====== Jean-Simon Desrochers, Le sablier des solitudes ====== ==== I- MÉTADONNÉES ET PARATEXTE ==== Auteur : DesRochers, Jean-Simon Titre : Le sablier des solitudes Éditeur : Les Herbes rouges Collection : - Année : 2011 Éditions ultérieures : - Désignation générique : roman (page couverture) Quatrième de couverture : « Début janvier. À la tombée du jour, sur une route provinciale, la poudrerie gêne la visibilité. Emportés par une rafale, une dizaine de véhicules entrent en collision. Le spectaculaire carambolage qui s’ensuit plonge ses victimes dans l’air glacial. Treize solitudes regardent s’écouler les minutes dans cet étrange sablier où ils sont tombés. Militaire, étudiant, masseuse, peintre, ministre, fillette, ingénieur, camionneur : ils ressemblent à un peu tout le monde et viennent d’un peu partout, sans lien apparent sinon cet accident, aussi brutal qu’imprévisible. Certains en mourront, quelques-uns en sortiront brisés, d’autres tenteront de reprendre en main leur existence. Aucun n’aura vécu ce carambolage sans y avoir laissé ou reconquis une part de lui-même. Dans le style dépouillé au rythme enlevant qui a séduit les lecteurs de La canicule des pauvres, Jean-Simon DesRochers réussit le défi d’un roman choral à la fois tendre et impitoyable, où la vie normale ne l’est pas toujours, où la mort offre une raison simple de s’accrocher à la vie. » Notice biographique de l’auteur : « Jean-Simon DesRochers est né à Montréal. Son premier roman, La canicule des pauvres, a remporté un franc succès, tant critique que populaire. » ==== II - CONTENU ET THÈMES ==== Résumé de l’œuvre : Treize personnages sont mis en scène à tour de rôle : Fiona, une soldate du groupe de Trenton déployé en Afghanistan, en congé au Québec; Jacques, un ministre d’État au Sport et aux Loisirs (son chauffeur Yves occupe un rôle secondaire); Jamel, un livreur de pizzas et étudiant maghrébin déchiré entre l’amour et les études; Nadine, une masseuse érotique croyant être la réincarnation de la duchesse de Polignac; Lydia, une agente d’immeubles « accro » aux chirurgies plastiques et au Paxil; Sam, un étudiant d’origine chinoise en querelle avec sa famille traditionnelle; Finch, un camionneur américain troublé par son passé de surveillant d’exécutions de peines capitales; Véronique, une peintre qui tente de faire carrière; André, un homme d’affaires obsédé par les vidéos pornographiques et par la fille de sa femme; Océanne, une fillette obèse et dépressive; Émile, un chauffeur d’autocar célibataire croyant aux extraterrestres; Brigitte, une mère monoparentale de trois garçons et vendeuse dans un centre commercial; Martin, un jeune homme introverti travaillant de nuit dans un Tim Hortons. Chaque personnage approche d’un point de rupture (homosexualité refoulée, choc post-traumatique, obsession pour la belle-fille, rupture familiale, etc.), que précipite le terrible accident sur la route 112, qui les mêle tous. Certains meurent (Émile et Nadine), les autres gardent des séquelles physiques (Jamel, Jacques et Véronique) ou psychologiques (tous les survivants). Le roman se divise en trois grandes parties : les journées précédant l’accident, l’accident et l’attente des secours, et le retour à la vie quotidienne après un événement de cette ampleur. La structure romanesque paraît donc construite tel un sablier, métaphore de l’action et du temps qui passe. Thème principal : La solitude Description du thème principal : Tous les personnages sont aux prises avec des problèmes interpersonnels. Ils se sentent incompris, seuls, pris au piège de leurs obligations (sociales, familiales, économiques, etc.). Thèmes secondaires : Amour, amitié Deuil, mort Pardon Relations interpersonnelles (surtout de couple et familiale) ==== III- CARACTÉRISATION NARRATIVE ET FORMELLE ==== Type de roman (ou de récit) : Roman choral. Type