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Informations paratextuelles Auteur : Alberto Savinio Titre : Vie de Henrik Ibsen Éditions : Christian Bourgeois Éditeur Collection : « Les derniers mots » Année :[1979] 1999 Appellation générique : Aucune. Le sujet d’énonciation désigne toutefois son ouvrage comme étant une biographie à la page 71. Bibliographie de l’auteur : À la page 73, donc à l’intérieur du récit cette fois, le biographe mentionne avoir écrit un ouvrage consacré à une femme, Isadora Duncan, quoiqu’il ne signale pas le titre de l’ouvrage.

Quatrième de couverture : Le sujet d’énonciation s’adresse au sujet d’énoncé. Dans ce passage qui insiste sur la complicité entre les deux sujets, le sujet d’énonciation anticipe la réception de son ouvrage : peu de contenu, beaucoup de divagations. Il contre-argumente en annonçant que ces « divagations » sont en fait des choses qu’Ibsen se chargeait de dire avant sa mort. Tout indique que cette intention d’Ibsen est déduite de son œuvre puisque l’un (Salvinio) n’est pas le contemporain de l’autre (Ibsen). Le sujet d’énonciation re-traduit ou réécrit ces « choses fabulées ». L’Éditeur (?) sème le doute quant à la nature générique de l’œuvre : « Fausse biographie ? » Il annonce le thème majeur de l’œuvre : la femme, son mythe.

Pacte de lecture L’auteur indique qu’il s’agit d’une biographie, en la justifiant et en la précisant par rapport aux autres : « Pourquoi écrit-on des biographies ? Pourquoi nous arrive-t-il, à nous aussi, de ressentir le besoin d’écrire des biographies ? […] Les biographes écrivent la biographie pour enregistrer la vie de celui qui les occupe, pour le montrer à tout le monde comme on érige la statue d’un homme illustre au centre d’une plage […]. De Plutarque à Giuseppe Chiarini [note en bas de page], les biographes sont des photographes en photos d’identité. Mais que nous importe, à nous, d’enregistrer la vie d’Ibsen ? (59) (À remarquer l’utilisation du Nous). Que nous importe, à nous, de montrer Ibsen à tout le monde ? La biographie est pour nous un jeu secret. Il nous arrive d’écrire aussi des biographies, pour avoir de la compagnie : pour se faire un groupe d’amis ; pour accroître le nombre de nos enfants. Je dis bien : pour accroître le nombre de nos enfants (60). En somme, le biographe semble nous dire qu’il ne s’agit pas d’une « photo » d’Ibsen, mais d’une sorte de réincarnation du sujet, d’une lecture-écriture, de manière à nous tenir compagnie lors de notre lecture… écriture ?

Les relations Auteur/narrateur Rien n’indique que nous ayons deux énonciateurs distincts. La présence du biographe dans cet ouvrage se manifeste à partir de commentaires sur son écriture, ses lapsus (13, 40) dont une est annotée en bas de page (NdA : 27) ou ses digressions dont l’une est indiquée entre parenthèses (36-37). Le biographe s’adresse parfois au lecteur lorsqu’il s’oppose notamment à d’autres sujets d’énonciation, en l’occurrence à De Sanctis (19) et à Björson (54). Voir aussi l’extrait à la page 10. Marques de polyphonie repérables.

Narrateur/personnage La narrateur n’apparaît pas comme un actant ou un personnage dans l’univers qu’il décrit. Il est témoin mais à titre de lecteur de l’œuvre d’Ibsen.

