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-> LARNAUDIE, Mathieu, [["Propositions pour une littérature inculte"]], dans //Nouvelle Revue française//, no 588 (février 2009), p. 338-354. | -> LARNAUDIE, Mathieu, [["Propositions pour une littérature inculte"]], dans //Nouvelle Revue française//, no 588 (février 2009), p. 338-354. |
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//Puisqu'il y avait davantage (comprendre : trop) d'informations pour tout faire tenir en une seule page, cette troisième section a été divisée à nouveau en quatre pages, une par point:// | ----------- |
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| **//Puisqu'il y avait davantage (comprendre : trop) d'informations pour tout faire tenir en une seule page, cette troisième section, contrairement aux précédentes a été à nouveau divisée en quatre pages en raison d'une par point. Espérons que cela facilitera la navigation. Si ce n'est pas le cas, brûlez tout ! //** |
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[[Récits concurrents d'un même monde, versioning de la réalité]] | [[Récits concurrents d'un même monde, versioning de la réalité]] |
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[[Effritement du sujet narrant, de l'événement narré, du monde représenté]] | [[Effritement du sujet narrant, de l'événement narré, du monde représenté]] |
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| [[Complexification de la mise en récit de l'événement]] |
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| [[Diffraction du discours à tenir sur la réalité (fragilisation à ne proposer qu'une vision du réel)]] |
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====Complexification de la mise en récit de l'événement==== | |
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« Le récit totalisant demande un point final d’où tout le récit peut être englobé, point d’où tout se comprend. Or, ce point final panoramique est remis en cause par les romans de la discontinuité. Le choix de raconter des épisodes suffisamment autonomes privilégie une logique de la succession plutôt que de la configuration. Alors que la configuration propose une synthèse où importe la clôture de l’histoire, la simple succession peut occulter ce type d’injonction, oublier quelque peu les notions de complétude et de totalité d’un récit plus conventionnel pour retenir d’autres options : le décousu d’une histoire faite d’une succession d’évènements ou de moments, le désordre d’une histoire défaillante sur le plan de l’organisation logique ou chronologique, voire l’éclatement de l’histoire remplacée par un collage de plusieurs histoires ou de fragments d’histoires. Ce sont là les quelques modulations d’une narrativité « entravée et renouvelée » par la discontinuité » (p. 109). | |
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-> CLÉMENT, Anne-Marie, « La narrativité à l'épreuve de la discontinuité », dans René AUDET et Andrée MERCIER [dir.], //[[La narrativité contemporaine au Québec, tome 1 - La littérature et ses enjeux narratifs]]//, Québec, Les presses de l'Université Laval, 2004. | |
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Dans son texte « Découpage romanesque » (p. 141-171), Jacqueline Viswanathan considère que plusieurs romans contemporain, québécois et français, présente une segmentation qui les rapproche du découpage filmique. | |
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p.142-146 « Segmentation et discontinuité » Dans la première partie de son texte, Viswanathan affirme que « La discontinuité est un effet délibéré, non une négligence de l'écrivain. Elle n'appelle pas une lecture désorganisée et distraite. Au contraire, elle demande une participation active du lecteur qui recherche le design de l'oeuvre plutôt que la jouissance paresseuse de l'histoire. […] Il existe également toute une dynamique entre la continuité du texte, d'une part, et la discontinuité au niveau de l'organisation temporelle et spatiale, de l'autre. En général, le roman du XXe siècle ne se caractérise pas par une extrême fragmentation du texte. Il semble plutôt que les romanciers inventent un découpage original, propre à chaque roman. » (p. 145-146) | |
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p. 146-147 « Segmentation et mode scénique » Dans la seconde partie du texte, l'auteur écrit que, depuis longtemps, on conçoit le roman comme la construction d'un ensemble de parties autres que les divisions apparentes du texte . Elle s'intéresse au mode scénique qui serait l'intégration de scènes à l'intérieur du roman, arrêtant momentanément le récit sommaire. Selon elle, « Le mode scénique permettrait au romanciers de créer une illusion de présence et d'immédiateté grâce à divers procédés : usage du discours direct, rapprochement entre le temps de la narration et le temps de la fiction, concentration sur des aspects précis et concrets, en particulier visuels, de la diégèse. » (p. 147) | |
