====== Elisa Bricco (2015), "De la porosité des frontières" ====== **Introduction au collectif //Le bal des arts. Le sujet et l'image: écrire avec l'art//, sous la direction d'Élisa Bricco, avec la collaboration de Margareth Amatulli, Nancy Murzilli, Annie Oliver, Chiara Rolla, (Italie), Quodlibet, 2015, coll. "Ultracontemporanea", p. 11-20.** PDF du texte: {{:fq-equipe:de_la_porosite_des_frontieres_-_elisa_bricco.pdf|}} PDF de la table des matières: {{:fq-equipe:bal_des_arts_table.pdf|}} ===== Résumé du texte: ===== **À retenir: la porosité est celle de la littérature avec les autres arts et des arts avec la littérature (l'écriture)** Le texte s'ouvre sur le constat d'une porosité dans les formes artistiques actuelles: "Les frontières des formes artistiques tendent à devenir de plus en plus indéfinissables et poreuses sur l'effet d'une intense activité de circulation, d'hybridation ou, encore mieux, de métissage conduisant à la naissance de nouveaux régimes de la création et à la composition d’œuvres complexes et multiples." Il s'agit, selon Bricco, de "processus" et d'"aboutissements caractéristiques de la littérature contemporaine" (2015: 11). Elle renvoie alors à un essai de Nicolas Bourriaud intitulé //Radicant. Pour une esthétique de la globalisation// (Denoël, Paris, 2009) dans lequel ces phénomènes sont analysés. Elle résume: "Il entreprend de déchiffrer les diverses approches des oeuvres et de la création artistique d'aujourd'hui." Puis: "Bourriaud attire notre attention sur la façon dont le moi, le sujet créateur, peut s'épanouir grâce à ses accointances avec d'autres formes et d'autres pratiques esthétiques. Cette perspective permet de décrire avec précision les relations entre l'écrivain et les autres arts." (11) * À noter également que Bourriaud qualifie la création d'aujourd'hui d'"altermoderne" pour la distinguer du postmoderne et utilise l'image du radicant, "en raison de sa structure et sa manière de se développer à partir d'une tige se propageant horizontalement par radication [sic] progressive." (2015: 12) * Ce modèle le distingue du rhizome qui connote l'esthétique postmoderne "qui décrit une structure fluide et non hiérarchique où c'est la multiplicité des différentes éléments le formant qui compte plus que l'individuel." * Au contraire du rhizome, «"le radicant prend la forme d'une trajectoire, d'un parcours, d'un cheminement effectué par un sujet singulier" (Bourriaud, p. 62); et l’œuvre qui en résulte représente justement le sujet et ses penchants, son cheminement, ses rencontres fertiles et les télescopage avec des univers lointains.» (12) Bourriaud s'intéresse aux démarches artistiques, mais Bricco juge que ses constats sont transposables au champ littéraire - y compris cette idée de "l'esthétique radiante". Elle souligne: "Le contact avec des éléments hétérogènes, la circulation des pratiques créatives, la recherche de son identité chez l'autre, sont des éléments que nous pouvons repérer aussi dans la littérature contemporaine." (11) Elle évoque les travaux de son atelier (ARGEC) qui portent sur les œuvres littéraires entretenant un rapport avec les autres arts et constate: "Grâce à la porosité des frontières entre les diverses formes artistiques, les œuvres se rendent capables de représenter des univers de signification et de représentation élargis." (2015: 12) Elle fait ensuite un bref survol historique des liaisons entre art et écriture pour conclure que, si ce n'est pas nouveau, "cette tendance au décloisonnement, qui englobe désormais toutes les formes artistiques, s'est considérablement accrue pendant les dernières décennies du siècle dernier." (2015:13) - le monde de l'édition a emboîté le pas en créant des collections de dialogues art et littérature (ex: "L'un et l'autre" chez Gallimard, "Musées secrets" chez Flohic, "Entre eux" chez Argol). ---- Dans les textes ainsi produits, affirme-t-elle, "la communication entre les différentes formes artistiques se trouve mise en jeu au point que même __la notion d'hybridation n'est plus adaptée__ pour en définir la forme et qu'__il convient mieux de lui substituer celle d'intermédialité.__" (2015: 13) Parle de "transversalité des pratiques", disant que celle-ci "aboutit désormais à considérer l'écriture même comme l'un des neufs (ou dix?) arts, par la place qu'elle trouve par exemple dans le cinéma, dans les arts plastiques, dans la photographie, mais aussi parce qu'elle est devenue le sujet et l'objet de textes qui questionnent la création littéraire, ses enjeux et ses caractéristiques." (2015: 14-15) __Citation intéressante sur les effets de cette porosité:__ "Puisque, à l'évidence, les frontières entre les arts deviennent poreuses, les textes littéraires présentent de nouveaux défis aux lecteurs; ils mettent en scène de nouveaux paradigmes de lecture et de signification en expérimentant de nouvelles manières de dire la réalité, de raconter des histoires, de se poser face au monde." (2015: 14) Elle ajoute: "Ces phénomènes de circulation des pratiques et d'intermédialité sont assez difficiles à cerner, car ils se soustraient aux distinctions herméneutiques bien établies" (2015: 14) Elle présente alors la méthode de son groupe de recherche. La suite de l'article est consacrée à la présentation des articles du collectif (études sur les différentes formes et pratiques intermédiales: liens entre textes et arts de l'image, images cinématographiques, écriture et photographie, nouveaux espaces d'intermédialité, etc.). Ouverture: constat d'une grande fécondité des pratiques intermédiales: "Au-delà de la prise en compte des pratiques intermédiales et de leur diffusion, nous sommes en droit de nous demander si nous ne sommes pas en train de vivre une nouvelle mutation du champ artistique et de celui de l'écriture aussi." (2015: 20) *Manon Auger