dessin, et d’abord le dessin d’une petite poignées de grands architectes. » (102) Vin sale rouge comme les bouches : Le Turin dans les textes de Pavese et aussi, la citation de Natalia Ginzburg écrivaine et amie de Pavese, sur la ressemblance entre Turin et son ami, entre Turin et son écriture.(voir photocopie) Ah! Ma Trattoria! : folie grandissante de Nietzsche suivie à travers sa correspondance à différents amis et aussi fragments posthumes; de juin 1888 à janvier 1889. Parenthèse du Malin : parenthèse historique sur Turin, « cité du Démon », satanistes, occultisme, etc. Le tyran de Turin : folie de Nietzsche, de l’épisode d’apoplexie dans la ville à l’internement à Bâle, puis à Iéna; fragments du journal du malade tenu par les médecins (Iéna) Je ne sème pas les chevaux : Nietzsche pris en charge par sa mère, puis sa sœur, jusqu’à sa mort. La seconde mort de Friedrich Nietzsche : le travail de récupération des écrits de Nietzsche par sa sœur Élisabeth. La rencontre de cette dernière avec Hitler. L’enfance de l’art : sur le travail du biographe Janz; citations de Lou Andreas-Salomé, essai d’interprétation de la folie de Nietzsche qui est peut-être celle de Pajak (mais pas au je) voir photocopie. Rapprochement entre écriture de Nietzsche et le peintre américain Jackson Pollock (« deux gestuels » 264) Zarathoustra & Pincchio : sur le peintre Chirico, amoureux de Turin et fervent lecteur de Nietzsche The cats will know : raconte le suicide de Pavese; citations de son journal, poème, citations de son amie Ginzburg. Le coup de la panne : retour au narrateur à Turin en 1994 avec son ami Mickey venu étudié au « Musée d’anthropologie criminelle, où son fondateur, le Dr Cesare Lombroso (1835-1909), a méthodiquement classé les œuvres recueillies dans des asiles psychiatriques et des prisons » (305) Dans son livre L’homme de génie, paru en 1864 et traduit aussitôt dans toute l’Europe, Lombroso compare la mentalité du fou avec celle du criminel et du génie, toutes trois procédant à ses yeux d’une dégénérescence épileptique. Ce criminologue servira plus tard de référence aux théoriciens nazis de l’“art dégénéré” » (306). Chapitre écrit en partie au je : je pense à Nietzsche, je pense à Pavese, je pense au temps qui passe, je reviendrai à Turin, etc. se termine par la « sortie du tunnel » où ils étaient tombés en panne.

Pacte de lecture : voir dans l’avant-propos, comment l’auteur présente son projet : « Ce livre n’est ni une biographie, ni deux biographies, et encore moins une autobiographie. » (voir la suite du texte où est d’abord nommé ce que ce livre n’est pas). Pour le définir : « J’ai écrit et dessiné ce livre comme une longue rêverie.[…] Pendant plus de quatre ans, j’ai donc rêvé, en relisant les mots de Nietzsche et Pavese, et avec la ville […] (voir la suite). Donc, une trame faite des fils reliés des vies de Nietzsche et Pavese, de Turin, de l’auteur (et dans une moindre mesure, de quelques autres comme Chirico). Si le sujet est fixé par ses trois noms propres, le procès est gouverné par le hasard, le laisser-aller à la rêverie (pendant quatre ans), sans consigne ni orientation. L’originalité du projet ne tient pas tant à sa consistance biographique (pas de nouvelles données factuelles inédites) comme à son regard. Œuvre hybride à l’intersection de plusieurs « attitudes » (bio sérieuse/ bio rêvée ; un peu de chacun des genres déniés — les « ce n’est pas » du début du texte de présentation — dans ce travail), de plusieurs matériaux (le dessin, l’écriture). Importance ici aussi de l’auteur d’abord lecteur. C’est avant tout un témoignage de lecteur qui utilise le matériau biographique comme le matériau écrit des écrivains et qu’il transmute en mots et en dessins.