Sujet d’énonciation/sujet d’énoncé La complicité qui lie le sujet d’énonciation et le sujet d’énoncé est véhiculée avec insistance. Ils sont tous deux féministes : « Plus j’avance dans l’écriture de cette vie d’Ibsen, plus je suis conscient […] que j’écris sur ma propre vie […] parce que nous sommes tous les deux féministes ». (42). Cette connivence de pensée entre les deux sujets se présente parfois sous forme d’adresse de l’un (Salvinio) à l’autre (Ibsen) : « Henrik, il faut nous quitter. Voilà qu’est venu le moment de tristesse de cette biographie, le moment des adieux » (71). Et après avoir demandé à Ibsen la permission de « digresser », il ajoute : « Je reviens à ma question : pourquoi ai-je tant tiré ta vie en longueur, Henrik ? […] Pourquoi voulais-je prolonger ta vie aussi longtemps que la mienne ?… Il est temps de te l’avouer, Henrik : nous nous ressemblons » (75). Il parle alors de réincarnation (la date de la mort d’Ibsen ne coïncide toutefois pas avec la naissance de Salvinio) et d’identité spirituelle (75-76) puis : « Lorsque je rapportais tes pensées, je m’apercevais peu après que j’exprimais mes propres pensées. Quoi d’autre ? Les événements de ta vie eux-mêmes : lorsque je racontais un événement qui t’était arrivé, je me souvenais en le racontant que la même chose m’était arrivée » (76). Voir les exemples aux pages 76-77. Bien plus qu’une similitude entre la vie des deux sujets, la biographie semble instaurer une continuité entre le biographe et Ibsen bourgeois (versus épique). Cette distinction entre le caractère épique et bourgeois d’Ibsen est observée par le biographe à partir de l’analyse de l’œuvre d’Ibsen et à De Sanctis (19-21). C’est vraisemblablement plus une biographie de l’œuvre et de la pensée d’Ibsen qu’une biographie du personnage.

Biographé Le titre indique clairement que l’œuvre de Salvinio porte sur Henrik Ibsen. Il ne s’agit pas d’une description de son parcours à titre d’écrivain, mais plutôt d’une analyse de son œuvre qui nourrira à son tour la pensée de Salvinio. Les caractéristiques physique d’Ibsen sont révélés par Salvinio de manière à « expliquer » le féminisme d’Ibsen : « Certaines conditions physiques naturelles prédisposent au féminisme et peuvent hâter l’arrivée au cœur de la montagne : par exemple une petite taille. C’est le cas de Henrik Ibsen. Allons-nous suggérer qu’Ibsen était féminisme en raison de sa petite taille ? […] Il va de soi que l’effort pour se féminiser est plus important chez l’homme de petite taille que chez l’homme de taille moyenne ou chez l’homme de grande taille, pour ne pas parler du géant ou de l’acromégalique chez qui un accord ou, plutôt, un compromis intervient naturellement entre masculinité et féminité » (53-54).

Ancrage référentiel On retrouve peu d’éléments référentiels de type onomastique ou toponymique. À la page 9 toutefois, on retrouve une information factuelle (?) : la femme de Henrik Ibsen, Suzannah, a gravé sur le tombeau des vers que son mari avait écrit. Ce fait relaté est précédé d’une déclaration assez étonnante : « Je parle en connaissance de cause. ». Comme s’il avait été témoin de la scène. Le biographe relate les vers d’Ibsen que sa femme a gravé sur le tombeau (9-10). Est-ce vrai ? Il y a aussi la rencontre d’Ibsen et du peintre Erik Werenskiold. Cette rencontre, relatée par le biographe, s’appuie sur l’ouvrage d’un autre biographe d’Ibsen, Halvdan Koht, sans toutefois préciser la référence complète de l’ouvrage en question. Ce peintre aurait représenté Ibsen sur une toile que le biographe reprend (?) à la page 16. Les références de Salvinio sont partiellement étayées. À la page 24, le biographe affirme que le dernier mot prononcé par Ibsen serait « au contraire ». Analysé dans son contexte (!) par le biographe, ce « mot » témoigne de l’authenticité d’Ibsen selon le biographe. Mais comment savoir si cette information est d’ordre factuel ou fictif? Enfin, le biographe annonce qu’Ibsen a détesté son père lorsqu’il ce dernier a fait faillite en 1836 (63). Sur quoi se fonde cette assertion, cette intrusion dans la pensée d’Ibsen ?