de narration : Narration hétérogénétique. La présence d’une certaine ironie de la part du narrateur omniscient se fait parfois sentir : « L’infirmier sur place répondra [à la Docteure Lalonde] d’une voix grise que personne […] n’a visité Nadine Riel. “Comme c’est triste.” Oui… triste. » (p. 322) Le narrateur est absent autrement. Personnes et/ou personnages mis en scène : Yolande de Polastron, duchesse de Polignac (meilleure amie de Marie-Antoinette d’Autriche) Bill Gates Lieu(x) mis en scène : Afghanistan (Kandahar et Panjwayi) Berlin (New Hampshire) Brossard Granby Montréal (Village gai) Route 112 (peu avant Rougemont) Sherbrooke Tim Hortons Université de Sherbrooke Types de lieux : Bungalows Cabinets ministériels Centre commercial Chambres Condominiums Désert Habitacles de voiture Hôpital Maison mobile Prison Salon de massage érotique Université Date(s) ou époque(s) de l'histoire : De Noël à avril (année non précisée, mais vraisemblablement après 2002, année du début de la mission canadienne en Afghanistan). Intergénérité et/ou intertextualité et/ou intermédialité : Intertextualité Coran (Sourates citées) John Saul Intermédialité Avec le cinéma : Les liens avec le cinéma portent surtout sur le « visionnement intérieur » des souvenirs et sur le cadrage d’une scène par la vue. Il y a aussi un travail sonore, notamment grâce aux nombreuses références à la musique écoutée par les personnages. Il existe plusieurs comparaisons entre ce qui est vécu par les personnages et le cinéma, mettant à jour une certaine façon de voir le monde empreinte des images de ce médium. Le moment de l’accident vécu et vu par Océanne le montre bien : parce que l’accident bouleverse le cours tranquille du quotidien, parce qu’il est plus commun de voir ce genre de drame à la télévision et au cinéma, la scène paraît irréelle. À cause de l’éclairage accidentel de cette scène, tout semble « surréel ». Cela ajoute au travail réaliste de la narration : cet accident fictif apparaît plus « vrai » parce que les personnages avancent qu’il est « comme au cinéma », une expression courante désignant un événement plus souvent vu que vécu. Avec la musique : « Another One Bites the Dust », de Queen « Dancing With the Moonlight Knight », « Firth of Fifth », « The Cinema Show », de Genesis (paroles citées) God is an Astronaut « Fracture », de King Crimson « In the Upper Room », de Philip Glass Justin Timberlake « Love Will Tear Us Apart », de Joy Division « Ready To Start », d’Arcade Fire « Takin’ Care of Business », de Bachman-Turner Overdrive Avec la télévision Oprah Winfrey Show The Dukes of Hazzard The Simpsons Particularités stylistiques ou textuelles : - Roman réaliste (endroits réels, grande attention accordée aux détails) - Scènes sexuelles explicites - Présence de différents niveaux de langue et d’oralité (par exemple : « Maxime, y skatait comme d’habitude, pis là, y’a comme tourné sec, pis là, […] », p. 124) - Dialogues en anglais sans traduction (lorsque les personnages sont anglophones) - Pensées intérieures des personnages en italiques - Courtes prolepses portant sur les actions prochaines des personnages (par exemple : « Roger remonte la fermeture éclair de son manteau. […] D’ici cinq minutes, il retournera à l’intérieur, encore impressionné par l’imposante collection de livres de feu son ami. […] Il n’ira pas dans la chambre, pas ce soir. Ce sera sa femme qui découvrira le petit cadavre desséché d’un jeune chat […] », p. 350) - Ralentissements comparables au ralenti cinématographique lors du carambolage (par exemple : « Pour Émile, le temps s’étire, comme si dans ces deux secondes six dixièmes, sa conscience décuplait sa capacité d’analyse. Je vais mourir, je vais mourir. », p. 221) - Chacune des trois parties principales est accompagnée d’une épigraphe. Auteur(e) de la fiche : Karine Bissonnette