Les relations et mode de présence auteur/ narrateur/ biographe/ biographé personnages, sujet d’énonciation/ sujet d’énoncé : Si on exclue les chapitres du narrateur en voyage à Turin (1994), les autres chapitres racontent, comme dans une biographie, la vie de Nietzsche et celle de Pavese (elles ne sont pas emmêlées, mais dans des chapitres distincts). Le biographe rapporte les faits biographiques en s’appuyant sur des documents (autres biographies, correspondances et écrits des biographés); les faits sont donnés objectivement et ce sont des faits réels. Là où il saurait être question d’imaginaire, c’est dans l’espèce de rêverie entretenue, une atmosphère dans laquelle baignent les épisodes. Présence du narrateur (chapitres écrits au je — de l’auteur), lui-même à Turin, et de ses dessins. Mais aussi présence d’un discours personnel sur Nietzsche, et sur les essais sur Nietzsche (« Car on sent bien, dans nombre de commentaires sur son œuvre, cette manie universitaire de vouloir à tout prix disséquer les paroles pour surtout ne pas entendre la musique. » 259). Interprétation de la folie de Nietzsche (262-267). Séparation plutôt nette entre sujet d’énonciation et sujet d’énoncé. Le projet se nourrit moins du travail d’écrivain de ces auteurs que de leur vie, de leur immense solitude sous le ciel de Turin, de leur expérience de vie. Pajak, lecteur de Nietzsche et Pavese veut en donner sa lecture, moins en insistant sur leurs écrits que sur quelques expériences de vie communes. non par une explication savante, mais par association et rêverie.

Ancrage référentiel (marqueur de réalité) : Factuel est de l’ordre du biographique sérieux. Les anecdotes et les faits rapportés sont documentés; les sources sont données (liste des références à la fin). Beaucoup de citations à l’appui — reconnaissables car elles sont en italiques, mais sans les références bibliographiques exactes. Les titres des chapitres semblent dans une bonne part provenir des textes de Nietzsche ou Pavese. Toutes les sources, et elles sont nombreuses, sont données à la fin de l’ouvrage.

Indices de fiction d’ordre thématique : Le caractère fictif (imaginaire) donné par la rencontre construite ici entre deux écrivains, un auteur (de ses affinités avec les deux écrivains : aussi, a perdu son père lorsqu’il était jeune, aussi, est à Turin), une ville, des dessins. Tous les personnages de tous les dessins sont affublés d’un grand nez à la Pinocchio, s’éloignant ainsi de la documentation biographique sérieuse.

Thématisation de l’écriture : Il est question d’écriture : celle de Nietzsche qui est comparée à un fragment peint de Pollock (266-267), (caractère graphique, visuel de l’écriture) et celle de Pavese, habitée par Turin (140-141). Pour les deux poètes, écriture est médiatrice de la relation entre les écrivains et la ville.

Attitude de lecture : - évaluation par rapport à un corpus « biographie imaginaire » Ici, surtout refus d’un genre (par mélange d’une écriture qui mêle essai et poésie, lignes bio et autobio, écrits et dessins), plutôt que refus du biographique.

Hybridation, Différenciation, Transposition :

Autre : dessins qui prennent la place habituelle laissée aux photos dans les biographies. Mais ici, ne servent pas à attester sérieusement le document : 1) sont des dessins d’auteur (à ce titre, ils sont, comme l’écriture pour les écrivains, médiateurs de la ville, voir p. 102 « Turin, je n’aurais pas pu la peindre. Ni l’écrire ou la décrire […] Turin, c’est un dessin ») et 2) les nez « Pinocchio » : il y a une référence à Pinocchio (277) alors que Chirico compare le Zarathoustra au Pinocchio en raison de leur caractère commun d’étrangeté. Donc ces nez, non pour faire rire, mais pour donner un caractère étrange ? photocopie : Présentation 25-29; 42-47; 83-87; 99-102; 136; 139-141; 186-188; 259-267; 272-281. Table Quatrième de couverture

Lecteur/lectrice : Anne-Marie Clément