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Table des matières
GONTARD, Marc, « Le postmodernisme en France : définition, critères, périodisation », dans Michèle TOURET et Francine DUGAST-PORTES [dir.], Le temps des Lettres. Quelles périodisations pour l'histoire de la littérature française du 20e siècle?, Rennes, Presses universitaires de Rennes (Interférences), 2001, p. 283-294. [VA]
1. Terminologie pour désigner le pluriel et/ou l'effacement des frontières
- « complexité », « désordre » (285)
- « réseau », « dissémination » (285)
- « réalité discontinue, fragmentée, archipélique, modulaire […], l'identité-rhizome, le métissage, la créolisation » (285-286)
- « dispositifs d'hétérogénéité» : « collage », « fragment », « métissage du texte » (287)
- le roman francophone est un « roman périphérique et décentré », caractérisé par « son hétéroglossie et son caractère d'hybride culturel » (288)
- « métatextualité » (289)
2. Explications ou concepts utilisés pour aborder le phénomène du pluriel et/ou de l'effacement des frontières
Le roman contemporain se pose en réaction à cette question : Comment écrire après le Nouveau Roman ? Gontard identifie trois critères qui conduisent les écrivains à adopter une variété de pratiques :
DISCONTINUITÉ
« Si le postmodernisme […] se veut d'abord une pensée du discontinu et de la différence, on conviendra d'appeler postmoderne tout discours narratif qui privilégie des dispositifs d'hétérogénéité comme le collage, le fragment, le métissage du texte » (287).
- Le collage
Gontard dit peu de choses du collage ; il en identifie les causes (voir plus bas), mais il omet de présenter les formes que peut prendre le collage. Tout au plus l'évoque-t-il par l'intermédiaire de Mobile de Butor (1962), qu'il compare à « un dispositif où la narrativité se dissout dans le collage qui cherche à reproduire sur le monde tabulaire l'effet mosaïque et la diversité inépuisable du continent nord-américain » (287).
- Le fragment
« [L]orsque le fragment traduit le chaos […] [contre] l'intentionnalité de l'oeuvre close, lorsque la maxime, dans sa prétention à énoncer un universel fait place à la subjectivité décentrée de l'aphorisme, mieux, lorsque la note, contre le mode narratif, devient une pratique textuelle privilégiant l'insularité et la dissémination, le composite plutôt que le composé, alors l'écriture fragmentale devient une écriture du discontinu qui entre en cohérence avec la condition postmoderne » (288).
- Métissage du texte
De telles formes d'hétérogénéité sont surtout à l'oeuvre dans le roman francophone, « roman périphérique et décentré qui, par son hétéroglossie et son caractère d'hybride culturel, se prête particulièrement à l'hypothèse postmoderne. […] [L']évolution du biliguisme post-colonial vers un bilinguisme assumé ou choisi, amène l'écrivain à découvrir en lui une forme d'altérité qui l'ouvre à la problématique postmoderne de l'être discontinu. Dès lors, le texte francophone devient de plus en plus un texte hétérolingue et multiculturel dont le statut identitaire migre de l'identité-racine vers l'identité-rhizome dans une conception composite et décentrée de l'être » (288-289).
MÉTATEXTUALITÉ
La métatextualité, largement exploitée par le roman contemporain, se distingue de la mise en abyme instrumentalisée du Nouveau Roman ; son mode de réflexivité est celui d'un texte qui, tout en s'écrivant, se commente dans le métatexte. Le procédé n'est pas nouveau, mais il s'impose massivement aujourd'hui. De plus, il n'est considéré comme postmoderne que « lorsqu'il s'écarte de toute intention ontologique ou existentielle (le “sens” de l'écriture !) pour travailler dans une dimension ludique ou ironique. » (289)
RENARRATIVISATION
La renarrativisation correspond à la revisitation des formes du passé, à un retour ironique à la linéarité. Elle s'exerce entre autres sous l'étiquette de « minimalisme », quoique ce terme, selon Gontard, semble mal choisi dans une perspective postmoderne, en ce qu'il renvoie à l'une des avant-gardes de la modernité en art plastique. « Il s'agit plutôt d'un gommage du champ axiomatique qui fait que les personnages donnent l'impression d'émerger d'une fin du monde dans une conscience somnambulique du réel. Cette “fin de l'histoire” […] se traduit par une modalisation narrative dominée par le principe d'incertitude » (290).
La renarrativisation ironique du récit peut également prendre la forme du pastiche de genres codifiés, de même que celle de l'autofiction. Celle-ci « installe le principe d'incertitude et la loi d'altérité au coeur de la question du sujet, dans le contexte fortement codé de l'autobiographie » (291).
3. Cause(s) du pluriel et/ou de l'effacement des frontières
DISCONTINUITÉ
Le procédé du collage « traduit aujourd'hui l'hétérogénéité de notre expérience du réel ou [sic] le transport aérien crée une contiguïté entre des cultures différentes qi entraîne une représentation du monde totalement discontinue. Cette ellipse temporelle du voyage en avion s'accompagne de la mondialisation culturelle et de la surinformation. L'inflation des messages et des images dans la mediasphère qui entraîne la pratique très postmoderne du zapping nous fait vivre dans un univers de superposition, de collage où le discontinu devient un procès universel » (287).
MÉTATEXTUALITÉ
« D'une manière générale, lorsque le métatextuel est en excès dans le récit postmoderne, c'est pour traduire, par l'aporie d'un récit qui se prend lui-même pour objet, le refus de penser dans une situation de “Défaite de la pensée” (A. Finkielkrault) sur fond de surinformation et d'hypermédiatisation. Dès lors le récit métatextuel témoigne d'une perte de confiance dans le réel qui demande à être redéfini et témoigne de son désengagement par une sorte de retrait ludique et narcissique… » (289)
RENARRATIVISATION
La renarrativisation, lorsqu'elle prend la forme du minimalisme, est dominée par un principe d'incertitude, « comme si la réalité était de l'ordre du virtuel (entre le probable et l'aléatoire) » (290).
4. Traces du discours critique des années 1960-1970
L'auteur tente de définir la postmodernité (complexité, désordre, chaos) à partir de la modernité (binarité, unité-totalité) - voir Spécificités historiques culturelles — France.