**Fiche de lecture** **1. Degré d’intérêt général** Il y a certainement un potentiel pour la diffraction, mais le roman mérite une seconde lecture, la mienne me semblant un peu trop approximative... Quant à l'enquête sur la mort de Personne, elle est tellement "insuivable" parce que trop compliquée par le conflit narrateur-personnage que je ne sais pas trop quoi en penser. **2. Informations paratextuelles** **2.1** Auteur : Linda Lê **2.2** Titre : Personne **2.3** Lieu d’édition : Paris **2.4** Édition : Christian Bourgeois éditeur **2.5** Collection : - **2.6** (Année [copyright]) : 2003 **2.7** Nombre de pages : 127 **2.8** Varia : L'illustration de couverture représente un tableau de Cranach l'Ancien, //Judith et la tête d'Holopherne// (1530) **3. Résumé du roman** Comme ce roman est resté à peu près complètement étanche pour moi, je vais me contenter d'insérer des résumés pêchés ailleurs, en désespoir de cause... Ce livre est tissé de plusieurs livres. Celui qu'écrit l'auteur, entraîné par son personnage. Lequel s'appelle Personne et est présenté comme un personnage rétif. Et celui qu'a écrit Tima, qui est constitué de carnets. Personne a découvert ces carnets et les retranscrit. Tima y évoque un séjour à Prague qui l'a rendue à elle-même, et les salles du Musée où elle veille sur les gisants. D'autres figures surgissent : Katimini la détective, Falmer le collecteur de rebuts, Ebua l'imprimeur. Les deux histoires évoluent en parallèle, et l'enquête autour de Personne, comme celle autour de Tima, s'entrecroisent. Et finalement, on s'aperçoit que le livre que nous lisons est celui que Personne, au premier chapitre, décide d'écrire. Linda Lê nous livre ici, à travers ces dédoublements de voix et de fictions, une superbe allégorie de l'écriture. (Quatrième de couverture, Christian Bourgeois) Les voix sont multiples dans ce roman de Linda Lê, superbe allégorie de l'écriture : il y a Personne, le bien-nommé, personnage qui a pris ses distances vis-à-vis de l' « auteur/narrateur ». Personne, après avoir été veilleur de nuit, travaille au service des réexpéditions, là où on tente de renvoyer les missives perdues aux destinataires d'origine ; il n'en fait qu'à sa tête. Il y a aussi Tima, une femme échappée des « Carnets » contenus dans un ordinateur abandonné qu'a trouvé Personne. A-t-elle jamais existé ? Est-elle fiction ou fantasme de Personne ? Gardienne de musée, elle a été affectée à la salle des gisants ; dans un journal intime elle raconte une rencontre avec un homme mystérieux, et Prague, ville qui, à ses yeux, a su réenchanter le monde. Enfin il y a le « je » de l'auteur qui dans des apartés (mini-traités de littérature) se plaint de l'autonomie de son personnage : « Mon personnage ne veut rien de l'avenir que je lui réserve. Il prend la tangente. Je cours après lui. » Sans doute le roman le plus étrange, déstructuré, parfois fantaisiste, de Linda Lê. (Quatrième de couverture, Seuil) **4. Singularité formelle** Le roman est séparé en 26 chapitres, chacun d'eux correspondant à un niveau narratif particulier (voir 6). L'alternance entre les trois niveaux est quasi parfaite. Seuls les chapitres liés à Personne ont des titres différents d'une fois à l'autre. **5. Caractéristiques du récit et de la narration** Les "Carnets de Tima" et les chapitres qui racontent "Personne" m'ont tous paru soit obscurs, soit parfaitement inintéressants. Seules les sections "Aparté" étaient pour moi cohérentes. Elles montrent clairement que le personnage de Personne et son narrateur (qui adopte ici et là une posture d'écrivain) entretiennent une relation conflictuelle, les deux s'efforçant de prendre le contrôle du récit: Narrateur: « L’inconnue de Prague et les carnets ont été fabriqués par Personne pour se rendre intéressant à mes yeux et perturber le cours de mon récit. Dans ce cas, Personne m’a doublé. Fatigué d’être mon personnage, il a à son tour créé un personnage qu’il a envoyé à Prague » (27-28) Quelques autres citations illustrent le conflit entre le personnage Personne et le narrateur: Narrateur: « Pour commencer, je l’ai [Personne] envoyé chez un psychiatre, manière de lui tirer les vers du nez. » (13) Narrateur: « nos relations prirent une tournure franchement désagréable, et même désastreuse, pour moi, quand il me donna on nom. Il s’appelle Personne. […] Un personnage qui s’appelle Personne. De quoi ai-je l’air, moi, créateur omniscient, tout-puissant, qui a sorti Personne de son chapeau ? Mon personnage ne veut rien savoir de l’avenir que je lui réserve. Il prend la tangente. […] Je dois m’en tenir au pacte : je reste dans l’ombre, je tire les ficelles, et je rafle la mise.» (13-14) Le narrateur : « [Personne] l’a faite sienne. [Tima] m’échappe. Je ne la comprends plus. Si j’avais continué à la faire vivre, elle aurait été autre. Mais maintenant, je n’ai plus d’autorité sur elle. Que faire ? Personne et moi nous nous disputons un fantôme. À lui la victoire, pour l’instant. J’écris sous sa dictée. Mais patience, je trouverai une parade à ses manœuvres souterraines. » (51) **6. Narrativité (Typologie de Ryan)** **6.3- Complexe** Justifiez : Chaque chapitre du roman est relié à un niveau narratif différent. Les chapitres dans lesquels Personne est le personnage raconté à la troisième personne constituent le monde qui est raconté ; ceux qui sont intitulés "Aparté", le monde qui raconte (un narrateur écrivain s'adresse directement au lecteur) ; ceux intitulés "Carnets de Tima" font partie d'un niveau introduit par le monde de Personne. **7. Rapport avec la fiction** Je crois que ce que j'ai indiqué dans la section 5 inclut le rapport à la fiction. **8. Intertextualité** - **9. Élément marquant à retenir** Désolé, il s'agit ici d'une fiche très -trop- sommaire, mais il y a de ces romans qui, malgré tous les efforts du monde, vous purgent de toute votre énergie et de toutes vos capacités d'analyse... Sinon, élément marquant: le conflit autour de la figure qui mène le récit, s'agit-il du personnage, du narrateur ou de l'auteur ? **10. Autres citations** Personne : « Parfois, lui revenait en mémoire l’époque où il ne vivait pas dans la méfiance permanente envers soi. […] Le jour où le quotidien se transforma en un faisceau de signe, où le monde alentour se mit à murmurer des messages à lui destinés, il se découvrit double. » (11-12) « Peut-être ai-je découvert dans le grenier de ma sœur des carnets qu’elle a tenus ? Puis j’ai inventé Personne. Je ne sais qui de nous deux a engendré l’autre. » (28) **11. Réception** http://www.erudit.org/culture/spirale1048177/spirale1057453/19439ac.pdf