Indices de fiction Il me semble que l’ouvrage de Salvinio relève davantage de l’interprétation et de la lecture que de la fiction, entendue dans le sens de fabulation. Après avoir différencié le « Ibsen épique » (Brand en est le prototype) du « Ibsen bourgeois », le biographe met en place une réflexion sur des thèmes abordés par « Ibsen bourgeois », notamment dans Maison de poupée. Le passage suivant nous donne un aperçu de la manière dont Salvinio tire des inférences à partir de l’œuvre d’Ibsen. Concernant le caractère épique d’Ibsen (ou son œuvre) : « Brand est un des premiers drames d’Ibsen. C’est une œuvre dans laquelle les désirs d’Ibsen sont encore obscurs et confus. Ibsen veut quelque chose mais il ne sait pas encore précisément quoi. Et dans la mesure où, quand on ne sait pas précisément ce qu’on veut, on se laisse guider par la vague ambition de ‘corriger’ la réalité pour succomber alors à l’esthétisme qui est, précisément, une réalité embellie, perfectionnée et donc fausse […] Brand se trouve être une œuvre esthétique et fausse. […] En écrivant Brand, Ibsen voulut faire une œuvre patriotique et sociale. (30).

Thématisation de l’écriture Les femmes et le féminisme C’est la lecture de Maison de poupée d’Ibsen qui sert de tremplin à une réflexion sur la femme, ses droits, sa nature, etc. La pensée de Salvinio convergent vers celle d’Ibsen (voir sujet d’énonciation et sujet d’énoncé). On retrouve également un métarécit faisant état de l’histoire de Marie-Thérèse Paradies (36-37). Ce métarécit vise principalement à soutenir la thèse selon laquelle les rapports entre hommes et femmes sont de nature peu cordiale, celui-là terrorisant celle-ci. Voir aussi ses thèses (surprenantes !) sur l’influence du climat et des caractéristiques physiques sur le féminisme (52-53).

Attitude de lecture Nous lisons une biographie qui n’est pas sans référence à l’essaie. Selon Salvinio, l’une des forces d’Ibsen (bourgeois) réside dans son aptitude à voir « de plus en plus grand dans le plus en plus petit » (22), i.e. le nécessaire selon Salvinio. Pensée métonymique ? Peut-être. Précision que Salvinio s’est intéressé particulièrement à une partie de l’œuvre et de la pensée d’Ibsen, le féminisme (Maison de poupée).

Hybridation, Différenciation, Transposition En tant que biographie, cette œuvre est destinée à faire l’éloge d’un écrivain et surtout d’une partie de son œuvre. Elle se différentie des autres notamment dans le processus lecture-écriture ou dans celui de la fusion des pensées. Peu de place est accordée en effet aux moments importants de la vie du biographé. Notons par ailleurs la présence de quelques métarécits. Phénomène de transpostition ? Le biographe est conscient lorsqu’il tend vers la digression. Voir notes auteur-narrateur.

Autres On retrouve à la toute fin de l’ouvrage de Salvinio, en annexe, un court texte de trois pages et demie dont le titre est « Monogamie ou Polygamie ? ». Ce titre est suivi d’une note de l’Éditeur qui mentionne que cet article a été trouvé dans le dossier qui contient l’original de Vie de Henrik Ibsen, la version italienne de Salvinio sans doute. Ce court essai, qui fait l’éloge de la monogamie en ayant recours à l’argumentation par analogie, fait rapidement état des thèses de Karl Marx et des évolutionnistes. Ibsen est-il vraiment l’énonciateur de ce texte ? Il n’y a pas de note sur la page couverture qui indique, par exemple, « Vie de Henrik Ibsen de Alberto Savinio, suivie d’un texte (inédit ?) de Henrik Ibsen ».

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