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Cette observation lui permet un rapprochement entre l'esthétique fragmentaire du roman et le découpage du scénario de cinéma. Elle donne les exemples de Marguerite Duras, de Patrick Modiano, d'Hubert Aquin, d'Esther Rochon et d'Anne Hébert, dont certains textes sont organisés à la manière de scénarios. | |
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-> POIRIER, Guy, et Pierre-Louis VAILLANCOURT (dir.), //[[Le bref et l’instantané. À la rencontre de la littérature québécoise du XXIe siècle]]//, Orléans, David, 2000. | |
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Il existe plusieurs combinaisons de séquences narratives: | |
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A) L'alternance-entrelacement (p. 73): « Dans ce type compositionnel, deux intrigues au moins se développent parallèlement pour se rejoindre ou non en un point donné. Le cinéma narratif contemporain utilise souvent ce type complexe de narration » | |
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B) L'enchâssement-emboîtement (p. 73) : « Ce cas est envisagé par Vladimir Propp : « Une nouvelle séquence commence avant que la précédente ne soit terminée. L'action est interrompue par une séquence épisodique. Après la fin de cet épisode, la première séquence reprend et s'achève. » | |
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C) L'enchaînement-addition (p. 74) : Schéma élémentaire dans lequel la fin d'une séquence devient le début d'une autre. | |
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-> ADAM, Jean-Michel et Françoise REVAZ, //[[L'analyse des récits]]//, Paris, Seuil, 1996. | |
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Ça semble être un contre-exemple... : p. 16 : « La formalisation romanesque, subordonnée à la narration plutôt qu'autonome, appelle par ailleurs une composition en suite d'événements, en cycles d'épisodes, en phases d'aventures. Activée par ses paramètres traditionnels (action, diversion, hasard romanesque, suspens), l'intrigue redevient le pivot moteur de la structure narrative. Fréquemment régie par le principe de la moindre contrainte, elle s'ouvre toutefois à l'inventivité immédiate, au libre jeu d'un imaginaire qui dicte, en incises, des échappées, des embardées, des digressions, un romanesque de l'occasionnel. » | |
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Mais pas tout à fait...: p. 16 : « L’intrigue se décale, se dédouble, se défait. Un jeu sur les proportions romanesques en redouble l’effet : les situations prolifèrent, les circonstances rebondissent, les aventures s’amalgament. Le regard spéculaire veille : tendant vers une histoire, le texte qui s’écrit entretient aussi sa propre conscience. Sans se décomposer, le roman s’autodétourne sporadiquement, à des degrés variables. » | |
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-> BLANCKEMAN, Bruno, //[[Les récits indécidables. Jean Echenoz, Hervé Guibert, Pascal Quignard]]//, Villeneuve, Septentrion, 2000. (MS - H13) | |
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__Le concept de bricolage__ | |
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- Brunel a recours à l'art du bricolage pour décrire la poétique à l'oeuvre dans //Je m'en vais// d'Echenoz. Il décrit ainsi la composition du roman qui, contre la continuité, oppose un principe d'alternance entre chapitres pairs et impairs, à la manière de //W ou le souvenir d'enfance//. L'alternance repose d'abord sur la temporalité de l'histoire (vie antérieure de Ferrer pour les chapitres impairs, vie nouvelle pour les pairs) ; plus loin, elle s'effectue plutôt sur le changement de personnages (Ferrer, impairs, Baumgartner, pairs). | |
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- Cet art du bricolage repose également sur un savant mélange entre fiction et réalité : « [L]a fiction qui s'entrelace à ce qui fait ou a fait la une des journaux ; la chronique se fraie un chemin à travers ce qui a défrayé la chronique » (289). | |
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- Le bricolage concerne enfin l'intertextualité à l'oeuvre dans le roman d'Echenoz : « [I]l y a toujours derrière le roman d'Échenoz, et dans son système de bricolage romanesque, le //Moby Dick// de Melville » (288), sans compter les références aux autres romans de l'écrivain. | |
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__Le concept de récupération__ (porosité?) | |
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- Par « récupération », Brunel entend la diversité des matériaux, des médias, des intertextes convoqués dans //Ingrid Craven// de Jean-Jacques Schuhl. Le livre est ainsi composé d'«[a]utant de chansons, de rengaines même, que d'éléments narratifs susceptibles de constituer un récit. Tous les cas de figure sont représentés dans le texte de ce **"roman"**, de l'énumération pure (p.20) à la citation intégrale (p.142-143) en passant par la pluralité des citations partielles (p.149). L'apparente marqueterie correspond en réalité au répertoire d'une chanteuse, Ingrid Craven » (296). | |
