Auteur : Desjardins, Martine
Titre : Le Cercle de Clara
Éditeur : Leméac
Collection : —
Année : 1997
Éditions ultérieures : Le livre a été réédité en poche chez BQ en 2004 et est disponible en version epub chez Alto (le nouvel éditeur de Desjardins) depuis 2012.
Désignation générique : Roman (quatrième de couverture)
Quatrième de couverture : « J’ai été réveillée en sursaut. Dans le noir, la porte venait de s’ouvrir. Le cœur battant, je suis restée immobile. Des pas s’avançaient vers le lit. Au-dessus de moi, une tête s’est penchée, embuant mon front de son souffle chaud, pendant qu’une main sournoise se coulait sous le drap pour l’écarter. Brusquement Edmond s’est écrasé sur moi et, d’un coup de genou, s’est fait une trouée entre mes jambes. Malgré ses charges répétées, le mur de mes os n’a pas cédé. Un murmure à mon oreille. J’ai cru entendre : “Ouvre ta chatière.”
Entre Edmond et Clara, une singulière relation a pris forme depuis le jour de leur mariage, qui les fait s’attirer et s’éloigner l’un de l’autre, prisonniers de leurs corps et de leurs pulsions contradictoires. À l’été 1895, dans une Nouvelle-Écosse mi-rêvée, mi-réelle, l’existence de Clara devenue neurasthénique et morphinomane atteint son paroxysme : elle doit sortir de la quadrature de son cercle pour échapper au gouffre de l’hystérie qui l’aspire. L’appel du Nord et de sa pureté transparente pourrait bien lui sauver la vie, surtout si ce Nord est personnifié par le corps, l’esprit et l’âme du capitaine Ian Ryder.
Avec ce premier roman, Martine Desjardins fait son entrée par la grande porte des écrivains qui marquent une génération. Son écriture fluide et ciselée a les chatoiements du cristal et la profondeur de l’inconscient. »
Notice biographique de l’auteur : « De l’eau, l’écriture de Martine Desjardins épouse les formes envoûtantes, chargées d’émotion, et de l’architecture, celles, en apparences rationnelles, des certitudes intérieures. Pour autant, le monde habité par ses personnages n’est pas celui des passions innocentes; suspendu au-dessus du vide, il aspire à la lumière comme à une rédemption illusoire. » (rabat)
Résumé de l’œuvre : Nous sommes en présence d’un roman épistolaire et d’un roman journal qui se passe sur trois mois de l’été 1895 (de juin à août). La protagoniste, Clara Weiss (née Beaumont) emménage avec son mari Edmond, un botaniste passionné par la mycologie, dans une demeure isolée de Blackpool en Nouvelle-Écosse. Edmond Weiss a loué la maison au Capitaine Ian Ryder, parti en expédition au Pôle Nord, dans l’espoir que Clara, diagnostiquée hystérique et neurasthénique par le docteur Clavel (qui l’a laissé partir de sa clinique à contrecœur après 8 mois de traitement), se remettra enfin sur pied afin de consommer son mariage avec elle. Mais les traitements qu’Edmond inflige à Clara, bien qu’ils soient inspirés des recommandations (triviales, il faut le dire) du Docteur Clavel, réduisent rapidement la jeune femme à l’état d’esclavage, voire d’animal (Edmond va même jusqu’à la promener en laisse). Peu à peu, Clara se retrouve donc de plus en plus isolée, contrainte à une cure de sommeil ainsi qu’à l’obscurité continue, mais tiendra bon grâce à l’écriture de son journal et à celle de ses lettres à son « cercle », soit sa tante et sa sœur Irène, restées à New Raven où elles continuent de mener une vie mondaine, perturbée toutefois par l’effondrement du tunnel ferroviaire et la mort d’un jeune homme suite à une opération barbare du docteur Clavel. Pendant que le Capitaine, secrètement amoureux de Clara, relate dans son journal son expédition qui tournera à la catastrophe et dont il sera le seul survivant, Irène, la sœur aux mœurs dissolues se lancera dans une aventure avec Rakham, le sculpteur plagiaire qui lui inflige des traitements sadiques, et aboutira finalement à la clinique du docteur Clavel. Clara, de son côté, sera délivrée inopinément de son mari qui avale par erreur des champignons vénéneux. Au bout du compte toutefois, et malgré l’aveu du capitaine, Clara retournera vivre dans la maison de Blackpool afin de régler ses comptes avec Edmond.
Thème principal : l’isolement et la domination
Description du thème principal : Ce roman semble pouvoir être lu à deux niveaux. Dans le premier, c’est assurément l’isolement qui est le thème principal. Clara est prisonnière de son « cercle » (à la fois familial et médicinal si on peut dire) et cela ne fait que l’isoler davantage. Personne n’a véritablement la possibilité de l’aider à sortir de ce brouillard dans lequel elle ne cesse de s’enfoncer. Dans cette lecture, on voit Edmond comme un être dangereux et violent, et Clara comme une victime. Cependant, dans une lecture au deuxième niveau, un doute plane sur la véritable personnalité de Clara, car les discours sur elle que tiennent les autres personnages sont contradictoires. J’y vois dès lors la domination comme thème le plus important. Il y a, bien sûr, la domination que souhaitent exercer Edmond sur Clara, Rakham sur Irène, le docteur Clavel sur ses patients, le Capitaine sur le Nord, mais, ce qui est plus troublant, c’est à quel point, au bout du compte (et cela nous est révélé à la toute fin), les femmes aiment et souhaitent cette domination et finissent par s’attacher à leur bourreau bien davantage qu’à la vie. Les soi-disant hommes de « science » sont, au bout du compte, des êtres abjects qui maltraitent les autres et les femmes sont peut-être un peu plus folles et hystériques qu’elles veulent bien nous le laisser croire…
Thèmes secondaires : La folie, l’hystérie, la solitude, la haine, l’asservissement, le désir, l’amour.
Type de roman (ou de récit) : roman historique
Type de narration : multiples narrateurs autodiégétiques
Personnes et/ou personnages mis en scène : —
Lieu(x) mis en scène : Nouvelle-Écosse (New Raven, Blackpool et Oyster Bay – qui sont des villes imaginaires je crois), le Pôle Nord, l’Arctique.
Types de lieux : le bord de la mer, les petites villes de province, maisons, hôpital, océan.
Date(s) ou époque(s) de l'histoire : Fin 19e siècle – 1895. C’est aussi l’année où Freud et Breuer publient leurs Études sur l’hystérie.
Intergénérité et/ou intertextualité et/ou intermédialité : roman épistolaire et diaristique.
Particularités stylistiques ou textuelles : Très belle écriture, style classique et érudit.
Auteur(e) de la fiche : Manon Auger