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- On sent que la linéarité de l'ensemble souffre un peu de cette technique de la récupération, qui peut aller « jusqu'au **collage** » (306) et qui « s'accompagne de multiplication, d'enchaînements : on passe d'Ulysse au capitaine Haddock dans //Tintin//, des Sirènes à la Castafiore » (306). D'où que « la technique romanesque de Schuhl [apparaît] **perpétuellement ambulatoire** d'un temps à un autre, d'un point de l'espace à un autre » (301). Au risque d'égarer le lecteur : « Mais peut-être y a-t-il trop [...] d'éléments pour le lecteur perdu ici dans une autre manière de "bric-à-brac esthétique" » (302). | |
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-> BRUNEL, Pierre, //[[Glissements du roman français au XXe siècle]]//, Paris, Klincksieck, 2001. [VA - automne 2010]. | |
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À propos de //Sablier// de Danilo Kis: | |
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« D'où le parti pris constant de //Sablier// : ne pas éviter l'Histoire, mais la soumettre à une vision oblique, ou distanciée - que Kis dans ses textes de réflexion, réfère au concept d'« ostranéité » tel qu'il fut théorisé par le formaliste russe Viktor Chlovski : le processus visant à « rendre étrange » la représentation pour la soustraire aux « automatismes de perception ». » | |
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En ce qui concerne les faits, motifs et notations récurrents dans le récit : « ces corrélations à distance, de fait, n'ont pas seulement pour fonction d'unifier ce que la fragmentation sérielle (l'absence de « déroulement ») disperse, - mais encore de susciter une sorte de chatoiement du tissu narratif : un jeu de reflets, d'échos, de réverbérations, proprement chromatique. » | |
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-> SCARPETTA, Guy,[[« La diaspora du sens »]] dans //L’Âge d’or du roman//, Paris, Grasset, 1996. | |
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====Diffraction du discours à tenir sur la réalité (fragilisation à ne proposer qu'une vision du réel)==== | |
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La diffraction évoque la brisure fondamentale entre l'être et le monde: «Évoquer l'exigence fragmentaire, c'est concevoir l'écriture comme espace de questionnement, postuler non pas l'inachèvement d'une forme et d'une pensée, mais avouer la brisure fondamentale entre l'être et le monde.» (Leduc-Leblanc: 59/«l'indicible» de Blanchot) | |
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-> GALLANT, Janine, Hélène DESTREMPES et Jean MORENCY (dir.), //[[L'œuvre littéraire et ses inachèvements]]//, Québec, Groupéditions, 2007. | |
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p. 11 : « [L'impossibilité pour la littérature de se penser universelle]régit enfin la pratique du texte, moins épris que jamais d'appartenances génériques, en recherche de formes mutantes et hybrides, accordées à un univers dont le sens se recompose. À époque incertaine, récits indécidables : la notion d'indécidabilité narrative se veut la théorisation souple de ce postulat ». | |
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P. 13 : « La notion du récit indécidable désigne alors un texte aux degrés de fictionnalité différenciés, qui subvertit les catégories littéraires établies en surimprimant leur protocole. A toute tension unilatérale, à toute concentration polarisatrice il préfère la mise au clair de ses possibles, la mise en doute du parti-pris, du pari-tenu - récit dévoyé, qui se complaît hors des lignes droites, en traverse des marges. Pluralité, différences, simultanéité, paradoxes : tels en seraient les paradigmes structurels. » | |
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-> BLANCKEMAN, Bruno, //[[Les récits indécidables. Jean Echenoz, Hervé Guibert, Pascal Quignard]]//, Villeneuve, Septentrion, 2000. | |
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Le réel est **multiple**, et la littérature se doit de se mesurer à la multiplicité du réel. Il n'y a pas de réalité simple et identifiable qu'il suffirait de "montrer", tâche à laquelle devrait être limitée la littérature, "comme s'il y avait, donc, un réel pur, immaculé, original et authentique, en deçà des représentations et des médiations, en deçà de ses modes d'appréhension et du sujet qui s'y met en jeu. Bref, il ne suffit plus de promener son miroir au bord de la route pour restituer la réalité comme si la langue était transparente et que la littérature faisait croire au réel.\\ | |
"Nous désirons une littérature **plurielle**, **multiple**, qui ne se distingue pas du réel, mais engage une expérience du réel dans toute sa **complexité**. La littérature n'est aucunement un reflet du monde; elle fait intégralement partie du monde. La littérature fabrique du réel; elle l'agence, elle le rend lisible et le suscite; en tant que pensée sensible, elle participe, pleinement, de ce qui le compose." (352) | |
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-> LARNAUDIE, Mathieu, [["Propositions pour une littérature inculte"]], dans //Nouvelle Revue française//, no 588 (février 2009), p. 338-354. | |